Il a redonné un coup de jeune et de boost à une maison de champagne désormais incontournable, à tel point que de 300 000 bouteilles vendues chaque année il y a 25 ans, ce sont près de 2 millions qui se sont bues l’an dernier. Rencontre avec Alexandre Bader, 48 ans et plusieurs centaines de milliers de km au compteur, directeur général des champagnes Billecart-Salmon, recruté comme stagiaire par François Roland-Billecart en 1993.
Comment avez-vous transformé Billecart-Salmon qui, il y a à peine 10 ans, était encore une marque largement inconnue ?
Une montée en gamme, c’est très long. Avec François Roland-Billecart, 6e génération et PDG de la Maison, nous avons d’abord pris le risque de sortir de la grande distribution pour être référencés chez des cavistes. Ensuite, petit à petit, nous avons réussi à convaincre les plus grands hôtels aux quatre coins de la planète, soit en vendant en direct, soit en passant par des distributeurs qui possédaient de bons circuits de distribution sur leur zone. Pendant toute cette période, notre ambition déclarée était de passer du champagne que l’on servait quand un client demandait « une coupe » à une marque connue et reconnue que l’on réclame en arrivant au bar d’un hôtel ou au restaurant. Je savais que je ne voulais pas alimenter des cocktails, où personne ne sait quel champagne est servi. Je voulais que notre champagne embellisse une table, un bar.
Vous avez dû investir ?
Pour amplifier notre action, il a fallu continuer d’investir dans le vignoble et dans l’outil de travail. Nous avions compris que seule la qualité pouvait payer. A ce titre, François Roland-Billecart laissera à la 7e génération de la famille un outil particulièrement neuf et soigné.
Comment avez-vous procédé ensuite ?
Il nous a fallu recruter de nouveaux distributeurs et monter une équipe de vente pour exister par rapport aux grandes marques du secteur qui ont des moyens humains et financiers plus importants.
En 2003 nous avons fait évoluer l’image de la marque en créant le logo, le discours et en accentuant notre présence sur le terrain. Nous savions que le nom de famille était en train devenir une marque de luxe.
Aujourd’hui, le pari est réussi ?
Quand, le 31 décembre, 15 ou 20 des plus grands sommeliers au monde postent des photos où figure au moins une bouteille de Billecart-Salmon, ce n’est pas simplement une belle publicité. Cela signifie surtout qu’on existe. Nous sommes à Paris et à Londres, bien sûr, mais aussi à New York, Los Angeles, Tokyo, Hong Kong, Singapour, Melbourne, Berlin. En France, dans chaque ville qui a un hôtel de renom, un caviste indépendant, un grand restaurant, nous sommes présents. Aujourd’hui, il y a très peu de pays où nous ne sommes pas alors que nous avons envie d’y être. Par exemple, nous sommes enfin en Birmanie, il nous fallait les 3 ou 4 plus grands hôtels de luxe, et c’est fait, nous sommes à la carte. Même chose au Nepal et au Tibet !
Et en Afrique ?
L’Afrique du Sud est un pays historiquement implanté en Billecart-Salmon grâce à notre forte notoriété en Grande-Bretagne. En revanche, l’Afrique de l’Ouest – bien que nous soyons présents au Sénégal, Togo, Cameroun…et bientôt en Côte d’Ivoire – reste encore un terrain de jeu assez nouveau.
Comment comptez-vous consolider votre action maintenant ?
Nous voulons consolider la force familiale, garante à elle seule de la qualité depuis près de 200 ans. Il est important de comprendre que la qualité est essentielle. Qu’elle soit aussi bien dans les relations entre les actionnaires, le management, les équipes et tout cela se confirme dans la bouteille et enfin dans le verre. Tout notre écosystème doit tourner autour de cela. Il faut aussi, sans aucun doute, continuer à accroitre la notoriété de la marque et notre rentabilité.
Améliorer la qualité ?
Conforter la qualité. Notre valeur peut grimper aussi grâce à notre rareté – nous n’avons pas de gros volumes à proposer au marché. Et améliorer encore notre diffusion. Nous sommes très à l’écoute du marché mais le vin demeure le grand patron. Je voyage de façon incessante pour nourrir le réseau, faire des dégustations, analyser les attentes des clients. Mon rôle est d’être sur le terrain.
Quels sont vos principaux challenges ?
Paradoxalement, aujourd’hui, la difficulté n’est pas que de vendre même si évidement il existe une concurrence vive à travers le monde. La notoriété de la maison grandit à chaque bouteille ouverte et encore une fois c’est le vin qui fait la différence.
La vraie difficulté, c’est l’approvisionnement en raisin de qualité.
Vous faites confiance à vos troupes, quand vous n’êtes pas là ?
Totalement. J’appelle tous mes collaborateurs au moins une fois tous les deux ou trois jours, mais je considère qu’ils seront efficaces tant qu’ils viendront travailler en sifflant, tant qu’ils gagneront leur vie et seront assurés de continuer à la gagner parce qu’ils travaillent dans une maison familiale, qui est comme la leur.
Vous dites être arrivé chez Billecart-Salmon par hasard… Un coup de chance pour vous, ou pour la maison ?
Pour les 2 je pense puisque ça fait 24 ans que la famille me fait confiance !
J’ai rencontré la famille Billecart en 92 alors que je travaillais auprès de mes parents, commerçant à Reims. Puis, je me suis lié avec eux durant mes études. A la sortie de mon Master je suis allé voir François Roland-Billecart qui m’a trouvé un VSNE (volontariat au service national entreprise). Grâce à lui j’ai acquis les bases pour mener à bien nos futurs projets.
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