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MedTech : Les Fleurons Français Contraints A L’Exil

© Getty Images

Faute de pouvoir trouver un financement dans l’Hexagone, plusieurs start-up issues de l’univers « MedTech » n’ont d’autre alternative que de passer sous pavillon étranger pour poursuivre leur croissance.

Un phénomène inquiétant. L’exode massif des pépites françaises de la MedTech qui, faute de trouver un financement au sein de la « mère-patrie », n’ont d’autre choix que d’aller voir si l’herbe est plus verte ailleurs, selon l’expression consacrée.  Et les exemples sont légion. Dernier en date – pas plus tard que ce lundi -, le rachat du laboratoire français de radiopharmacie Advanced Accelerator Application (AAA) par le géant suisse Novartis. Montant de la transaction : 3,9 milliards d’euros.  Le prix proposé de 41 dollars par action ordinaire et 82 dollars par certificat de dépôt (ADS, American depositary share) représente une prime de 47% par rapport au cours de Bourse d’AAA avant de premières informations de presse, le 27 septembre, sur un intérêt supposé du groupe suisse. Novartis, premier fabricant mondial de médicaments de prescription, vise, via cette opération, créer des images fonctionnelles des organes et des lésions, mais également traiter des maladies comme le cancer. Surtout que le produit phare du laboratoire français, le Lutathera, utilisé dans le traitement des tumeurs neuroendocriniennes gastro-entéro-pancréatiques a obtenu, le mois dernier, l’aval des autorités européennes.

Il y a deux semaines, c’était au tour de la start-up Vexim, spécialiste en chirurgie peu invasive du dos et ayant notamment mis sur orbite le SpineJack, un implant révolutionnaire permettant de réparer une fracture d’une vertèbre, de tomber dans l’escarcelle de l’américain Stryker Corporations pour un montant de 185 millions de dollars. Enfin, dernier exemple, il y a un peu plus d’un an, MedTech – la bien nommée -, jeune pousse montpelliéraine spécialisée dans la robotique d’assistance médicale s’offrait au mastodonte américain Zimmer Biomet, leader mondial dans les soins muscolosquelettiques, en échange de 165 millions d’euros.  «Cela montre que la France produit de très belles start-up», s’est réjoui auprès de l’AFP Philippe Pouletty, directeur général de Truffle Capital et président d’honneur de France Biotech.

« Le meilleur écosystème d’Europe »

Couver des start-up pour les voir briller sous d’autres latitudes ne peut néanmoins pas véritablement faire office de stratégie viable, au risque de voir des « fantassins » de MedTech quitter la France pour grandir à l’étranger. Une « dynamique » qu’il convient d’endiguer,  malgré un potentiel hexagonal des plus attrayants, comme le souligne Philippe Pouletty. «  La France bénéficie du meilleur écosystème du continent pour créer des entreprises innovantes et pourrait même être «la Sillicon Valley d’Europe». Mais un « grain de sable » – doux euphémisme – demeure. L’épineuse question du financement.  Car si les premières levées de fonds, se chiffrant à une dizaine de millions d’euros en moyenne, ne posent pas de réelles difficultés, les choses se corsent lorsque la société croît et nécessite des financements plus importants. Tout comme la tentation de faire appel à des fonds étrangers.

Le président d’honneur de France Biotech avance un début d’explication.  «Le marché boursier Euronext n’est pas assez profond ». Et de poursuivre. « L’épargne des Français et des Européens n’est pas suffisamment investie dans le développement de ces jeunes entreprises super-innovantes, les empêchant d’atteindre une taille intermédiaire ». Ainsi, toujours selon le président de Truffle Capital, 10 à 15% des actifs financiers aux Etats-Unis s’orientent vers des sociétés nouvellement créées contre moins de 0,5% de l’assurance-vie en France. Un « gap » colossal qui, de prime abord, semble difficile à combler.

«95% des groupes en capacité d’être acheteurs sont américains ou suisses»

Mais cet « exode massif » ne serait pas une fatalité aux yeux de Franck Sebag, associé du cabinet EY. «Il y a de belles biotechs qui restent indépendantes et qui arrivent à se financer», explique-t-il toujours à l’AFP, citant l’entreprise biopharmaceutique Genfit. Celle-ci ayant, en effet,  levé environ 150 millions d’euros il y a quelques semaines. Toujours selon Franck Sebag, les montants investis en capital risque ont bondi de 145% entre 2014 et 2016 avec 2,2 milliards d’euros levés, dont environ 20% à 35% ont financé des medtechs et biotechs (les deux tiers étant allés vers le numérique). De quoi espérer des lendemains qui chantent pour les MedTech françaises ? Pas si sûr dans la mesure où aucun géant du secteur n’a réussi à émerger dans l’Hexagone. Ainsi, Vexim, avant son rachat par Stryker a confirmé avoir été approché par trois grands acteurs… mais aucun d’entre eux n’était français ni même européen. «95% des groupes en capacité d’être acheteurs sont américains ou suisses. Et demain, ils seront asiatiques», abonde Philippe Pouletty.

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