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Anne Burrus, Enfant De La « Food »

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Apôtre du « bien-manger au quotidien », Anne Burrus, a décidé d’appliquer ce postulat à une « population » finalement assez peu représentée au sein de l’univers « Food », à savoir les enfants. A la tête de sa propre structure « Polisson », la jeune entrepreneure propose des kits « accessibles » pour initier les enfants aux joies de la cuisine.

« Un plaisir délicieux m’avait envahi, isolé, sans la notion de sa cause. Il m’avait aussitôt rendu les vicissitudes de la vie indifférentes, ses désastres inoffensifs, sa brièveté illusoire, de la même façon qu’opère l’amour, en me remplissant d’une essence précieuse ». Morceau de bravoure de l’histoire littéraire française, cet extrait maintes fois commenté issu de l’œuvre « Du Côté de chez Swann » de Marcel Proust, revient sur un épisode marquant de l’enfance du narrateur. Une réminiscence qui prendra corps dans l’expression désormais populaire de « Madeleine de Proust » pour évoquer un souvenir d’enfance remontant à la surface. L’enfance, période idoine pour ciseler ses goûts culinaires tout en mettant la main à la pâte. Un « double emploi » qui s’accorde à merveille avec la promesse de cette jeune FoodTech prometteuse baptisée « Polisson » et pilotée par la sémillante Anne Burrus. « Au départ j’avais pour ambition de proposer une offre du quotidien pour améliorer l’alimentation des enfants. En effet, en France, dans LE pays de la gastronomie, on n’apprend pas à cuisiner à l’école à nos enfants. Il n’existe, en effet, pas de politique d’éducation alimentaire concrète pour sensibiliser les enfants au bien-manger. Or les parents ont souvent à cœur de transmettre à leurs enfants de bons réflexes alimentaires », raconte, lucide, la jeune femme qui a choisi, comme nous le verrons, de démarrer en douceur, et d’éviter ainsi de se brûler les ailes.  Il est vrai que le panorama de la FoodTech hexagonale, en termes de rentabilité, est (très) loin d’être reluisant. Doux euphémisme.

Désireuse de rompre avec le modèle de « box » vu et revu, la patronne de Polisson décide de mettre en branle un « kit du quotidien », avec des ingrédients secs, correspondant à un plat qui pourrait être réalisé par les enfants eux-mêmes en moins de 20 minutes, pour s’insérer dans un quotidien chargé. Les produits frais nécessaires à l’élaboration de la recette sont à compléter au supermarché. Ce qui permet aux « vegans » de compléter avec des produits de leur choix, et de facto, rend le Kit Polisson accessibles à tous. Les recettes sont très gourmandes mais également saines puisqu’elles ont été élaborées avec des nutritionnistes. Elles ne comprennent par exemple aucun sucre raffiné et de faibles taux de matière grasse. Actuellement, Polisson propose deux produits d’appel pour faire son goûter maison.  Un tutoriel vidéo tourné par les enfants vient compléter la réalisation de la recette afin de permettre à l’enfant d’être parfaitement autonome. « L’offre Polisson » veut « démystifier » et tordre le cou à l’idée reçue selon laquelle « cuisiner maison » serait compliqué et coûteux à mettre en œuvre. Alors qu’en l’occurrence ledit kit ne dépasse pas les 10 euros.

Démocratiser le « fait-maison »

L’occasion également de rompre avec les sempiternels ateliers de cuisine pour enfant où l’on apprend à faire des cupcakes « hauts en couleur » à tête de licorne. « Et puis cela peut également permettre à l’enfant d’acquérir une certaine forme d’autonomie. Au moment de son départ de la maison familiale pour voler de ses propres ailes, il saura faire autre chose que des pâtes », sourit Anne Burrus. Mais l’offre, encore embryonnaire comme susmentionné, a vocation à s’étoffer avec des kits à la rentrée pour le petit déjeuner, le goûter ou le dîner. Une « sainte trinité » qui sera également rejointe, plus tard, par des kits thématiques, Pâques ou Noël en l’occurrence.  Le meilleur postulat pour éviter le crash financier et éviter de rejoindre le bataillon de FoodTechs  sous respiration artificielle et perfusion financière à coup de millions.

Mais avant de revêtir ses habits de dirigeante, la jeune femme a été à bonne école et à su tirer profit de ses expériences professionnelles passées qui la « nourrissent » encore aujourd’hui. « J’ai suivi un cursus classique. Lycée, classe préparatoire avant d’intégrer une école de commerce, l’ESCP Europe », narre Anne Burrus. C’est d’ailleurs durant son année de césure au sein de cet établissement qui a vu sortir pléthore d’entrepreneurs aujourd’hui accomplis qu’elle va œuvrer à la naissance d’une market-place en Tunisie. C’est aussi durant cette période que la question de l’avenir commence à poindre dans l’esprit de la jeune femme qui se dirigera finalement vers un cabinet de conseil. Remettant ses désirs d’entrepreneure à plus tard.  

Un long cheminement

Une expérience enrichissante à bien des égards mais qui engendrera également beaucoup de frustration. « Je passais beaucoup de temps à produire des slides sans même savoir si mes recommandations allaient être suivies. Je n’avais aucun moyen de mesurer concrètement les fruits de mon travail », explique-t-elle. Forte de cette expérience, l’entrepreneure en devenir rejoint le giron de Frichti, un univers davantage en adéquation avec son goût pour la « Food ». « J’ai appris beaucoup de choses mais c’était, à l’inverse de ma première expérience, trop opérationnel. J’avais besoin de prendre de la hauteur et de trouver la symbiose et l’équilibre parfait entre opérationnel et stratégie ». Ce sera la voie de l’entrepreneuriat et Polisson en figure de proue.

Car les projets fourmillent pour la petite FoodTech officiellement née au terme de trois jours de « bootcamp » organisé par Contrex et Willa (ex-Paris Pionnières où Polisson est toujours hébergée) qui a permis à Anne Burrus de « pitcher son idée » devant un jury. « Je me suis alors dit que si d’autres personnes que moi croyaient en mon projet, alors c’est qu’il avait peut-être un avenir ». Une première entrée dans la nébuleuse entrepreneuriale pour Polisson qui bénéficie d’un double accompagnement : une partie logistique assuré par Willa avec des coachs et des ateliers à thèmes, par exemple, tandis que le second volet est couvert par MyLittleParis que la jeune femme sollicite notamment sur des problématiques de communication. Toujours en fonds propres, Polisson a récemment récolté 10 000 euros en terminant à la seconde place d’un concours organisé par Carrefour, juste après avoir remporté le prix, cette fois, lors d’un autre appel à projets organisé par Disney, devenu un mentor pour la start-up.

Sur la brèche

De quoi commencer à paver doucement mais surement le chemin vers le succès. Pas à pas. « Avant d’aller voir des business angels, nous devons déjà réussir à convaincre et fidéliser une clientèle online. Une condition sine qua non pour continuer d’avancer sereinement avant d’intégrer le circuit du retail physique avec des partenariats avec des enseignes de grande distribution et des concept stores pour enfants», déroule Anne Burrus. Une rentrée chargée en perspective pour Polisson qui devrait d’ailleurs, à la rentrée prochaine, faire peau neuve. « Cela va tourner autour du thème proustien de la madeleine, souvenir d’enfance impérissable », lâche sibylline Anne Burrus.  L’enfance, cet éternel recommencement.  

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