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Super Ligue : les clubs de Premier League quittent le navire

Super Ligue
Deux après son lancement, la Super Ligue connaît déjà un énorme revers. Les six clubs de Premier League engagés dans le projet se retirent. | Source : Getty Images

Roman Abramovich (Chelsea) est le premier propriétaire d’un club fondateur de la Super Ligue à engager des démarches pour retirer son club de ce projet controversé. En l’espace de cinq heures et après un tollé au niveau européen de la part des supporters, des politiciens, des experts et des joueurs, la décision de Chelsea a été suivie par les cinq autres clubs de Premier League impliqués dans le projet de Super Ligue.

 

Carton rouge pour la Super Ligue

Après une journée chaotique pour le football européen, mardi 20 avril à 18 h 50 (GMT), une source proche du milliardaire propriétaire de Chelsea a confirmé à Forbes que Roman Abramovich et les autres dirigeants du club se préparaient à quitter le projet de Super Ligue.

La colère du public couvait depuis dimanche, lorsque Arsenal, Chelsea, Liverpool, Manchester City, Manchester United et Tottenham ont rejoint l’AC Milan, l’Inter Milan, la Juventus, l’Atlético Madrid, le FC Barcelone et le Real Madrid au sein du projet de Super Ligue, une nouvelle compétition européenne de clubs pour concurrencer la Ligue des champions organisée par l’UEFA.

Les supporters anglais n’ont pas apprécié cette nouvelle et ont manifesté leur colère devant les stades et sur les réseaux sociaux. Les dirigeants des Blues ont été les premiers à céder face à ce tollé, entraînant avec eux les autres clubs anglais impliqués dans le projet de Super Ligue. La fin de la participation des clubs de Premier League à la nouvelle compétition européenne met fin au projet, deux jours seulement après son annonce. Une source au sein du club londonien a déclaré à Forbes que « le club se prépare à se retirer. L’engagement de Roman au sein du club n’a jamais été une question d’argent, il a toujours été question de la communauté et des fans. Ce n’est pas ce que nous voulons. » Cette même source a ajouté que « les problèmes avec la Ligue des champions et l’UEFA demeurent… mais nous nous préparons à nous retirer [du projet de Super Ligue] après avoir écouté la communauté. » Des centaines de supporters se sont rassemblés hier devant le stade de Stamford Bridge, en marge de la rencontre de Premier League opposant Chelsea à Brighton, pour protester contre la Super Ligue.

Le milliardaire Roman Abramovich possède des parts dans Evraz (société sidérurgique russe), Norilsk Nickel (société russe spécialisée dans l’exploitation et la transformation du nickel et du palladium) et Chelsea. Sa valeur nette est estimée à 14,8 milliards de dollars. Roman Abramovich a acheté le club londonien en 2003, pour 190 millions de dollars. Forbes estime la valeur de Chelsea à 3,2 milliards de dollars, ce qui en fait le 7e club le plus riche d’Europe. Ce mercredi matin, les Blues ont confirmé leur retrait du projet de Super Ligue.

Après la décision de Roman Abramovich de quitter la Super Ligue, Manchester City n’a pas tardé à faire de même et a confirmé sa volonté de se retirer du projet sur son compte Twitter. À 23 h 15 (GMT) mardi, les autres équipes de Premier League (Arsenal, Liverpool, Manchester United et Tottenham) ont entamé les démarches pour quitter le projet de Super Ligue, selon les déclarations respectives des clubs.

En Espagne, les informations diffusées sur les réseaux sociaux selon lesquelles le FC Barcelone et l’Atlético Madrid seraient prêts à suivre le mouvement n’ont pas encore été confirmées par les clubs, contactés par Forbes.

Le président de l’UEFA, Aleksander Ceferin, a déclaré à Sky Sport : « Je suis ravi d’accueillir à nouveau Manchester City dans la famille du football européen. Ils ont fait preuve d’une grande intelligence en écoutant les nombreuses voix, notamment leurs fans, qui ont souligné les avantages vitaux du système actuel pour l’ensemble du football européen, de la finale de la Ligue des champions à la première séance d’entraînement d’un jeune joueur dans un club amateur ».

