L’inégalité salariale homme femme est monnaie courante dans de nombreuses entreprises depuis des décennies et les différentes études et sondages ne font que le confirmer. L’univers du sport n’est pas épargné par ce phénomène, qu’il s’agisse de salaires ou de récompenses. Par exemple l’équipe américaine féminine de football, qui génère plus de revenus que l’équipe masculine, a porté plainte pour discrimination salariale contre l’U.S. Soccer en 2016, affirmant être rémunérée 75 % de moins que les hommes.
Forbes a publié son classement annuel des sportifs les mieux payés au monde cette semaine. Ce classement souligne les différences de revenus entre les hommes et les femmes dans le monde du sport professionnel. C’est la première fois qu’aucune femme n’y figure depuis que la liste présente plus de 50 noms (2010 et Forbes établit un top 100 depuis 2012). Il y a toujours eu au moins une joueuse de tennis. Serena Williams est la sportive la mieux rémunérée cette année, car elle a empoché 18 millions de dollars. Avec 5 millions de dollars supplémentaires, elle aurait pu détrôner Nicolas Batum, le basketeur français, à la dernière place du classement.
L’absence de femme dans ce classement a plusieurs explications. L’ancienne habituée, la tenniswoman chinoise Li Na, a pris sa retraite en 2014, Maria Sharapova, qui a été classée onze années de suite, subie encore les retombées de sa suspension de 15 mois pour dopage. Serena Williams n’a participé à aucun tournois WTA en 14 mois, depuis qu’elle a annoncé sa grossesse en janvier 2017. Le total de ses récompenses s’élève donc à 62 000 $ l’an dernier, contre 8 millions de dollars l’année précédente.
La composition du classement a beaucoup évolué cette année, ce qui a également une influence sur la présence de sportives. Le premier classement du genre de Forbes a été publié en 1990. Les cadors du tennis de l’époque, Steffi Graf (13) et Gabriela Sabatini (21), s’étaient hissées dans le top 30. Quatre femmes y figuraient l’année suivante, Steffi Graffi, Gabriela Sabatini, Monica Seles et Jennifer Capriati.
La méthode d’élaboration des premiers classements faisait la part belle aux sports individuels, avec seulement onze athlètes de sports collectifs en 1990 et neuf en 1991. Ces classements ne comptaient que trente rangs à l’époque.
Historique des femmes dans le classement des sportifs les mieux rémunérés au monde de Forbes :
2018 : aucune
2017 : Serena Williams (51)
2016 : Serena Williams (40), Maria Sharapova (88)
2015 : Maria Sharapova (26), Serena Williams (40)
2014 : Maria Sharapova (34), Li Na (41), Serena Williams (45)
2013 : Maria Sharapova (22), Serena Williams (55), Li Na (85)
2012 : Maria Sharapova (26), Serena Williams (68), Li Na (81)
2011 : Maria Sharapova (29/50)
2010 : Maria Sharapova (25/50)
En 2018, les sportifs pratiquant des sports collectifs représentent 82 % du classement. Les salaires de ce genre de sports ont explosé ces 25 dernières années, car les médias dépensent des milliards de dollars pour obtenir les droits de diffusion des matchs en direct. Le plus haut salaire de la NBA en 1990 était de 3,75 millions de dollars pour Patrick Ewing. Cette année, Stephen Curry a empoché 34,7 millions de dollars chez les Golden State Warriors.
En 2018, 38 joueurs de la ligue majeure de Baseball (MLB) gagneront au moins 20 millions de dollars, selon Spotrac. Le salaire le plus élevé du baseball en 1990 atteignait 3,2 millions de dollars et il avait été versé à Robin Yount.
Le tennis est traditionnellement le sport dans lequel s’illustre les femmes présentes dans le classement de Forbes. Mais le seuil permettant de figurer sur ce dernier ne cesse d’être repoussé, de 16,4 millions il y a cinq ans à 22,9 millions cette année. Un autre point de comparaison : en 1990, le trentième du classement avait gagné 3,8 millions de dollars, contre 35,5 millions cette année.
Les revenus des femmes pratiquant des sports d’équipe à un niveau professionnel ne permettent pas de rivaliser avec ceux des hommes. Prenons l’exemple du basketball. L’accord de diffusion de la WNBA (ligue féminine) avec le groupe ESPN s’élève en moyenne à 25 millions de dollars par an, alors que la NBA gagne 2,5 milliards de dollars, soit cent fois plus, et les salaires reflètent cette différence dans les mêmes proportions.
Le manque de visibilité du sport féminin dans les médias implique que les marques ne vont pas proposer de gros contrats de sponsoring, comme elle le font avec LeBron James, Cristiano Ronaldo ou encore Tom Brady. Même les stars féminines de sports où s’illustrent surtout des hommes, comme Ronda Rousey (MMA) ou Danica Patrick (NASCAR), pourront difficilement apparaître un jour dans le classement. Conor McGregor est le seul sportif pratiquant le MMA à apparaître dans la liste, et aucun pilote de NASCAR ne s’est qualifié cette année.
Serena Williams devrait faire son retour dans le classement l’an prochain, à condition qu’elle retrouve son plus haut niveau et les récompenses qui vont avec. Ses gains de 18 millions de dollars générés par ses nombreux sponsors, notamment Nike, Intel, Audemars Piguet, JPMorgan Chase, Lincol, Gatorade et Beats, sont plus élevés que ceux d’autres stars du tennis telles que Noval Djokovic et Rafael Nadal. Seuls seize athlètes au monde ont gagné plus en sponsoring que Serena Williams au cours de ces douze derniers mois.
Mais à part Serena Williams, qu’elle autre femme pourrait réussir à se hisser sur ce classement ? En matière de revenus, la gagnante de 23 tournois du grand chelem se trouve loin devant ses consœurs. Maria Sharapova, qui a eu 31 ans en avril, a peu de chance de retrouver des gains semblables à ceux qu’elle a pu avoir par le passé. Denica Patrick ne concoure plus à plein temps et Ronda Rousey fait désormais du catch pour la WWE.
Il faudrait plutôt parier sur une femme qui est encore inconnue du grand public, comme une tenniswoman chinoise ou japonaise. Il s’agit de pays où la réussite sportive peut engendrer des contrats de sponsoring considérables, comme cela a été le cas pour Li Na ou encore Kei Nishikori.
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