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Tesla : Son Génie Et Son Incompétence Résumés Dans Sa Model 3

Tesla Model 3
Salwan Georges/The Washington Post via Getty Images

Le meilleur moyen de se rendre compte à quel point une voiture est géniale, ou au contraire, vraiment nulle, c’est de la démonter, pièce par pièce, afin d’analyser sa conception et son assemblage. Si vous démontez une Model 3 de la marque Tesla, comme l’ont fait les experts en ingénierie de Munro & Associates, vous comprendrez pourquoi Tesla impressionne les autres constructeurs automobiles. Et vous découvrirez également pourquoi ce bleuet de Palo Alto a du mal à produire des voitures rentables.

Ce que Tesla maîtrise réellement, c’est la batterie lithium-ion de sa Model 3 et toutes les pièces électroniques associées. « Nous sommes réellement surpris par l’intégration avancée, ainsi que par les techniques de productions sophistiquées » utilisées par le centre de contrôle électronique, s’exclame Sandy Munro, le DG de Munro & Assosiates, devant des membres de l’Automotive Press Association, mercredi. « C’est là que réside tout le génie de la Model 3 Tesla ».

Sandy Munro a cependant été interloqué par d’autres aspects du véhicule, et plus particulièrement, par son squelette principalement composé d’acier, autrement appelé le châssis-coque, qui a été maladroitement soudé, à l’aide de toutes sortes de techniques de soudure automatisée. Nous comprenons donc mieux le mauvais alignement des différentes parties de la voiture. « S’il y a des problèmes dès le départ, alors c’est normal que le produit fini soit bancal », explique Sandy Munro. De mauvaises finitions, comme des espaces irréguliers entre les pièces de carrosserie ou de mauvais alignements, ce n’est pas juste disgracieux. En effet, ça peut être la cause de grincements ou de couinements, voire d’un sérieux défaut de qualité.

En réalité, ce n’est pas vraiment surprenant que l’on puisse voir à la fois le génie et l’incompétence du constructeur sur un même véhicule. Il ne s’agit ni plus ni moins qu’une entreprise d’édition de logiciels high-tech qui veut maîtriser des procédés de production complexes que les constructeurs automobiles établis ont mis plus d’un siècle à perfectionner.

Sandy Munro, dont la société de conseil vend des études de benchmarking, précise cependant que son analyse est incomplète, et qu’il est donc trop tôt pour tirer des conclusions sur la manière dont la Model 3 rivalise avec les autres voitures électriques qu’il a pu étudier, comme la BMW i3 ou la Chevrolet Bolt. « Tout ce qui se trouve sous le plancher est fascinant. En revanche, tout ce qui est situé au-dessus l’est nettement moins », regrette-il. Mais, selon lui, tout le reste, comme les techniques de production de base, par exemple, peut être amélioré avec les bonnes ressources et un investissement approprié.

Sandy Munro a acheté cette Model 3 début décembre pour 72 000 $ en seconde main, il n’a par ailleurs aucune information sur la date de production de la voiture. Cette voiture n’avait jamais été conduite avant que Sandy Munro n’en prenne possession au mois de janvier, mais « elle a été retenue chez Tesla deux semaines supplémentaires pour un défaut de qualité confidentiel ». Son entreprise a depuis investi dans une seconde Model 3 : « Elle est mieux, mais pas tant que ça ».

Un porte-parole de Tesla a affirmé que la première voiture examinée par Sandy Munro avait été produite en 2017 : « Nous avons considérablement affiné nos techniques depuis cette époque. Et, bien qu’il nous reste une certaine marge de progression, l’analyse de nos données montre que la qualité de la Model 3 s’améliore rapidement ».

Par exemple, Tesla affirme que les écarts entre les pièces de carrosserie de la Model 3 se sont réduits de près de 40 %, avec des progrès visibles surtout au niveau du coffre, des blocs optiques et des ailes arrière. « Aujourd’hui, les écarts des pièces sont similaires à ceux que l’on peut retrouver sur les modèles de marques comme BMW, Audi ou Mercedes. Mais dans un soucis d’amélioration constante, nous travaillons à les réduire davantage ».

Elon Musk, le PDG de Tesla, se targue que la conception de la Model 3 a justement été étudiée pour faciliter l’assemblage, grâce à un moins grand nombre de pièces. Et Sandy Munro et son équipe ont trouvé quelques preuves de ces aménagements. La pédale d’accélérateur, par exemple, est placée dans son logement avec une languette et une fente, puis est maintenue en place par une simple vis, là où traditionnellement on en trouve trois. Le châssis en aluminium, qui supporte entre autre le tableau de bord, présente des pièces en plastique qui sont surmoulées grâce une technique de moulage par injection, au lien d’être d’abord moulées puis fixées.

Certains composants paraissent avoir été fabriqués de manière très artisanale, ils laissent même les experts pantois quant à leur réelle utilité. Un poids d’amortissement, par exemple, était fixé au bras de suspension à l’aide de colle et des colliers de serrage. Cela dit, les ingénieurs ont reconnu que la Model 3 était solide avant qu’ils ne la démontent, ce qui laisse penser que Tesla a bien réfléchi à la conception de ses suspensions.

Le plus perturbant, selon Sandy Munro et son équipe, c’est la construction de la carrosserie de la voiture. « Cette voiture a le plus gros châssis-coque qu’on n’a jamais vu », détaille Sandy Munro, avant d’ajouter qu’il est « ridicule », tout en montrant les endroits précis où Tesla aurait pu l’alléger. « C’est du poids inutile en plus ».

Il a été également confus devant les différentes techniques de soudure utilisées les unes à côté des autres. « Je ne comprends pas. Ils ont utilisé beaucoup de technologies, mais nous n’arrivons pas à comprendre pourquoi ils ont utilisé ces technologies-là ».

L’équipe d’experts a également trouvé d’autres signes de gaspillage : les passages de roues sont composés de neuf différentes pièces de métal au lieu d’une seule, comme sur la plupart des véhicules. Et comme ils sont symétriquement opposés, davantage d’outillage est nécessaire, ce qui a pour effet d’augmenter les coûts de production.

Un porte-parole de Tesla a reconnu que la marque disposait d’une marge de progression confortable quant à la masse et à la complexité de la voiture, avant d’ajouter que la Model 3 avait avant tout été conçue pour la sécurité, en rappelant que les voitures électriques doivent obéir à des règles de sécurité bien précises, afin de conserver l’intégrité de la batterie.

Cela ne fait aucun doute que les concurrents de Tesla vont lire attentivement l’étude de benchmarking de Sandy Munro à 87 000 $ sur les débuts de la production de la Model 3. Mais sachant qu’Elon Musk veut à tout prix atteindre une production hebdomadaire de 5 000 véhicules avant la fin juin, Sandy Munro ferait bien d’acheter une nouvelle Model 3 pour voir si la qualité des véhicules va s’améliorer (ou empirer).

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