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Wemanity, L’Entreprise En Avance Sur Son Temps ?

Le monde du travail en 2050 ? Éternel rêveur et serial entrepreneur, Jean-Christophe Conticello est sans aucun doute un des pionniers le plus à même d’en parler. Son entreprise, Wemanity, n’ambitionne rien de moins que de devenir une référence mondiale de la transformation agile.

Wemanity opère d’ores et déjà dans une grosse vingtaine de pays. En seulement quelques années, la compagnie a non seulement réussi à devenir un écosystème d’innovation à elle seule, incubant pas loin d’une vingtaine de start-up, mais a aussi su s’imposer comme partenaire privilégiée auprès de nombreux grands groupes dans la transformation à marche forcée de leur organisation. 

Comment expliquer ce succès insolent ? Il y a certainement une clé à chercher du côté du parcours entrepreneurial riche et hétéroclite du premier concerné.

Après des débuts dans la bourse entre Paris et Wall-Street dans les années 1990, Jean-Christophe Conticello a eu l’opportunité d’explorer de nombreux domaines d’activité, depuis le digital jusqu’à la finance, en passant par la R&D ou encore les énergies renouvelables. C’est fort de cette expérience unique que l’entrepreneur se lance dans le projet Wemanity en 2013. Avec un seul objectif : se positionner en leader de la transformation agile du monde du travail.

Pour y parvenir, Jean-Christophe Conticello s’appuie sur une vision bien trempée, forgée de ces années d’expérience. Son intuition ? L’adaptation n’est plus une option. Alors que l’époque est à la compétition accrue entre les entreprises, s’adapter en temps réel devient non négociable, vital. Frontières sans cesse redéfinies, révolutions en cascade dans le domaine des transports, triomphe des principes du libre-échange, développement d’internet : qui aurait pu imaginer notre quotidien il y a seulement 30 ans ? Et ce n’est qu’un début, notre environnement semble se transformer toujours plus rapidement. Pour survivre, une seule solution : être en mouvement. Le tsunami de redressements judiciaires et de faillites consécutifs à la pandémie de coronavirus confirme son intuition. Nafnaf, la Halle, tout comme des géants de l’aéronautique et de l’automobile sont en train de perdre pied. 

S’adapter d’accord, mais comment ? Pour notre entrepreneur, l’agilité est avant tout à chercher et à cultiver du côté des valeurs et de la culture au sein d’une entreprise. Il s’agit non plus de faire de l’agile mais véritablement d’être agile. 

Dès 2013, Jean-Christophe Conticello mise justement tout sur l’humain et sur la culture d’entreprise pour aller au bout de son ambition. Pour redonner à l’humain sa juste place, il entend organiser les équipes loin des modèles poussiéreux. Organisation des équipes en cercles mettant l’accent sur l’autonomie et le self-management, importance donnée aux qualités et compétences de chacun, culture engageante et esprit de famille : le serial entrepreneur ne s’en cache pas, il faut faire confiance aux équipes et pratiquer de façon itérative le fail fast, test et pivot. Une intuition qui se vérifie aussi sur la question de la formation permanente à laquelle Wemanity est attachée, comme organisation apprenante. Open Wemanity Days, animation de communautés de pratique, séminaires de partages de connaissances, conférences et blogs : la connaissance, au sein des équipes, est chérie et cultivée, dans l’attente d’une récolte prochaine. 

Mais encore faut-il que les outils déployés au quotidien soient adaptés à cette culture. Large autonomie pour les start-up de l’écosystème Wemanity, culture du feedback et de la transparence ou encore nouveaux indicateurs (Objective Key Results ou OKRs) en lieu et place des poussiéreux et innombrables KPIs : pour Jean-Christophe Conticello, tout est bon pour repenser le rapport au travail et parvenir à dépasser les écueils d’hier. Résultat ? Wemanity expérimente, tâtonne, ajuste. Wemanity est devenu son propre laboratoire et se passe du même coup du besoin d’aller chercher l’inspiration chez les voisins. Et sa recette commence à s’imposer comme une réussite. Mais tout ce travail de fond sur les formes et les modalités d’organisation ne serait pas être pas viable sans un état d’esprit approprié, à l’image de son époque. 

