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Rolls Royce Et Pratt & Whitney : Des Moteurs Défaillants

Rolls Royce
Getty Images

Alors que les compagnies aériennes se préparent pour une saison estivale chargée, quelques départs en vacances pourraient être retardés à cause de la défaillance de certains moteurs Rolls Royce équipant les Boeing 787 Dreamliner.

La défaillance des lames de compresseur sur deux modèles du moteur Trent 1000 de Rolls Royce ont forcé des compagnies aériennes à annuler des vols et à louer des avions de remplacement. En effet, certains des 787 en circulation sont cloués au sol en attente d’une inspection ou d’une réparation. De plus, la FAA (Federal Aviation Administration) a dû restreindre la trajectoire de vol des avions équipés de ces moteurs à un rayon de soixante minutes d’un aéroport où ils pourront effectuer un atterrissage d’urgence si nécessaire, ce qui dans certains cas peut augmenter la distance parcourue et donc la durée d’un vol.

Roll Royce n’est pas l’unique constructeur de réacteurs à rencontrer des problèmes. Pratt & Whitney, une filiale de United Technologies, doit faire face à une série de problèmes de fabrication ou de soucis techniques avec son moteur turbopropulseur innovant, la faute à un joint défectueux. Ce dernier a même conduit les autorités indiennes à clouer tous les A320neo du pays au sol en mars dernier, en attendant une réparation. L’autre moteur qui équipe certains modèles de l’A320neo, le CFM LEAP, a été handicapé par une peinture friable sur l’enveloppe de la turbine et un disque de la turbine qui a dû être remplacé dans certains cas. À la fois P&W et CFM, le dernier étant une entreprise commune à General Electric et Safran, ont pris du retard, cette année, dans la livraison de moteurs à Airbus, bien que les deux entreprises aient affirmé pouvoir atteindre leurs objectifs annuels respectifs.

Devons-nous nous alarmer de la recrudescence de problèmes rencontrés par la dernière génération de moteurs ?

Les problèmes sont monnaie courante dès la fabrication des moteurs et peu importe le nombre de tests pratiqués sur ces machines, certains types de problèmes ne feront surface qu’après des années de service. Mais la coïncidence entre l’arrivée récente de nouveaux moteurs et l’accroissement du volume de production d’avions rend ce genre de défauts plus prégnant, explique Jayant Sabnis, professeur en aéronautique et astronautique au MIT et anciennement ingénieur pour Pratt & Whitney.

En 1996, Boeing et Airbus ont livré près de 400 appareils en tout. L’an dernier, ils en comptaient 1 480 et ils devraient en livrer près de 1 700 cette année, ce qui reflète la demande croissante des marchés émergeants.

Airbus produit 60 A320 par mois, explique Jayant Sabnis. En 1988, lors du lancement de la première version de l’appareil, il aurait fallu « cinq ans pour construire autant d’appareils qu’il en sera produit dans les dix à douze mois à venir ». La cadence élevée de la production a déjà mis en avant le temps dont les chaînes logistiques ont besoin pour résoudre les problèmes, explique Jayant Sabnis. « Il y a des avions qui sont au sol, à attendre des pièces. Ça fait les gros titres, et les gens se demandent  » Que se passe-t-il ? Ils ne savent pas comment on fait des moteurs ?  » Mais ce n’est pas le cas ».

En ce qui concerne le Trent 1000, Rolls Royce a dû le développer à toute vitesse car Boeing voulait commercialiser son 787 le plus vite possible, explique Sandy Morris, un analyste spécialisé dans l’aérospatial pour la banque d’investissement Jefferies. La sortie de l’avion de ligne a fini par être retardée à cause d’une production désordonnée : « Cela a probablement induit quelques décisions expéditives, y compris l’utilisation de technologies anciennes ».

La version originale du Trent 1000 a été conçue pour fournir presque 32 tonnes de poussée. Mais elle a été modifiée afin de fournir quasiment deux tonnes supplémentaires pour le 787-9, qui est légèrement plus lourd. Les 383 exemplaires de ce modèle, surnommé Package C, sont au cœur du problème pour Rolls Royce, certains ont même des lames de compresseurs qui se sont endommagées à la longue : « La poussée par à-coup a rarement été une bonne idée ».

Rolls Royce a déclaré un peu plus tôt cette semaine que des problèmes similaires avaient été détectés sur des moteurs Package B qui avaient été modifiés pour augmenter le rendement énergétique de la version d’origine. L’entreprise pense débourser près de 580 millions de livres (662 millions d’euros) au cours de deux prochaines années pour rectifier les moteurs Trent.

Sandy Morris dit également qu’Airbus et Rolls Royce ont pris en compte l’expérience du 787 pour développer le Trent XWB pour l’A350 qui a bénéficié d’une phase de développement relativement plus courte, sept ans, par rapport aux cinq ans de Boeing pour le Dreamliner. Il est conçu pour fournir une poussée de quarante tonnes.

Le PDG de Rolls Royce, Warren East, a affirmé vendredi, lors d’une réunion avec des investisseurs, qu’il n’y aurait pas de problème d’usure des lames de compresseur sur le XWB ou le Trent 1000 qui devraient entrer en service vers la fin du troisième trimestre sur l’A330neo.

Jayant Sabnis, qui a aidé à la conception du moteur GTF de Pratt & Whitney, remarque qu’aucun des problèmes rencontrés jusqu’à maintenant n’est dû à son architecture. L’entreprise a dépensé dix milliards de dollars sur vingt ans pour un pari risqué : concevoir une boîte de réduction pour permettre au ventilateur du réacteur de tourner moins vite que le compresseur et la turbine. Les lames peuvent donc être plus longues, davantage d’air contournera ainsi le cœur du moteur, engendrant une économie de carburant de 16 %, selon l’entreprise et une réduction du bruit de 75 %.

Pratt & Whitney compte de nombreuses commandes pour le GTF, bien que les problèmes qu’il a pu rencontrer aient conduit certains acheteurs d’A320neo à s’orienter vers le CFM LEAP. Pratt & Whitney a produit environ 300 réacteurs en 2013 et devrait livrer 2 500 GTF au cours des trois prochaines années.

Étant donné la forte croissance de la production, Sandy Morris pense qu’il faut se préparer à rencontrer plus de problèmes sur les moteurs en service au cours de cinq ou dix prochaines années, ainsi que sur d’autres éléments ou systèmes équipant les appareils. Mais Sandy Morris est rassuré que ces problèmes soient survenus tôt après la mise en service, ce qui a permis de les rectifier rapidement : « Rencontrer ces problèmes sur 476 moteurs, c’est une chose, mais sur 1 500 réacteurs, c’en est une autre ».

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