ENTREPRENEURIAT | Il est la preuve vivante qu’il est possible de réussir en partant de rien. Malgré une jeunesse de misère dans la rue, Anthony Bourbon est devenu l’un des entrepreneurs les plus influents de l’Hexagone. Le fondateur de Feed et plus récemment de Blast Club incarne la réussite à la française. Une résilience à toute épreuve qui lui permet de bénéficier d’une force de frappe titanesque dans le paysage entrepreneurial français. Rencontre avec un artisan du « self-made » pour qui rien n’est impossible.
Issu d’une famille très pauvre, Anthony Bourbon grandit à Bordeaux dans un climat particulièrement difficile avec un père violent. À seulement 17 ans, il se retrouve à la rue. Là, il multiplie les petits boulots en parallèle de ses études pour tout simplement survivre. « À cette époque, j’étais obligé de me rationner à la fin du mois. Je ne mangeais pas à ma faim. C’était aberrant pour moi de manquer de nourriture dans un pays aussi développé que la France, explique Anthony Bourbon. Ma vision, c’était d’accéder à de la nourriture aussi facilement qu’à l’eau du robinet. » C’est cette idée qui, quelques années plus tard, verra naître Feed. Alors en fac de droit, le Bordelais se rend compte que son cursus ne lui plaît pas. En dehors des cours, il se renseigne sur les manières de générer de l’argent. Il se tourne naturellement vers l’immobilier et, avec ses camarades de classe, dotés de leviers financiers grâce à leurs familles aisées, il réalise des club deals dans l’immobilier. C’est ainsi que démarre l’aventure entrepreneuriale d’Anthony Bourbon. « L’immobilier m’a permis de me lancer. C’était un équilibre parfait avec l’entrepreneuriat, qui est une grosse prise de risque financièrement », explique-t-il.
Le nez dans le business, le jeune entrepreneur n’a plus de temps pour lui. À tel point qu’il n’a même pas le temps de manger. Il cherche alors un moyen de se nourrir de manière simple, rapide et peu onéreuse. En listant sur un tableur tous les besoins nutritifs de l’être humain et les quantités nécessaires à un bon équilibre, il s’amuse à créer des mélanges d’ingrédients avec de l’eau dans un shaker. Le résultat a un goût très céréalier, mais le breuvage fonctionne et coupe bel et bien la faim. « L’index glycémique est bas, à l’inverse des fast-food qui utilisent énormément de sucre et qui ne coupent la faim que pendant deux heures. Mes barres permettent de digérer pendant 6 ou 7 heures », explique Anthony Bourbon. C’est la naissance de Feed. Avec un marketing percutant, l’entrepreneur girondin et son équipe créent le buzz et touchent énormément de personnes. La start-up lève rapidement 35 millions d’euros et, pour la première fois, la marque Pepsi investit en France et rentre dans le capital de Feed. Pour Anthony Bourbon, tout se joue sur l’histoire que l’on raconte. « Il faut donner envie aux investisseurs de nous rejoindre. »
À 27 ans, sa première aventure entrepreneuriale est donc un franc succès. Et grâce à celle-ci, il accède à un certain nombre de dossiers de levées de fonds pour différentes start-up. Admiratifs de son flair pour les affaires qui marchent, les entrepreneurs se tournent vers lui pour préparer leurs pitchs et investir dans leur entreprise. L’idée des club deals, si elle bourgeonne à la fac pour Anthony Bourbon, se précise nettement. « J’avais un rôle d’intermédiaire entre les investisseurs et les start-up. C’était intéressant mais très chronophage. J’ai donc réfléchi à un système qui industrialiserait les deals pour en faire toujours plus. C’est comme ça que l’idée d’un club automatisé est née. »
Le serial entrepreneur profite de sa notoriété et use des réseaux sociaux pour promouvoir ce nouveau projet. Il y ajoute sa touche personnelle, en mélangeant les gros investisseurs, les stars du football avec des gens de classe moyenne qui placeraient 1 000 €. Un concept tout à fait inédit qui permet à tout le monde d’avoir son mot à dire, qu’Anthony Bourbon appelle le Blast Club. Un nom qui est en adéquation avec le principe, puisqu’il signifie décollage. À travers ce club privé, les gens peuvent investir aux côtés de son fondateur à partir de 1 000 € jusqu’à 80 000 € par deal. Avec 2 500 membres réunis en seulement quelques mois depuis son lancement en septembre 2022, le club connaît un début fulgurant et dispose vite d’une force de frappe colossale dans le paysage entrepreneurial français. Un succès qui découle de l’approche style start-up d’Anthony Bourbon. « On veut que les membres investissent dans au moins dix deals pour être sûrs de leur motivation et leur implication dans le mouvement. On organise des événements, des visios et on produit beaucoup de contenu pour maximiser l’aspect expérience du club. » Pour les membres comme les start-up, le club apporte un réseau gigantesque et l’impact est immédiat sur le chiffre d’affaires. Blast, pour son créateur, c’est la suite logique de sa vie. Car si Feed lui a fait découvrir l’entrepreneuriat et donné accès à une multitude de dossiers, Blast s’inscrit dans la continuité de ce qu’il faisait à la fac avec ses camarades. « Je crois au destin. Quand tu fais les choses bien, le bien revient vers toi. Pour moi, l’argent est une conséquence et non une finalité. L’important est avant tout de rester authentique. »
Blast, c’est 20 salariés, 2 500 membres et pas moins de 100 millions d’euros à déployer. Rien qu’en 2023, dix deals ont été financés. Des chiffres exceptionnels qui feront du club l’investisseur le plus actif de l’Hexagoneen 2023, et le plus gros investisseur du early stage. L’objectif à horizon 2024 pour Anthony Bourbon, c’est 500 millions d’euros à déployer, soit l’équivalent d’un fonds d’1,5 milliard d’euros. « La puissance du peuple est incroyable. C’est l’avenir de l’investissement. Cet investissement décentralisé que propose Blast permet de déployer beaucoup d’argent, mais aussi de créer un mouvement qui rassemble les classes sociales », explique l’entrepreneur bordelais. En plus de proposer des levées de fonds en start-up, Blast permettra dans quelques mois d’investir aux côtés d’Anthony dans des opérations immobilières. Idéal pour équilibrer son portefeuille. Le club prépare également une plateforme secondaire où ses membres pourront revendre leur participation, générant une petite bourse qui permettra de créer de la liquidité sur leurs actions.
