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On A Testé… SeaBubbles, Les Taxis Qui « Survolent » La Seine

© Samir Hamladji

En dépit des lenteurs et des pesanteurs administratives qui ont longtemps retardé son « envol » dans l’Hexagone, la start-up Seabubbles, dirigée par le tandem de navigateurs Alain Thébault – Anders Bringdal, est (enfin) parvenue à faire « voler » ses fameux taxis au-dessus de la Seine. Reportage.  

« Nous avons un vol à 6H vendredi matin ». D’emblée, le coup de fil de l’attachée de presse de Seabubbles détonne au regard du vocabulaire employé. Un « vol » pour naviguer sur la Seine, voilà qui est peu commun. Néanmoins, ce terme est choisi à dessein, les fameuses « bulles » savamment peaufinées par Alain Thébault et son comparse suédois Anders Bringdal ont en effet  la particularité de « voler » au-dessus des flots. A 50 cm des vagues pour être précis, grâce à un système de « foils », sortes d’arcs en fibre de verre immergés qui propulsent ce véhicule futuriste au-dessus des eaux. Paris s’éveille, la Seine s’étend à perte de vue et cette balade matinale permet de vérifier que le  leitmotiv de la start-up, « zéro émission, zéro vague, zéro bruit », est parfaitement respecté.  Oscillant entre 18 et 25 km/h, les « Bubbles » se fondent dans le paysage, en dépit de leur forme arrondie, et permettent d’apprécier la quiétude d’un trajet « Bastille – Beaugrenelle » qui, sur la terre ferme, pourrait occasionner quelques petites contrariétés de circulation, malgré l’heure matinale. Soutien de la première heure du projet, Anne Hidalgo nous succédera d’ailleurs ce vendredi matin à bord de l’un de ces véhicules futuristes.  Après les critiques nourries de plusieurs usagers contre le « Vélib’ New-Look », ou plus récemment sa propre sortie contre le modèle « Autolib’ », l’édile de Paris a dû savourer cette petite escapade, loin des contrariétés quotidiennes, et peut-être réfléchir aux conditions d’une intronisation « officielle » de Seabubbles dans la capitale. L’avenir nous le dira.

Car si « les deux oiseaux du large », comme aiment à se surnommer Alain Thébault et Anders Bringdal, ont enfin pris leur envol à Paris, après notamment plusieurs essais concluants en Suisse, ils ont dû se battre bec et ongles pour parvenir à faire voler leurs « bulles » au-dessus du fleuve cher à Apollinaire.  La faute à une réglementation particulièrement contraignante.  En effet, cette dernière interdit de circuler à plus de 12 kilomètres par heure sur la Seine dans le cœur de Paris. Une limitation de vitesse destinée à ce que les bateaux et autres véhicules arpentant les rives de la Seine ne fassent pas trop de bruit à proximité des espaces résidentiels et des berges touristiques comme l’Ile de la Cité.  « Nous avons réussi à mettre tout le monde autour de la table et prouvé que notre projet pouvait s’avérer très utile pour tous les acteurs concernés. Nous les avons rassurés sur la capacité de nos véhicules à réunir toutes les conditions de sécurité », explique Anders Bringdal. En effet, une fois à bord, aucun soubresaut ne vient contrarier la circulation du « bubble » qui rejoint son point de destination sans la moindre secousse.  La sensation est agréable et permet également, chose appréciable, d’offrir un nouvel angle de vue sur la Ville-Lumière.  Pouvant abriter jusqu’à 4 personnes, les « bubbles » et leur design soigné nous ont offert une promenade déconcertante mais finalement assez paisible , faisant (largement) oublier le réveil aux aurores.

 Au-dessus des flots

A l’heure où les questions de mobilité prennent de plus en plus d’importance au sein du débat public, une initiative comme Seabubbles pourrait permettre de décongestionner les centres-villes et proposer une alternative crédible aux moyens de transports dits traditionnels. Le tout en moins de deux ans. « En 2016, nous dessinions les premières maquettes avant de présenter notre premier prototype, qui ressemblait davantage à une caisse à savon, au Salon Vivatech en 2017. Et aujourd’hui, nous parvenons à faire voler nos bulles au-dessus de la Seine », souligne, avec une pointe de fierté, Alain Thébault. Outre le soutien d’Anne Hidalgo, un autre homme politique a eu les yeux de Chimène pour le projet, dès les prémices en 2016. Son nom : Emmanuel Macron. Alors impétueux ministre de l’Economie, il avait pour ambition d’équiper les services des douanes de deux véhicules estampillés SeaBubbles. Une doléance qui restera lettre morte, le futur locataire de l’Elysée s’attirant, au passage, les foudres de ses collègues de Bercy, Christian Eckert et Michel Sapin, qui lui avaient rappelé que les services de douanes relevaient du champ d’action du ministère des Finances, leur prérogative.  Et depuis ? Plus rien ou pas grand-chose. « J’ai voté pour le président Macron et je suis convaincu qu’il est une chance pour la France. Il est remarquable. Mais malheureusement, en tant qu’entité emblématique de la start-up Nation, nous aurions apprécié un signe positif de sa part.  Le Prince Albert est venu tester une « bulle », l’ex-présidente de  la Confédération suisse également », déplore Alain Thébault.

Et de développer sa « déception », à l’encontre du chef de l’Etat. « Malheureusement les hommes politiques sont souvent dans la posture. Hormis, je le répète, Anne Hidalgo qui dit ce qu’elle fait et qui fait ce qu’elle dit, nous aurions vraiment (il insiste) apprécié un signe du président Macron ». Portant au pinacle l’agilité administrative de pays comme la Suisse – où SeaBubbles a pu effectuer plusieurs test sur le Lac Léman – ou la Suède, patrie du cofondateur de SeaBubbles, Anders Bringdal, Alain Thébault met en exergue « l’énergie positive » et la volonté de ces deux nations de s’affranchir des pesanteurs administratives pour faire la part belle à l’innovation et à la prise de risque.  « SeaBubbles est une belle combinaison franco-suédoise », se félicite, pour sa part, une autre invitée de prestige de ce test grandeur nature, l’ambassadrice de Suède en France, Veronika Wand-Danielsson, qui semble elle aussi conquise par « l’œuvre » de son compatriote, Anders Bringdal. Il faut dire que sur ces questions environnementales, la patrie de Nobel a plus qu’un temps d’avance. En attendant davantage de reconnaissance du sommet de l’Etat français, SeaBubbles poursuit son bonhomme de chemin et espère donner rapidement rendez-vous au grand public pour qu’il puisse, lui aussi, voler au-dessus des eaux saumâtres du fleuve le plus célèbre de France.  « Pourquoi pas en 2019 ? » souligne Anders Bringdal ? Rendez-vous est pris pour un second voyage.

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