Les entrepreneurs français se trompent. Le secret pour développer une entreprise n’est ni d’avoir un produit génial, ni d’avoir une stratégie de fou : c’est d’avoir la capacité d’exécuter la vision que l’on a pour son entreprise. Un point pris en compte depuis longtemps par les cabinets d’analystes américains comme Gartner et Forrester qui apprécient le potentiel d’innovation et de croissance des acteurs de la tech sur cette base et qui avaient pressenti les succès et la croissance de sociétés comme Google, Amazon ou encore Salesforce.
C’est aussi ce qui a fait le succès de Ford : le constructeur automobile a réorganisé sa production en inventant le travail à la chaîne, ce qui lui a permis de considérablement augmenter le volume de voitures sorties de ses chaînes de production à un prix accessible pour un plus grand nombre de clients. C’est aussi parce qu’Uber a su mettre en œuvre les idées que beaucoup avaient eues avant lui qu’il est devenu n°1 sur son marché. Ces deux exemples que présente Pascal Faucon, enseignant-chercheur à l’Université de Cergy-Pontoise, montre que maîtriser l’exécution est bien la clé du succès !
Pourquoi tant de mal à exécuter le plan prévu ?
Plusieurs raisons sont évoquées par les observateurs du sujet :
- la difficulté à rester concentré longtemps sur une tâche dans un monde sur-connecté, de sur-sollicitation et de zapping ;
- la non-définition des priorités qui empêche de gérer les imprévus et les tâches longues ;
- le fait de voir trop gros ou à une échéance trop lointaine, avec pour conséquence une exécution qui n’est pas tenable ;
- la difficulté de choisir ou d’arbitrer (sur ce que l’on va faire, comment on va le faire, etc.), qui retarde le passage à l’acte alors que l’on peut toujours recommencer si ce n’est pas parfait ;
- un temps trop long passé à analyser la situation et les actions à mener, et qui réduit le temps disponible pour passer à l’action et à l’exécution ;
- l’ennui car beaucoup de personnes sont plus motivées par la construction de stratégies que par leur mise en œuvre ;
- enfin la peur d’échouer ou de se tromper qui fait se poser des milliers de questions, repoussant d’autant plus le passage à l’action.
Capitaine de navire, pâtissier, soldat… entrepreneur : un même impératif, l’exécution
La confusion persiste dans les esprits entre le cap à atteindre et les moyens opérationnels à mobiliser pour l’atteindre. Or distinguer l’un de l’autre est essentiel pour dominer la complexité de la situation, évaluer l’urgence de l’action et se donner les moyens de réussir son projet.
La comparaison avec les régates est très parlante : tous les capitaines de voiliers savent qu’il est essentiel de se fixer un cap à atteindre et que ce qui fera la différence, ce qui les fera gagner, c’est la façon dont l’équipage va mettre en œuvre la stratégie établie pour atteindre le cap.
Autre analogie : prenons deux pâtissiers. Le dessert qu’ils doivent faire est le même ; en revanche, le résultat qu’ils obtiennent l’un et l’autre est plus ou moins réussi ou convaincant selon la façon dont ils exécutent la recette.
Enfin, troisième image : on pourrait distinguer l’observateur, le philosophe – qui pense une guerre – du soldat – qui l’exécute. Si ce dernier part au combat et ne respecte pas le plan de bataille, alors il met en péril les chances de victoire de tout son régime. Un des fondamentaux du livre L’art de la guerre de Sun Tzu.
Dans la pratique : 3 points à surveiller
Une fois qu’un entrepreneur a son projet en tête et a exprimé la vision qu’il a pour sa société, il doit se fixer un objectif et surtout travailler sur le plan d’exécution à déployer pour l’atteindre. Ce plan comprendra des tâches claires et simples, des priorités fixées entre les unes et les autres, des échéances à respecter pour les réaliser, et une revue de l’exécution.
Il partagera son plan d’exécution avec ses équipes ; ainsi chacun saura qui est responsable de quoi, ce qu’il a à faire et comment il peut / doit interagir avec ses collègues. L’enjeu sera principalement de faire en sorte que ce plan soit scrupuleusement appliqué et que les délais soient respectés. Car il suffit qu’un seul s’en affranchisse pour avoir un effet cascade sur toute l’équipe avec création de ressentiments, énervements, agacements, et que l’on se prive de la capacité d’arriver au bout du projet.
Enfin, pour réussir l’exécution de ce plan, l’entrepreneur devra veiller à ce que la structuration opérationnelle de sa société le permette. Par exemple, créer ou à l’inverse supprimer une direction fonctionnelle, revoir le modèle de distribution, travailler sur la gouvernance, etc. Alors il pourra mobiliser les bonnes ressources et compétences pour les bonnes tâches et missions.
L’exécution est un mal français qui joue de mauvais tours à beaucoup d’entrepreneurs. Si l’on veut réduire le nombre de start-up et PME qui, chaque année, mettent la clé sous la porte, nul doute que c’est un point d’amélioration majeur. Il est temps pour les entrepreneurs de prendre les dispositions pour être acteur et pas seulement penseur de leur projet d’entreprise, et l’exécution est au cœur de cette démarche.
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