Shawn Cartes, plus connu sous le nom de Jay-Z, est récemment devenu le premier rappeur à être milliardaire. À 49 ans, l’artiste connaît un immense succès pour sa carrière musicale, mais il a bâti sa fortune en diversifiant ses investissements dans de nombreux domaines.
Selon Forbes, son capital inclut :
- Armand de Brignac Champagne (en 2014, il rachète la marque, aujourd’hui estimée à 310 millions de dollars)
- des parts chez Uber (220 millions de dollars)
- des parts chez D’Ussé Cognac (100 millions de dollars)
- des parts chez Tidal, une plateforme de streaming musical (100 millions de dollars)
- des parts chez Roc Nation, une marque de vêtements (75 millions de dollars)
- son catalogue musical (estimé à 75 millions de dollars)
- une collection d’œuvres d’art (70 millions de dollars)
- de l’immobilier (50 millions de dollars).
Le succès de Jay-Z provient de sa précieuse qualité de touche-à-tout : choisir un domaine de divertissement et l’associer à un réseau de compétences commerciales. C’est ce que l’on appelle dans le monde du management un profil T-shaped, qui allie à la fois une large palette de compétences basiques (représentée dans la barre horizontale du T) et une spécialisation dans un domaine spécifique (représentée dans la barre verticale du T). L’artiste est l’illustration même de cette approche hybride, parvenant à la fois à acquérir des connaissances pointues et variées, mais également à remporter un franc succès. Son exemple d’équilibre entre spécialisation et généralisation devrait être imité par de nombreux dirigeants, notamment pour les 3 raisons qui suivent.
Plus d’opportunités professionnelles
Si de nombreux experts prônent la spécialisation dans un seul domaine de spécialité, certains travaux de recherche démontrent le contraire. Dans une étude mentionnée par le Harvard Business Review, les professeurs Jennifer Merluzzi et Damon Phillips analysent les dossiers de centaines de diplômés en administration des affaires menant une carrière dans des banques d’investissement. Ils découvrent alors que les étudiants qui s’étaient spécialisés dans les banques d’investissement au travers de leurs expériences professionnelles précédentes avaient moins de chance de « recevoir plusieurs offres d’emploi, par rapport aux autres étudiants qui avaient un champ d’expériences plus large ». Ils recevaient également des primes à la signature inférieures de 36 % à celles de leurs collègues.
Cette tendance pourrait d’ailleurs se maintenir tout au long de la carrière professionnelle. Dans le cadre d’une analyse de 64 000 cadres sur sa plateforme, LinkedIn a réalisé que « le fait de travailler à la croisée de plusieurs domaines, comme le marketing et la finance, fournit une compréhension globale des opérations commerciales essentielle au métier de cadre. Chaque fonction supplémentaire donne un coup de pouce qui équivaut en moyenne à 3 ans d’expérience professionnelle en plus ».
Si cette étude favorise une vision plus générale des parcours professionnels, elle ne néglige pas les bénéfices de la spécialisation. La coach en stratégie de carrière Caroline Ceniza-Levine conseille d’avoir une approche et des compétences généralistes, et de se spécialiser selon ses envies. « Pour les postes haut placés, les missions sont si complexes qu’il est essentiel d’avoir à sa disposition une expertise pointue et un éventail de compétences variées. Ce n’est pas la peine de choisir entre spécialiste et généraliste. Le succès peut résider dans un savant mélange entre les deux approches.
Plus d’innovation
Puis la recherche démontre que la diversité des équipes peut entraîner plus d’innovation, il semble logique de penser que la diversité des expériences professionnelles pourrait être bénéfique à l’échelle individuelle également. Par exemple, une étude menée par l’État du Michigan a découvert un lien entre l’acquisition de connaissances variées et la créativité chez des nombreux récipiendaires du prix Nobel. Il semblerait que la « variété des expériences permet aux individus de penser plus largement à leurs ressources, et à aborder les problèmes de façon nouvelle », explique Scott Sonenshein dans son livre Stretch.
Darwin a par exemple utilisé ses connaissances dans des champs disciplinaires variés pour mettre au point sa théorie de l’évolution. Steven Johnson, auteur de Where Good Ideas Come from, parle du scientifique dans son livre : « Pour résoudre le mystère, il a dû penser à la fois comme un naturaliste, un biologiste marin et un géologue ». Cette capacité à transcender les fonctions et les spécialités, comme Darwin et Jay-Z, est essentielle à l’innovation depuis toujours, mais s’applique encore mieux au monde des affaires aujourd’hui.
Plus de leadership personnel
Il est évident que les dirigeants doivent disposer de qualités générales, comme l’intelligence émotionnelle ou encore l’esprit critique, mais c’est en spécialisant une partie de leurs connaissances qu’ils pourront atteindre le sommet, à l’image de Jay-Z. Douglas Greenberg, ancien patron de la Shoah Foundation aux États-Unis, affirme dans l’ouvrage Future-Focused Leadership, écrit par Gary Marx : « Les dirigeants doivent être des généralistes, mais pas seulement. Ils doivent aussi avoir un domaine de spécialité et d’expertise qui leur confère une certaine légitimité… Il faut avoir des connaissances solides pour être un bon dirigeant, mais il faut être suffisamment malin pour acquérir toujours plus de connaissances ».
Allier généralisation et spécialisation devrait être l’objectif des dirigeants dans les années à venir, à la fois au niveau organisationnel qu’au niveau individuel, afin de préparer les carrières à l’épreuve du temps. Les dirigeants doivent se faire les architectes de leur propre carrière et développer à la fois leur éventail de compétences et la spécialisation de certaines de leurs compétences. C’est la stratégie adoptée par Jay-Z depuis de nombreuses années et qui semble faire ses preuves. L’artiste avait déclaré au magazine Men’s Health : « J’ai soif de connaissances. Ce qu’il faut, c’est apprendre chaque jour, pour devenir de plus en plus doué ».
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