Tout le monde a déjà utilisé ce service au moins une fois dans sa vie. Relais colis est le 1er réseau de livraison en points relais et à domicile avec 5600 points relais colis partout en France et en Belgique. L’entreprise française fête ses 50 ans. Entretien avec son directeur général, Jean-Sébastien Leridon.
Relais Colis fête ses 50 ans cette année. Véritable success story française, Relais Colis est une formidable aventure entrepreneuriale. Créateur du concept de Relais Colis dans les années 80 pour apporter une alternative de livraison à La Redoute lors des grèves nationales, Relais Colis est aujourd’hui une PME indépendante qui a su se réinventer à chaque étape marquante du secteur du e-commerce. En 50 ans, l’envoi de colis a tout simplement été révolutionné, depuis la commande via son catalogue papier à la commande sur internet le soir pour une livraison dès le lendemain. Forbes France s’est entretenu avec Jean-Sébastien Leridon, son directeur général.
Forbes France : Rappelez-nous la naissance de Relais Colis. Après tout c’est un service que tout le monde connaît, mais on n’en sait peu sur l’histoire de l’entreprise…
Jean-Sébastien Léridon : Jusqu’en 2009, Relais Colis travaillait exclusivement avec la Redoute. Lorsqu’il y a eu les grandes grèves de la poste dans les années 70, la Redoute, qui était une grande entreprise de vente par correspondance a, pour survivre, décidé d’internaliser une grande partie de son transport. Parce que, évidemment quand vous êtes une société de vente par correspondance et que vous ne pouvez ni livrer votre catalogue, ni les marchandises, ça ne fonctionne pas. Puis en 2009, quand François-Henri Pinault a décidé de recentrer les activité de Kering sur le luxe, ils ont identifié tous les actifs, nous ont sortis du giron de la Redoute pour assurer la pérennité de l’entreprise qui allait être cédée. Chacun devait alors construire sa solidité et son indépendance. Et c’est pour ça que j’ai intégré Relais Colis en 2010, pour convaincre les grands acteurs du e-commerce de nous confier leurs flux de marchandises.
Comment choisissez-vous vos partenaires relais ?
Il y a d’abord l’emplacement, l’amplitude de ses horaires et sa capacité de stockage, ainsi que la propriété du lieu par exemple. Mais surtout, lui nous choisit parce qu’on lui apporte du trafic. En général, entre 20 et 30 clients par jour qui vont acheter dans 25% des cas. Ce qui est énorme. Le taux de conversion moyen dans la presse est même encore plus élevé. Chez un opticien, il sera moindre, mais ce sera compensé par la valeur. Tout le monde a à y gagner.
Vous êtes chez Relais Colis depuis neuf ans. Vouas avez vu le basculement entre la vente par correspondance et l’explosion du e-commerce. Comment s’est exprimé ce basculement chez Relais Colis ?
Au global sur la période, on a eu des volumes croissants entre 10 et 15% par an, essentiellement porté par les géants d’Internet. On a eu également des flux de plus en plus denses à gérer sur des périodes de plus en plus courtes. Par exemple avec le Black Friday, ont des a pics de volume énormes. Autre tendance : les clients veulent être livrés plus vite. Les standards étaient plutôt de 48h en relais, quand je suis arrivé. Maintenant, c’est le lendemain voire le jour même dans certains cas.
Il y a aussi un modèle qui évolue. Au début de l’indépendance de Relais Colis, nous travaillions principalement encore avec des acteurs de la VPC (vente par correspondance, ndlr), ensuite avec tout un tas de pure players dont beaucoup ont disparu ou ont été repris par des retailers, et ensuite les gros acteurs comme Amazon. Les particuliers aussi font désormais eux-mêmes beaucoup d’envois de colis. Nous avons dû également composer avec l’essor des places de marchés en ligne, avec désormais des milliers de petits clients.
Tout cela nous a obligés à industrialiser nos opérations, à investir dans la mécanisation, les infrastructures et la mécanique. Nous n’avions, il y a encore quelques années, que du traitement manuel. Nous avons ouvert deux sites mécanisés au sud de Paris et à Genas près de Lyon. Nous avons revu également l’informatique embarquée de nos chauffeurs, nos logiciels de gestion de tournée. Bref tout ce qu’il faut pour gérer notre masse de clients et mieux traiter l’information.
En 2015, nous avons lancé un grand plan de transformation que nous avons financé via une levée de fonds auprès de DHL à hauteur de 40 millions d’euros.
