Arkady Volozh, l’entrepreneur technologique à l’origine de Yandex, l’équivalent russe de moteurs de recherche comme Google et Yahoo, a vu la valeur de sa participation dans le géant technologique russe chuter de plus de 60% depuis jeudi 24 février.
Le jour où Vladimir Poutine a attaqué l’Ukraine, Arkady Volozh a lui-même perdu plus de 400 millions de dollars, alors que le monde des affaires russe dans son ensemble a été ébranlé par la guerre de Vladimir Poutine et les sanctions imposées par la suite. Selon Forbes, la fortune nette d’Arkady Volozh, qui avait atteint un sommet de 2,6 milliards de dollars, est aujourd’hui de 580 millions de dollars.
Les valeurs technologiques russes, un petit groupe d’entreprises en ligne non visées par les sanctions, ont été particulièrement vulnérables à l’incertitude générale qui règne dans le pays et ont payé un lourd tribut au chaos géopolitique. Lundi dernier, la Bourse de New York et le Nasdaq ont interrompu la cotation de Yandex et d’autres entreprises technologiques, notamment le fabricant de jeux vidéo Nexters (en baisse de 20% en février), la société de recrutement en ligne HeadHunter Group (en baisse de 68% en février), la plateforme de e-commerce Ozon Holdings (en baisse de 46% en février) et la start-up de paiement Qiwi (en baisse de 25% en février).
Codeur et entrepreneur technologique dans la tradition de la Silicon Valley, Arkady Volozh a cofondé plusieurs sociétés informatiques avant de créer Yandex en 1997. Cotée au Nasdaq mais basée à Moscou, Yandex (qui signifie « autre indice ») était la plus grande entreprise technologique de Russie avec une capitalisation boursière de plus de 30 milliards de dollars à son point culminant en novembre de l’année dernière. Aujourd’hui, sa capitalisation boursière n’est que de 6,7 milliards de dollars.
Pendant des années, Yandex a représenté plus pour la Russie que sa valeur en dollars. Populaire auprès des investisseurs internationaux et des utilisateurs russes, Yandex a acquis une part de 60% du marché russe des moteurs de recherche, signe que ses entrepreneurs technologiques pouvaient, au moins parfois, rivaliser avec ses rivaux américains. L’entreprise a également développé une activité de transport de type Uber en croissance rapide.
Sebastian Patulea, vice-président de la recherche sur les actions chez Jefferies à Londres, confirme que rien dans les finances de Yandex ne justifie la vente et que la baisse rapide de la semaine dernière, sans surprise, est due à un nouveau « risque géopolitique » et aux « effets indirects » plus importants des sanctions punitives contre la Russie. L’avenir reste néanmoins très incertain. « La valeur fondamentale de la société va changer, car ses taux de croissance, le coût du capital et le taux de change (la société publiant en roubles mais négociant en dollars) vont tous se détériorer », ajoute-t-il. « Dans un effet de volant d’inertie, le facteur sentiment », le poids général des mauvaises nouvelles en Russie, « pourrait accroître encore le risque de baisse ».
Pour Ildar Davletshin, analyste de recherche senior chez Wood & Co, il y a quatre problèmes majeurs pour Yandex : l’impact de l’effondrement de l’économie locale russe sur le cœur de métier de la publicité numérique et du covoiturage ; les restrictions sur la fourniture d’équipements de haute technologie, notamment les puces ; la chute de la valeur du rouble et une probable pénurie de capitaux pour financer ses projets de croissance comme les voitures à conduite autonome et la technologie du cloud. « L’entreprise n’aura pas assez de capitaux pour financer (ces projets), si la situation géopolitique ne change pas », dit-il. De plus, alors que Yandex lui-même pourrait être exempt de sanctions, ses actionnaires comprennent des entités sanctionnées comme la banque russe VTB, dit Ildar Davletshin.
Ensuite, il y a des inquiétudes concernant l’influence du Kremlin sur Yandex. En 2019, Yandex a accepté une restructuration qui a donné une « action privilégiée » à une Fondation d’intérêt public nouvellement formée, créée pour « défendre les intérêts du pays », a rapporté le Guardian. En septembre de l’année dernière, Yandex a été mêlé à un conflit avec le gouvernement pendant la période précédant les élections à la Douma d’État. La fédération de Russie a mis Yandex dans une situation inconfortable lorsqu’elle a fait valoir avec succès qu’elle était le « propriétaire des droits exclusifs » du terme de recherche « Smart Voting ». Ce terme s’inscrivait dans le cadre des efforts déployés par l’opposition russe, formée autour d’Alexei Navalny, autrefois empoisonné et aujourd’hui emprisonné, pour contester le résultat inévitable des élections en faveur du parti sortant du président Vladimir Poutine.
En septembre dernier, l’éminent critique de Vladimir Poutine et ancien financier de fonds spéculatifs, Bill Browder, avait prédit que les entrepreneurs russes seraient bientôt confrontés à un « affreux marché faustien », déclarant à Forbes que les entreprises technologiques comme Yandex devraient trouver un équilibre entre le fait de « faire des affaires » et celui de « répondre aux exigences d’un dictateur ». Il a ajouté : « Ce n’est tout simplement pas aussi idyllique que dans la Silicon Valley ».
Les milliardaires s’effondrent
Arkady Volozh n’est pas le seul milliardaire à disparaître de la liste Forbes dans les jours qui ont suivi l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Selon le système de suivi des milliardaires en temps réel de Forbes, au moins 10 milliardaires russes sont passés sous le seuil du milliard de dollars en quelques jours de négociation.
Le plus notable d’entre eux, Oleg Tinkov, a vu les actions de la banque numérique Tinkoff (cotée à la Bourse de Londres) perdre plus de 90% depuis le début de l’assaut russe en Ukraine. La fortune d’Oleg Tinkov a diminué de 5 milliards de dollars en moins d’un mois et, mardi, il a officiellement rejoint Arkady Volozh en perdant son statut de milliardaire.
Article traduit de Forbes US – Auteur : David Dawkins
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