Tribune réalisée par Alain Conrard, Directeur Général de Prodware.
Si les start-up françaises ont le vent en poupe, leur degré de maturité digitale peut rapidement enrayer leur perspective de croissance. Pour fluidifier les rouages de leur avenir, celles-ci peuvent faire confiance aux ETI, capables de leur donner les capacités d’une transformation technologique, culturelle et économique. Pourquoi ? Eléments de réponse.
L’entrepreneuriat, une passion française.
« Entrepreneur is a french word » c’est en ces termes que le Président Emmanuel Macron a rappelé, il y a quelques jours devant les médias danois, l’une des spécificités de l’économie française. A l’instar du Président, EY en partenariat avec la chaire entreprenariat de l’ESCP*, va plus loin, la France est en sureffectif d’entrepreneurs !
Depuis la fin des années 90, un virage radical s’est en effet opéré. L’écosystème entrepreneurial français s’est tant enrichi qu’aujourd’hui la France est le champion occidental de la création d’entreprises. En 2016, par exemple, 1517 entreprises ont été créées chaque jour en France. De mon côté, j’ai fait le constat que de plus en plus de jeunes aspirent à créer leur start-up plutôt que d’embrasser une carrière dans de grands groupes comme c’était souvent le cas il y a 20 ans. Parallèlement, l’État accompagne cette volonté au niveau politique. Conséquence : les start-up tricolores ont effectué des levées de fonds atteignant des sommets l’an passé. La French Tech a même vu ses start-up passer la barre des 3 milliards de dollars de financement**.
Alors, après celui du 15 juillet, une autre occasion de faire résonner un cocorico ? Pas si vite…
Des entrepreneurs qui manquent d’ambition ?
Malgré l’attractivité de la French Tech, la France reste largement derrière la Grande-Bretagne, au coude à coude avec l’Allemagne au niveau des montants levés. Et si l’on prend en compte uniquement les licornes, ces start-up valorisées à plus d’un milliard d’euros, la France, avec 3 licornes, est là aussi à la traîne. Si l’on en croit l’étude EY, ce classement pourrait s’expliquer par un certain manque d’ambitions.
L’urgence est notamment que les entrepreneurs français acquièrent les compétences nécessaires à la création d’entreprises à forte croissance génératrice d’emplois. Bien souvent, les start-up ont des difficultés à surmonter la période dénommée « vallée de la mort ».
Selon une étude d’In Extenso Innovation Croissance***, elles périclitent bien souvent au moment (entre 1 et 3 ans d’existence) où elles ne dégagent toujours pas de bénéfices alors qu’elles ont besoin de cash supplémentaire pour financer leur croissance ou dénicher de nouveaux marchés.
La death valley : pas une fatalité
Pour lutter contre cette mortalité infantile, il faut avoir les reins solides. Pas de panique, des solutions existent.
Notamment, s’appuyer sur une entreprise plus importante qui permettra, par exemple, d’éviter l’écueil du manque de trésorerie. De leur côté, les start-up apportent leur agilité, leur souplesse et un « grain de folie » dans des groupes encore parfois en proie au manque de dynamisme, du fait de leur taille et de leurs process internes. Une collaboration «win-win», donc, et la plupart des grands groupes l’ont bien compris. La preuve ? 23 des 25 grands groupes français faisant partie du Forbes Global 500 ont mis en place des programmes, souvent internationaux, s’adressant aux start-up.
Pourtant, il existe un risque pour les start-up : être noyé dans un flot de projets accéléré par les besoins des grands groupes.
ETI et start-up : de l’importance de la destination pour une alliance réussie
Voilà sans doute pourquoi un nouveau type de collaboration est en train de voir le jour. Celui entre les start-up et les ETI. Les Entreprises de Taille Intermédiaire, qui emploient près de 3 millions de salariés et pèsent 27,6% du chiffre d’affaires national, sont, selon moi, le partenaire idéal des start-up. Je ne suis d’ailleurs pas le seul à le penser. Myriam Beque, Directrice du Développement de l’Innovation de BNP Paribas****, rejoint mon avis : « Les ETI bénéficient de l’agilité et de l’ingéniosité des start-up, tandis que ces dernières profitent du réseau et des expertises de leurs parrains. Une véritable accélération de leurs business et une relation gagnante pour tous ! ».
Alors comment faire ? Avant d’initier un partenariat avec une start-up ou inversement avec une ETI, il faut d’abord choisir un cap : développer votre notoriété, renforcer votre relation clients, augmenter votre chiffre d’affaires ou encore votre profitabilité sont autant de destinations à cartographier.
Pour éviter la sortie de route, certains territoires sont obligatoires. Ils balisent l’itinéraire vers une plus grande maturité digitale. C’est ici que les ETI peuvent intervenir, en proposant aux start-up leurs expertises et les enseignements de leur expérience, pour leur faire acquérir une capacité de transformation totale se dépliant sur les terres de la technologie, de la culture d’entreprise et du modèle économique.
Nous sommes encore loin d’avoir saisi le potentiel d’une alliance consolidée entre ETI et start-up. Ne perdons plus de temps. Agissons !
Par Alain Conrard, Directeur Général de PRODWARE et responsable de la commission Innovation au sein du Club ETI Paris Ile-de-France.
* https://www.ey.com/fr/fr/newsroom/ey-25e-edition-du-prix-de-l-entrepreneur-de-l-annee
** https://www.anaxago.com/actualites/article/2017-une-annee-record-pour-les-levees-de-fonds-en-france
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