Si les déclarations des clubs, qui avaient tous dépensé du temps et de l’argent pour préparer cette nouvelle compétition lucrative, ont été formelles, Arsenal a admis avoir commis une erreur. « Ces derniers jours, après avoir écouté vos réactions et celles de l’ensemble de la communauté du football, nous nous retirons du projet de Super Ligue. Nous avons fait une erreur, et nous vous présentons nos excuses », a déclaré le club sur son compte Twitter.

Une semaine mouvementée sur la planète football

Dans ce qui a été l’une des semaines les plus controversées de l’histoire du football européen, la perspective d’une compétition comportant une sélection arbitraire d’équipes dites « d’élite » a suscité de nombreuses critiques de la part des professionnels, des experts, des administrateurs et des supporters.

Sans système de qualification ni de relégation, la Super Ligue était considérée comme non compétitive et créée par les propriétaires des clubs pour s’assurer un flux de recettes plus important et continu, tout en éliminant le risque de non-qualification, et potentiellement de relégation.

L’entraîneur des Citizens, Pep Guardiola, a déclaré à la presse mardi : « Ce n’est plus du sport quand la relation entre l’effort et la récompense n’existe pas. Ce n’est plus du sport si la défaite n’a plus d’importance ». Ces propos font écho à ceux de Jürgen Klopp, l’entraîneur de Liverpool.

Les joueurs se sont également exprimés. La star de Manchester City, Kevin De Bruyne, a publié un message sincère à ses fans sur Twitter. Son coéquipier Raheem Sterling a été plus direct.

« Ce gars vient d’une petite ville en Belgique, rêvant de jouer au plus haut niveau. J’ai évolué dans le championnat belge, allemand et anglais. Et j’ai aussi fièrement représenté mon pays. J’ai travaillé et affronté de nombreux adversaires pour remporter des trophées. Mais le mot le plus important est la COMPÉTITION. Avec tous les événements qui se sont produits au cours des derniers jours, il est peut-être temps de se rassembler tous ensemble et de trouver une solution. Nous savons que c’est un gros business et je sais que j’en fait partie. Mais je reste toujours un petit garçon qui aime juste jouer au football. Il n’est pas question d’une entité en particulier ici, mais du football dans le monde entier. Inspirons la prochaine génération de footballeurs et laissons les fans rêver. »

 

L’argent derrière la folie

Dimanche 18 avril, 12 des meilleurs clubs de football européens ont annoncé qu’ils créaient une nouvelle compétition visant à concurrencer la Ligue des champions, la Super Ligue.

L’absence des plus grandes équipes dans une compétition reconnue par l’UEFA représentait une menace existentielle pour les associations de football du Vieux Continent et une attaque directe contre l’UEFA. Cette dernière a tiré 51 % de ses revenus (2,37 milliards de dollars) des droits TV de la Ligue des champions lors de la saison 2018-2019. Le projet sécessionniste devait être financé au départ par la banque américaine JP Morgan, à hauteur de 4 milliards de dollars. Les clubs se seraient vus promettre par JP Morgan un bonus d’environ 350 millions de dollars chacun, une somme qui dépasse de loin les recettes actuelles garanties par les compétitions européennes.

« La décision de Chelsea et de Manchester City est, si elle se confirme, absolument une bonne nouvelle et je les félicite. J’espère que les autres clubs impliqués dans la Super Ligue suivront l’exemple. »

Les membres fondateurs de la Super Ligue font partie des clubs de football à plus forte valeur. En effet, la valeur totale de ces clubs s’élève à 37,2 milliards de dollars selon le dernier classement Forbes des clubs de football à plus forte valeur.

Kenneth Cortsen, économiste du sport à la University College of Northern Denmark, estime que cet épisode est la preuve d’une lutte de pouvoir au cœur du football européen qui se joue désormais dans les médias : « L’enjeu est de taille pour la FIFA, l’UEFA et les fédérations nationales… [Les clubs] savent que les grands clubs ont un grand pouvoir de négociation et un grand pouvoir d’attraction sur les consommateurs, car ils ont les meilleurs joueurs. Ce qui est en jeu ici, c’est l’intégrité, l’identité et l’âme du football, mais également les ressources importantes en matière de revenus que l’UEFA voudrait protéger ».

 

Article traduit de Forbes US – Auteur : David Dawkins

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