Avec l’essor de la livraison directe à domicile, la livraison en relais n’est-elle pas menacée ?
Sur les cinq dernières années nous avons constaté l’inverse, c’est-à-dire que la part du hors domicile, en l’occurrence le relais, a pris de la part de marché au domicile. Parce que c’est souvent plus pratique et moins cher tout simplement. C’est surtout valable sur le non-alimentaire, parce que pour l’alimentaire évidemment c’est moins pratique, mais c’est un métier sur lequel nous ne sommes pas positionnés.
Quels sont les grands enjeux à venir ?
A très court terme évidemment, c’est la concentration de flux phénoménale entre le Black Friday et les fêtes de fin d’année. Pour nous c’est un match énorme, une période cruciale pour nous et nos clients où les volumes triplent sur quatre semaines. Sur cette période, nous devons nous renforcer avec de la sous-traitance.
A plus long terme, sur les 18 mois à venir, nous voulons poursuivre et aller au bout notre plan de transformation, Nous allons terminer le déploiement des nouveaux terminaux de nos chauffeurs et ceux pour nos relais. Nous allons continuer à faire croître le nombre de nos partenaires relais et augmenter le nombre de « petits » clients et de particuliers au sein de notre portefeuille.
Le fait que des grands acteurs comme Amazon internalisent une partie de leur livraison, cela vous inquiète ?
Pas vraiment. Nous sommes sur un marché en croissance à deux chiffres, il y a plutôt de la place pour tout le monde.
Combien pèse encore la VPC dans votre activité ?
En tant que canal de vente, il est clair qu’il n’est plus majoritaire. Tous les acteurs qui ne faisaient que ça se sont remis en cause. Et les acteurs majeurs comme la Redoute qui ont basculé sur le e-commerce vont très bien car ils avaient déjà les infrastructures pour livrer des particuliers. Les métiers sont assez proches de la VPC au e-commerce.
En termes d’enjeux environnementaux, la livraison pose problème entre les emballages, le transport en camions, etc. Comment appréhendez-vous ces enjeux ?
C’est en effet un vrai sujet. Nous n’avons pas encore de plan national à long terme car nous n’avons pas de cadre législatif certain. On voit que nous ne pourrons plus rentrer avec tous nos camions dans les villes, mais nous ne savons pas quels camions pourront le faire, ni sur quelles plages horaires. Les règles du jeu ne sont pas connues et nous empêchent d’investir massivement, même si nous essayons des choses.
En outre, il faut voir que nous avons un modèle vertueux dans la mesure où le dernier kilomètre de livraison, qui est le plus compliqué à réaliser en zone urbaine, est opéré par le particulier et non par le livreur, ce qui évite une partie de la pollution. A Paris par exemple, 94% de la population est couverte par un relais à moins de 1000 mètres piétons. On essaye aussi de mettre en place de l’électrique mais ça ne résout pas tout. On voit bien que le problème vient aussi de l’engorgement des réseaux routiers, et l’électrique ça n’empêche pas les embouteillages. On peut envisager le vélo mais nous avons de très grosses volumétries… A date, nous n’avons pas résolu tous les enjeux pour parvenir à concilier la livraison de nos 150 000 colis journaliers avec tous les enjeux écologiques.
Vous envisagez également la livraison par drones ?
On regarde avec Cdiscount pour mettre en place de la livraison entre un relais et leur entrepôt de Cestas en Gironde qui passerait au-dessus de la Garonne pour éviter les contraintes de survol de zone urbaine. C’est une expérimentation qui doit voir le jour dans les deux ans. Mais le drone qui va voler en plein Paris au coin de la rue, ça ne se verra jamais. En zone rurale, pour remplacer des camions, oui, on peut l’envisager, même des gares autour de Paris.
Mais au-delà de ça, sur la question écologique, il y a déjà la question de l’emballage. Dans un colis, il y a presque 40% de vide. Avec des emballages optimisés, on pourrait gagner énormément de place et être plus efficient.
Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook
Newsletter quotidienne Forbes
Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.
Abonnez-vous au magazine papier
et découvrez chaque trimestre :
- Des dossiers et analyses exclusifs sur des stratégies d'entreprises
- Des témoignages et interviews de stars de l'entrepreneuriat
- Nos classements de femmes et hommes d'affaires
- Notre sélection lifestyle
- Et de nombreux autres contenus inédits