Loin d’être gadget, la culture chez Wemanity a une place centrale dans la stratégie de Jean-Christophe Conticello. L’entrepreneur veut y voir une manière de booster les résultats de l’entreprise, notamment en facilitant l’unité et la cohésion des équipes. Mais aussi une manière de consolider une réputation de marque attractive, un des rares moyens d’attirer puis de retenir les jeunes talents. Avec aussi l’idée que le travail n’est pas seulement une corvée, mais au contraire le lieu pour tenter de construire quelque chose de plus grand, au sein duquel une large place est consacrée au partage, au fun ou encore à la coopération. A la clé, une culture d’entreprise résolument humaniste et engageante qui cherche sans cesse à se rapprocher d’un esprit de famille, à revêtir les traits d’une aventure collective. 

On le voit bien, l’approche de Jean-Christophe Conticello est imprégnée à la fois de sociocratie, holacratie, mais aussi de l’esprit des entreprises horizontales, qui libèrent les potentiels. Et sans surprise, sa réflexion et les expérimentations menées au jour le jour chez Wemanity ne font pas l’économie de s’attaquer à l’épineuse question du manager, de son rôle et de son avenir. Loin d’envisager l’abolition du manager ou une horizontalité totale, l’entrepreneur plaide pour une réinvention radicale des responsabilités, de la culture et la philosophie du manager. 

La responsabilité du manager est double. Il doit s’adapter évidemment, mais aussi accompagner et guider les autres sur la même voie. Son rôle ne peut plus se résumer à l’éternel et sempiternel « commande & contrôle ». Au contraire : le besoin d’agilité et d’adaptation des entreprises fait émerger avec lui le besoin d’un nouveau type de manager. Source d’inspiration et d’accompagnement, il devra à la fois guider et comprendre la nouvelle génération. Une redéfinition d’autant plus urgente que les collaborateurs et collaboratrices se retrouvent souvent seuls et mal équipés en premières lignes, pris dans le feu des transformations et des turbulences que connaissent leur entreprise. Sécuriser leur environnement avec l’aide de l’Agile et de nouvelles organisations s’impose comme une urgence. 

Tantôt explorateur, tantôt psychologue, tantôt anthropologue, le manager de demain pourrait voir son rôle considérablement élargi. Il s’agira de plus en plus d’aider les collaborateurs à gérer leur stress, leurs appréhensions, leurs peurs etc. Bref, leurs émotions. On voit bien ici encore quel rôle pourrait avoir le manager de demain. Celui d’un chef d’orchestre, capable d’entraîner ses collaborateurs dans des dynamiques vertueuses, de toujours remettre l’intelligence collective au centre, de construire à partir des forces de chacun. La pyramide hiérarchique habituelle se retrouve sens dessus dessous. Le manager se met désormais au service de ses collaborateurs et non l’inverse. Un rouage dont l’entreprise ne pourra pas faire l’économie. Le manager, une espèce en voie de disparition ? C’est peut-être tout le contraire. Le vieux manager est mort, vive le manager !

On comprend mieux dès lors la révolution qui prend racine au sein de Wemanity. Alors que les vieux colosses pyramidaux et hiérarchiques ne parviennent plus à rattraper leur époque, Jean-Christophe Conticello fait le pari qu’un groupe soudé, cohérent, partageant le même horizon et une hiérarchie réduite à peau de chagrin sera bien plus à même de s’adapter, de rebondir et de grandir. Et cela pourrait être son mantra, celui d’une Management 3.0  et d’une culture de la transformation continue : avoir le courage de pivoter en permanence pour s’adapter à un contexte de changement permanent.

Cette interview, réalisée par Luc Bretones, organisateur de l’événement “The NextGen Enterprise Summit” avec Holaspirit, Maif, Manpower et OCTO Technology, et président de l’Institut G9+, est extraite d’un livre en préparation.

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