Un chaperon pour les entrepreneurs
Qu’est-ce qui dynamise Anthony Bourbon au quotidien ? Une vision. Celle d’une revanche générationnelle. Pour l’entrepreneur bordelais, d’où l’on vient n’a aucune importance car le destin se force. Parmi les gens qui réussissaient, il ne voyait autour de lui que des héritiers. « Il faut d’abord penser à soi pour pouvoir rayonner sur les autres. Et c’est en rayonnant sur les autres que tu laisses une trace indélébile, affirme-t-il. Avec Blast, peut-être que l’on va réussir à créer une nouvelle manière d’investir dans le monde. L’argent que je gagne, je veux le réinjecter pour voir un impact réel sur l’écosystème. Je pourrais vivre ma vie tranquille sans avoir besoin de travailler, mais je suis tellement passionné par ce que je fais et je rencontre tant de gens brillants qui me donnent envie de faire une différence. » Ce qui motive le CEO de Blast, c’est de poser un regard bienveillant au bon moment sur des personnes qui ignorent leur potentiel. Un regard qui fera la différence, comme celui qu’a posé sur lui Mélanie Der, son ex-compagne et son bras droit chez Feed, lorsqu’il était à la rue. Pour Anthony Bourbon, le rôle de Blast est de renvoyer ce regard aux entrepreneurs sur lesquels les fonds classiques n’auraient pas parié. Des entrepreneurs partis de rien ou venus de la classe moyenne à qui les banques refusent de prêter. Au Blast Club, un salon Discord regroupe tous les membres et permet ainsi des interactions entre des personnes de milieux différents, voire opposés. Une richesse qui, selon son fondateur, fera de Blast le plus gros club d’investissement du monde et réduira les inégalités entre les classes sociales. C’est un enjeu dantesque auquel s’attaque l’entrepreneur bordelais mais il entend bien utiliser tout son temps et son expérience au bien de cette mission. « Les gens investissent plus facilement dans des entrepreneurs qui ont un parcours scolaire similaire. On veut effacer ces préjugés de sélection. Nous, on n’investit pas dans un parcours scolaire ou une classe sociale, mais sur l’envie, le mérite et le potentiel du business. »
Une résilience à toute épreuve
En 2022, Anthony Bourbon a accepté d’être jury dans l’émission Qui veut être mon associé sur M6. Une décision qui s’aligne parfaitement avec son désir de faire décoller les bonnes start-up en early stage. L’homme s’illustre avec son franc- parler et n’hésite pas une seule seconde lorsqu’il a un coup de cœur. S’il est déjà connu dans le milieu de l’entrepreneuriat, l’émission lui donne une nouvelle visibilité, notamment sur les réseaux sociaux. « Cette émission était une aubaine pour moi, mais surtout pour l’entrepreneuriat. C’est une manière de s’adresser à la jeunesse et de montrer des histoires humaines qui portent leurs fruits. Je crois énormément en la preuve par l’exemple. Pour moi, c’est une émission d’utilité publique parce qu’elle déclenche des vocations », affirme Anthony Bourbon, selon qui la production de M6 permettra à la France de rattraper le retard sur les États-Unis en termes d’entrepreneuriat. « On aura aucun mal à déployer nos 100 millions d’euros. Je vais faire en sorte de continuer à rester authentique pour montrer ce qu’est l’entrepreneuriat, sans édulcorer. Je suis pour la résilience. »
Cet état d’esprit, le CEO de Blast l’arbore partout. Dans la vie de tous les jours comme à la télé. Et dans cette continuité, il sort en 2022 un livre, Forcez votre destin. Un ouvrage percutant qui est en parallèle avec sa façon de penser, dans lequel il explique et développe toutes ses difficultés, mais aussi les forces qu’il a acquises pour réussir en tant qu’entrepreneur. Un livre qu’il « aurait voulu lire quand il avait 18 ans ». L’ouvrage, d’abord publié par Michel Lafon, est une réussite, avec plus de 10 000 ventes dès les premiers mois. Il sera réédité en 2024 par les éditions Pocket qui viennent de racheter les droits.
Dans tout ce qu’entreprend Anthony Bourbon, il n’y a aucune limite. Il prend une revanche contre la vie et, quels que soient les obstacles, il s’élèvera pour les surmonter. Celui qui se qualifie de « bulldog » par sa volonté de ne jamais rien lâcher, n’a qu’un souhait : bouleverser le système. Changer les choses en France et, dans cet objectif, se lever chaque matin avec une volonté à toute épreuve. « J’ai une volonté de fer parce que tout ça me dépasse. J’ai des objectifs qui vont bien au- delà de ma réussite personnelle. Je suis prêt à tout sacrifier pour avoir un impact. »
Cet article a été écrit par : Dominique Busso et Gaelle Ménage
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