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Remontée des taux : les banques centrales en ligne de mire pour contenir l’inflation

En voulant freiner l’inflation par l’augmentation des taux d’intérêt, les banques centrales ne risquent-elles pas de déclencher une vague de récession ? Éléments de réponse avec Éric-Olivier Lewin, spécialiste des marchés financiers et rédacteur en chef des publications Agora.

Plusieurs évènements successifs expliquent la situation inflationniste dans laquelle nous nous trouvons actuellement. Pouvez-vous les résumer ?

Éric Lewin : Le premier choc remonte à la sortie de la pandémie, avec la prise de conscience par les marchés de l’état de désorganisation de la chaîne de production mondiale. Le second date de février dernier, avec le début du conflit entre la Russie et l’Ukraine, qui a touché de plein fouet les équilibres pétroliers et alimentaires. Le troisième pourrait venir du monde salarial. A titre d’exemple, les États-Unis sont revenus à leur niveau pré-COVID, et cette tension sur le marché de l’emploi contraint les entreprises à augmenter les salaires.

Bénéfique à première vue pour les salariés, cette hausse pourrait s’avérer moins avantageuse que prévue…

Éric Lewin : Effectivement. Toute la question qui se pose actuellement est de savoir si les entreprises vont pouvoir répercuter sur leurs clients à la fois la hausse de salaire et la hausse des prix sur les matières premières. Une double peine en réalité.

Pour contraindre l’inflation, la BCE et la FED vont annoncer des hausses de taux. Est-ce une bonne mesure ?

Éric Lewin : Attendue ce jeudi, la réunion de la BCE devrait donner lieu à une augmentation des taux directeurs de 25 points de base. Quant à la FED, l’annonce devrait porter sur un passage à 75 points de base. L’objectif recherché est clair : si les crédits sont plus chers, alors des pans entiers de l’économie vont avoir du mal à se financer, ce qui aura pour effet de ralentir mécaniquement l’économie sous 3 à 6 mois.

Selon vous, le pic inflationniste a été récemment atteint. Sur quels éléments vous basez-vous ?

Éric Lewin : D’une part, sur l’indice FAO des prix des produits alimentaires, qui est en recul sur les trois derniers mois, et d’autre part, sur la stagnation du salaire moyen sur le marché américain, qui jusqu’alors augmentait de 5% par an. Ces deux critères sont en faveur d’un ralentissement de l’inflation. Par ailleurs, juillet est la période phare de publication des résultats d’entreprise, aux États-Unis comme en Europe. Si on regarde les valeurs de la Tech, comme celles du luxe, on observe une baisse de 20 à 25% de leur valorisation depuis le début de l’année, preuve que le marché a déjà anticipé ce contexte récessionniste. C’est le cas avec Goldman Sachs, qui a publié des résultats en baisse de 48%, et dont le cours continue à monter à +4%..

Dans quel cas peut-on parler de récession et quels en seraient les conséquences ?

Éric Lewin : Pour qu’il y ait récession, il faut techniquement 2 trimestres consécutifs de baisse de la croissance. Mais plus que ce critère, c’est le contexte global qu’il faut observer. Dans les années 80, on avait 10 à 12% de chômage, là on est à 3%, donc cela n’a rien à voir. En réalité, les marchés se situent plus dans une phase de réajustement profond que dans celle d’une véritable récession.

 

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