Du 10 au 12 mars, a eu lieu le premier « start-up week-end refugees », organisé par Damien Gromier et Joséphine Goube. 85 participants ont planché pendant 54 heures pour trouver des solutions digitales pour aider les réfugiés. Reportage.
À l’annonce du résultat, ils se prennent dans les bras. Certains ont les larmes aux yeux. Dadou Moano prend le micro pour remercier tout le monde : « Le code, c’est le latin d’aujourd’hui ». Dadou Moano et ses coéquipiers sont les 7 participants de l’équipe gagnante, tous demandeurs d’asile, en France depuis environ 2 ans. Alors qu’il y a six mois, ils commençaient une formation pour apprendre à coder chez Simplon, ils n’ont pas dormi du week-end pour développer leur site. Qui mieux que des réfugiés peuvent savoir ce dont on a besoin quand on débarque en France après avoir traversé la Méditerranée ? Leur projet Refuhelp est une plateforme pour trouver toutes les informations pratiques : hébergement, santé… Tout y est simplifié avec des pictogrammes pour faciliter la compréhension. « La France, ce n’est pas que l’image renvoyée par les médias. Ils s’y passent des choses positives aussi. Le numérique est une passerelle », raconte Abdoulaye Sacko. « Cette équipe est forte. On sait que demain, ils vont travailler jusqu’à réaliser un site qui va servir à tout le monde. En plus, ils ont la confiance des différentes communautés dont ils font partie, venant de 3 ou 4 pays différents en Afrique», rajoute Joséphine Goube, coorganisatrice du week-end et CEO de Techfugees. L’équipe gagne un accompagnement avec Paypal et Techfugees et un bureau physique pendant 6 mois au sein du Liberté Living-Lab.
Aider un camp de réfugiés en Grèce
L’autre challenge de ce hackathon était aussi de trouver une solution pour aider le camp de réfugiés Elpída, dans la ville de Thessalonique en Grèce. Sur place, pour gérer les stocks et les dons destinés aux 150 personnes hébergées (vêtements, produits d’hygiène, nourriture…), les bénévoles font tout à la main dans un tableur excel. C’est Joséphine Goube qui a proposé à l’un des responsables de venir sur place pour profiter des talents des ingénieurs réunis ici pour trouver une solution digitale. L’appli Bazaar est née pendant ces 54 heures et leur facilitera la vie sur place.
« Il faut éduquer les jeunes techniciens à aider les réfugiés puisque les politiques ne le font pas. Non seulement les réfugiés ont du talent mais en plus, nous sommes capables de les accueillir et de les intégrer. La moitié des participants sont des réfugiés et la moitié d’entre eux étaient des ingénieurs dans leur pays», explique Joséphine Goube. C’est le cas de Rakeeb qui pitche le projet de son équipe : Jobfugees, une plateforme pour faciliter l’accès des réfugiés à des stages de 6 mois et des séances de coaching pour une meilleure insertion professionnelle. Il sait de quoi il parle. Au Sri Lanka, il était ingénieur. En France, il lui est impossible de retrouver le même niveau de poste (barrière de la langue, de la culture locale…) alors que des entreprises cherchent ce genre de profil. Dans une autre équipe, Nour Allazkani raconte que le premier mot de français qu’il a appris c’est « Oh la la », ce que tout le monde lui répondait quand il racontait son voyage pour venir depuis la Syrie il y a un an. C’est pour cela qu’il veut, avec ses collaborateurs, faire matcher l’offre et la demande des cours de français pour les étrangers « pour ouvrir les portes d’une nouvelle vie » avec Comprendre pour Apprendre, qui a remporté le coup de coeur du jury.
Scalabilité et ambiance bon enfant
Le jury, composé de Francis Barel de PayPal, Marie-Astrid Gillier de l’association Singa, Patrick Robin de France Digitale, Ethan Pierse de Nest VC, Cécilia Gouby, responsable du programme Bizspark chez Microsoft et Joséphine Goube, pose des questions pertinentes sur les projets pitchés. Fabien Barel ne parle que de la scalabilité possible des projets et Joséphine Goube y va de son commentaire personnel. L’ambiance générale est bonne, plutôt bon enfant. Tout le monde est jeune et veut apporter sa pierre à l’édifice et pourquoi pas changer le monde. Quand la salle a un petit coup de mou, Damien Gromier, le chauffeur de salle et coorganisateur, rebooste le public à coup de cris, « tapez dans vos mains » ou « tapez des pieds ». Et ça marche. « C’est tellement excitant, j’adore l’ambiance. On se prend très facilement au jeu », s’exclame Clémentine Vaure, étudiante en droit de 21 ans. Elle s’est inscrite parce qu’elle aime le monde des start-up. Vendredi soir, elle a pioché son projet Easy Care, une application destinée aux médecins pour faciliter la compréhension de la posologie des médicaments pour les migrants. Elle ne connaissait personne, une petite dizaine de volontaires l’ont rejoint pour travailler sur l’application. Elle n’est pas trop du soir, alors ils ont fait en sorte d’être très efficaces durant les deux journées. Ce dimanche, en fin de journée, ils se sont lâchés pendant leur pitch de 4 minutes : l’un était en blouse blanche avec un stéthoscope et les GIF étaient drôles. « Ce que j’ai vu c’est qu’au début, les gens ne se parlaient pas, ils étaient renfermés sur eux-même. Dès le lendemain, ils s’étaient mélangés dans les équipes. Samedi soir, quand je suis rentrée chez moi, je ne marchais pas, je volais. C’est exactement pour ça que je fais ce genre d’événements », se réjouit Joséphine Goube.
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