À l’ère du réchauffement climatique, les épisodes de sécheresse et d’incendies, historiquement rares, deviennent récurrents. Cet été, la France et le continent européen n’ont pas été épargnés.
Selon le système européen d’information sur les feux de forêts (EFFIS), plus de 60 000 hectares ont brûlé en France. Ce chiffre dépasse les 660 000 hectares à l’échelle européenne, soit des records depuis le début de la récolte des données satellitaires en 2006.
Ces événements extrêmes (vagues de chaleur, sécheresses et feux) proviennent principalement de l’augmentation de la température moyenne globale. Les données de Météo France démontrent qu’avec ces hausses de températures, le rythme et l’intensité de ces événements n’ont fait que se renforcer depuis la fin du XXème siècle.
Selon le Programme pour l’Environnement des Nations Unies (UNEP), les feux incontrôlés touchent de manière disproportionnée les nations les plus pauvres du monde. Or, ce sont les populations les plus vulnérables, habitantes des lieux à haut risque, qui sont les plus directement affectées par l’inhalation de la fumée des feux de friches, soit un impact sanitaire élevé. Les coûts économiques de la reconstruction à la suite des dommages des zones en raison des feux incontrôlés peuvent dépasser les moyens des pays à faible revenu ; ces phénomènes entravent les progrès liés aux objectifs de développement durable des Nations unies et creusent les inégalités sociales.
Face à cette réalité alarmante, il y a-t-il encore espoir pour une planète au bord de l’asphyxie ?
La Théorie du Donut : une solution pour un futur durable ?
Force est de constater que notre modèle économique actuel est devenu insoutenable pour les populations et la planète. C’est dans ce contexte que l’économiste Kate Raworth, de l’Université d’Oxford, a proposé la Théorie du Donut. Cette théorie est un modèle d’économie circulaire qui vise à garantir les besoins essentiels des populations tout en tenant compte des limites planétaires. Elle comprend deux dimensions : la première représente le cercle intérieur du Donut et exprime un plancher social de droits humains indispensables à la dignité (l’éducation, la nourriture, l’eau, l’équité sociale, etc.). La deuxième dimension représente le cercle extérieur du Donut et se traduit en plafond environnemental déterminé par les limites planétaires (le changement climatique, les pollutions, l’épuisement des énergies fossiles, etc.).
Le modèle illustre ainsi une économie alternative qui prend en compte les défis sociaux et environnementaux actuels à travers un ensemble d’indicateurs, en s’aidant de la forme du célèbre beignet américain : le donut. La partie centrale du Donut symbolise l’espace où le développement reste durable pour la planète et l’humanité.
Assurer un développement dans ces limites acceptables est possible. Pour y parvenir, les pouvoirs publics doivent être attentifs à respecter les limites planétaires afin de stabiliser le climat d’ici 2100, favoriser les productions agroécologiques durables, réguler les grandes entreprises, s’attaquer aux inégalités femmes-hommes, garantir une fiscalité plus juste et assurer les besoins humains de base par les services publics.
Les défis du changement : n’est-il pas trop tard ?
« Il n’est pas trop tard, mais ça presse », alerte le Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (GIEC). Le réchauffement climatique devrait dépasser la barre des +1,5 °C d’ici 2030, 10 ans plus tôt que prévu. Face à cela, l’inaction peut avoir des conséquences irréparables.
Si l’on se penche sur les indicateurs du Donut français, les résultats ne sont pas très rassurants. Malgré une meilleure performance sur le plan social (seul l’indicateur de niveau d’emploi est légèrement en dessous du plancher de durabilité), le pays dépasse les limites environnementales dans 6 indicateurs (sur un total de 7).
En effet, le Donut met en lumière l’urgence de faire évoluer les pratiques de la part de la société et des pouvoirs publics. Reste à savoir si nos dirigeants sont prêts à mettre en application un véritable changement de comportement. La démocratisation de l’utilisation de nouveaux outils d’évaluation et d’aide à la décisions, associant des indicateurs alternatifs de bien-être et de durabilité comme le Donut, peut représenter un premier pas vers un développement souhaitable et soutenable.
Si certaines capitales européennes ont déjà franchi le pas, en adoptant officiellement le Donut comme outil d’aide à la décision (Amsterdam, avec son plan « Amsterdam circulaire 2020-2025 », une démarche qui a inspiré d’autres villes comme Bruxelles, Copenhague et Portland aux États-Unis), alors qu’attendons-nous ? Mieux vaut sortir le donut de la friteuse avant qu’il ne soit trop cuit…
Article rédigé par Louisiana Teixeira, coordinatrice de recherche à l’Institut de Recherche pour le Développement et économiste chez BSI Economics
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