Le statut de junior entrepreneur, permettant de faciliter la création de micro-entreprise pour les jeunes, a été voté par le Sénat. Cette proposition de loi est défendue par le président du Mouvement des étudiants micro-entrepreneurs, Etienne Mercier, dans un contexte de grandes difficultés financières pour les étudiants.
Forbes France : En quoi consisterait ce statut ?
Etienne Mercier : Ce statut répond parfaitement aux attentes de nos jeunes adhérents. Le statut du « junior entrepreneur » combine un certain nombre d’avantages, et vise notamment à : simplifier la procédure d’immatriculation, souvent rédhibitoire pour les jeunes désirant travailler à la mission ; conserver un taux global de cotisation faible pour les jeunes, tout en fixant un plafond de chiffre d’affaires bas (12.000 euros). La proposition de loi renforce également les obligations d’information du Gouvernement, pour permettre un accompagnement à chaque étape des juniors entrepreneurs.
Selon vous, c’est donc une bonne idée ?
Absolument. Quand Hervé Novelli créait en 2007 l’autoentreprise, il souhaitait dissocier l’activité professionnelle d’une activité complémentaire, c’est-à-dire pour compléter son revenu. La plupart des jeunes autoentrepreneurs travaillent en parallèle de leurs études, souvent d’ailleurs en partie pour les financer. Proposer un taux de cotisation fixe à 5%, conjugué à un abaissement du plafond du chiffre d’affaires à 12.000 euros (autrement dit, 1.000 euros par mois) correspond parfaitement à la réalité de ce que vivent nos adhérents. Il nous semble logique d’appliquer un taux de cotisation différencié entre un travailleur utilisant ce statut à titre principal, et un jeune qui bien souvent travaille parce qu’il n’a pas le choix.
N’est-ce pas une manière de précariser davantage l’emploi étudiant ? Comme le freelancing le fait déjà avec de nombreux emplois comme les coursiers à vélo ?
C’est exactement l’inverse. Les jeunes utilisateurs de ce statut cherchent de la flexibilité, que beaucoup de contrats n’apportent pas. Bien souvent, ce statut rapporte d’ailleurs plus à l’heure qu’un emploi dît « non précaire ». Aujourd’hui, un jeune peut déjà travailler en tant qu’autoentrepreneur, là-dessus la proposition ne revient pas. Ce qu’elle propose, c’est un dispositif adapté pour permettre à des jeunes, qui je le répète n’utilisent que très peu ce statut pour lancer un business mais simplement pour se faire un peu d’argent en parallèle de leurs études, tout en étant peu chargés.
Les cotisations sont en effet à la charge des étudiants, et leur taux est très faible : n’est ce pas surtout un avantage pour les employeurs ?
Prenez une école de commerce, dont les prix dépassent aujourd’hui souvent les 10.000 euros. Comment font ces milliers de jeunes qui doivent travailler pour payer leurs frais de scolarité ? Les charger à plus de 20%, ce n’est pas leur facilité la tâche. Instaurer un taux fixe pour ces entrepreneurs qui dépassent rarement 10.000 euros de chiffres d’affaires par an, c’est leur permettre de vivre du fruit de leur travail.
Dans une économie de relance, savoir si ce dispositif avantagerait l’employeur ou le travailleur n’a pas grand sens. Prenez des restaurateurs, qui sont aujourd’hui en grande souffrance, si au moment de la réouverture des restaurants leur fond de trésorerie ne leur permet pas d’embaucher quelqu’un en contractuel, ils se tourneront vers des travailleurs à la mission. Si tout le monde pouvait travailler en CDI, ça se saurait. Sachant que ça n’est pas le cas, la question est de savoir si ce statut répond à une réalité économique. C’était déjà le cas avant la crise covid, ça l’est encore plus aujourd’hui dans un écosystème en reconstruction.
Par ailleurs, précisons que cette proposition de loi encadre une expérimentation de ce statut (sur tris ans, ndlr).. Le gouvernement a apporté un certain nombre de propositions pour les jeunes, mais a très peu évoqué les indépendants. Laissons une chance à cette proposition de compléter le dispositif de relance, et faisons le point après l’expérimentation pour voir si ce dispositif aura été utile.
Pour certains emplois, comme celui de baby-sitter par exemple, vous imaginez que cela les légaliserait ? mais vous pensez vraiment que l’étudiant qui fait du babysitting va sortir une facture aux parents qui sont « ses clients » ?
La proposition d’immatriculer tous les jeunes automatiquement est très intéressante. Elle n’oblige en aucun cas les jeunes à travailler puisque la proposition de loi les affilie au régime micro social, le même que les auto-entrepreneurs. Autrement dit : pas de chiffre d’affaires, égale à pas de cotisation à payer. En revanche, s’ils veulent travailler, ils peuvent le faire plus simplement avec un identifiant unique. Dans l’expérimentation proposée, on peut tout à fait imaginer un accompagnement à 100% numérique de ces entrepreneurs, avec un générateur de facture en ligne pour simplifier encore davantage les obligations administratives.
Aujourd’hui, beaucoup des petits boulots sont réalisés sans déclaration. La simplicité de ce statut pourrait motiver certains jeunes à déclarer leurs revenus, et à commencer donc à cotiser plus jeune. Ça ne sera pas une majorité, mais on prédisait aussi en 2007 que les jeunes seraient peu tentés par l’auto-entreprise, qu’ils privilégient ces dernières années massivement.
Le Memup défend le statut de micro-entrepreneur qui permet aux jeunes de travailler facilement, rapidement et de façon sécurisée en parallèle de leurs études. Nos propositions visent à proposer des améliorations concrètes pour le statut existant ou de créer des propositions innovantes pour l’emploi des jeunes. Je crois que pour l’emploi des jeunes, il n’y a pas de solution miracle et que tous les moyens sont bons pour faciliter l’accès au marché du travail à notre génération.
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