Souvent non directement concernées par la réglementation, du fait de leur taille, les PME vont toutefois devoir répondre à la nouvelle réglementation autour du reporting extra-financier, et plus précisément autour de la règlementation européenne CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). En effet, même si elles ne correspondent directement pas aux critères d’éligibilité[1], elles devront progressivement fournir des informations de nature extra-financières pour leurs parties prenantes, qui sont dans le périmètre de cette nouvelle réglementation, en amont et en aval dans le cadre de leur chaine de valeur et répondre au scope de celle-ci. C’est tout l’enjeu de la double matérialité.
Une contribution de Thierry Luthi, Président, MyReport
Aujourd’hui, seulement une partie des PME a conscience des sujets liés à la RSE et a mis en place une démarche concrète au-delà de l’établissement d’un nouveau reporting. En effet, tout n’est pas perdu puisque les entreprises françaises se classent aujourd’hui à la 4ème position au niveau mondial [2], devancées uniquement par les entreprises des pays nordiques, championnes en termes de performance RSE. La raison est assez simple, puisque la doctrine culturelle autour du pragmatisme qui s’explique par le fait que si les plus grandes entreprises ont engagé une démarche structurée (par exemple au Crédit Mutuel Arkéa, première banque française à pouvoir calculer sa performance globale grâce à une méthodologie qui convertit en euros les impacts extra-financiers), elles servent de modèle aux plus petites, servant ainsi un intérêt économique commun. Avec la perspective d’élargir l’application de la directive CSRD sur le reporting extra-financier avec des critères évolutifs pour les années de reporting à 2025 à 2027, comment mettre en place ces nouveaux systèmes et accompagner au mieux ces structures ?
Quel serait le modèle « Made in France » dans ce contexte ?
En 2025, le reporting extra-financier s’appliquera aux entreprises selon les critères mentionnés ci-avant. Se conformer devient donc essentiel car les PME qui ne sont pas capables de répondre à ces standards n’auront tout simplement plus accès à bien des marchés et appels d’offre. Il s’agit donc d’une partie déterminante pour leur développement futur. Il convient aujourd’hui de les accompagner à atteindre le niveau de conformité requis. Il existe plusieurs manières d’appréhender la RSE dans les différents secteurs de l’entreprise (argument marketing et commercial, développement des actifs de l’entreprise dans le capital humain, rationalisation des consommations d’énergie, …).
Mais au même titre que la vision scandinave sur la question écologique, toutes les entreprises françaises devront peu à peu adopter cette nouvelle manière de penser et surtout d’agir. On nomme cela la théorie du ruissellement. Les PME seules, ne pourront pas relever ces défis si elles ne se sentent pas impliquées dans un dessein plus grand, conjointement avec les ETI et les grandes entreprises. En effet, afin de réduire l’impact négatif sur l’environnement et la société en général, toutes les organisations, peu importe leur taille, doivent être actrices du changement en investissant sur l’avenir, tout en conciliant les intérêts écologiques, au service d’un bénéfice global, économique et surtout plus durable. C’était déjà l’un des critères les plus évidents de la loi PACTE : insuffler de la part des entreprises cette notion autour de la RSE et en prendre pleinement conscience dans les choix stratégiques.
Et dans les faits, comment le mettre en place ?
Ces enjeux doivent pouvoir s’exprimer au sein des PME, au-delà des obligations réglementaires, dans une démarche plus légère, moins imposante. Cela peut se traduire par la mise en place d’un plan d’actions concret qui vient impliquer l’ensemble des collaborateurs.
Pour ce faire, la PME peut mettre en place ce que l’on va nommer un « diagnostic flash » ESG qui aura pour objectif de prendre connaissance des enjeux, de l’aspect « stratégique ou politique », des actions menées à date, et ainsi d’évaluer la maturité ESG de l’entreprise. Ensuite, il sera possible de proposer des plans d’actions à mettre en œuvre pour améliorer sa performance ESG à moyen terme et la suivre avec des indicateurs appropriés.
Bien que ce diagnostic repose sur des indicateurs chiffrés, il y a aussi des éléments de type narratif pour un échange annuel entre la société, l’auditeur et ses parties prenantes. Pour calculer un score de maturité, plusieurs critères sont pris en compte : l’environnement, le social, la gouvernance et les relations avec les parties prenantes (clients, fournisseurs, …).
Cela doit permettre d’adresser plusieurs départements à partir d’un pilotage par la Direction Générale accompagnée de la Direction Financière, les RH et la personne dédiée à la coordination des actions RSE. Bien évidemment, cette démarche doit être partagée et diffusée de façon pragmatique dans tous les départements de l’entreprise pour créer ce lien et cette collaboration autour de cette démarche.
Pour ce qui nous concerne et compte tenu de notre activité plutôt intellectuelle, nous avons retenus les enjeux autour, d’une part, de l’empreinte carbone de l’entreprise avec la gestion du parc automobile et la gestion rigoureuse des moyens de transports et de déplacements pour nos missions et, d’autre part, de la politique de formation des équipes. Ces indicateurs sont partagés avec les salariés pour les sensibiliser à ces enjeux.
Il ne faut bien sûr pas négliger d’autres critères extra-financiers à partager avec les partenaires bancaires pour compléter les informations financières étant donné qu’elles deviennent importantes dans les offres de crédit.
Toutes ces démarches doivent pour finir permettre de construire et de développer une entreprise qui répondra aussi aux enjeux environnementaux, en les intégrant dans les facteurs de développement de l’entreprise.
[1] La CSRD s’applique depuis le 1er janvier 2024, pour un premier reporting en 2025 sur des données 2024 uniquement aux entreprises qui correspondent à au moins deux des trois critères suivants (seuil pour 2024) : entreprises déjà soumises à la directive sur la publication d’informations non financières en vigueur depuis 2018, c’est-à-dire les entreprises remplissant deux des critères suivants : plus de 500 salariés, plus de 50 millions € de chiffres d’affaires, plus de 25 millions € de total de bilan.
[2] Étude EcoVadis/Médiateur (octobre 2023) des entreprises consacrées à la performance RSE des entreprises françaises, européennes et au-delà.
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