L’augmentation des coûts associés aux véhicules électriques et à l’autonomisation vont considérablement impacter les business models actuels des constructeurs automobiles. Car, même avec des financements traditionnels, il devient difficile pour les classes moyennes d’accéder à la possession voire même à l’usage… Et donc aux constructeurs de vendre ces véhicules. Quels défis devront-ils relever d’ici 2035 pour faire face à ces changements de paradigme et rester dans la course ?
Un service de mobilité
La vente d’un service de mobilité va vraisemblablement devenir la norme sur les marchés matures. Aujourd’hui, près de la moitié des véhicules vendus en France est concernée par la location longue durée via les constructeurs et par les loueurs, avec une tendance toujours à la hausse. Et cette location longue durée a également un sens économique pour les consommateurs qui souhaitent changer régulièrement de véhicules (entre 3 à 5 ans). Le coût des véhicules électriques va donc encore accélérer cette tendance. Pour éviter le risque d’être « intermédiés » et de voir leurs marges fondre, les constructeurs doivent devenir incontournables sur ce marché du service de mobilité.
Pour ce faire, ils disposent d’une arme différenciante : une image de marque forte. A l’avenir, qui mieux que le constructeur pour nous louer un véhicule, organiser les réparations ou la proposition d’un nouveau véhicule ? Mais c’est un autre métier de proposer des services de mobilité que de construire des véhicules. Pour être performants financièrement, et ainsi mieux se positionner face aux intermédiaires, ils devront non seulement internaliser la chaine de valeur de leur gestion de flotte, mais également valoriser les différentes vies du véhicule, et ce jusqu’au démantèlement.
En générant du revenu à la fois sur la vente, la location et sur les vies successives du véhicule jusqu’à sa sortie du parc, les constructeurs pourraient voir augmenter leurs revenus additionnels et proposer des prix concurrentiels. Toutefois, une organisation pointue sera nécessaire pour la gestion des flottes comme pour leur suivi. Gare à ceux qui voudront gonfler les volumes de production en proposant des mensualités attractives. En effet, si la revente en occasion ne suit pas, ou oblige à des prix cassés, ce serait la catastrophe vécue il y a quelques années par certains constructeurs (dans le luxe notamment).
Un business model complet et intégré
Le modèle économique des constructeurs tend à devenir complet et intégré, depuis la fabrication jusqu’au démantèlement en passant par l’énergie et l’approvisionnement en métaux.
Ces dernières années, les initiatives vont d’ailleurs dans ce sens : depuis 5 ans, certains constructeurs ont fait le choix de fabriquer leur batterie via des joint-ventures et de sécuriser leurs approvisionnements en métaux grâce à des accords passés avec les industriels miniers. Les batteries remplacent ainsi le moteur thermique dans le différenciant technologique propre à chaque constructeur.
La recharge des véhicules est aussi un élément clé dans la transition énergétique. Tesla l’avait bien compris, son réseau propriétaire de super chargeurs premium associé à sa maitrise de la technologie des batteries et des moteurs électriques ont été des éléments déterminants dans son fulgurant essor. BMW, Mercedes, Volkswagen et Ford, rejoints par d’autres constructeurs, proposent désormais un service de recharge rapide sur autoroute.
Cette approche intégrée est aussi valable pour le démantèlement pour lequel les normes liées à la fin de vie des batteries deviennent drastiques et onéreuses. Mais les batteries, même anciennes, conservent une valeur élevée du fait des métaux qu’elles contiennent, d’autant plus avec la hausse actuelle de ses prix. En sécurisant leurs approvisionnements via des achats directs et issus du recyclage, les constructeurs bâtissent un business model basé sur la gestion complète du cycle de vie. C’est cette transition qui nécessite des investissements importants, qui impacte à la hausse les coûts des véhicules actuels.
Le rôle de la data
S’il est évident que la donnée sera clé comme dans d’autres secteurs, ces business models doivent encore être identifiés. Certains constructeurs ont d’ores et déjà annoncé des objectifs très ambitieux pour la monétisation de la donnée et les services connectés à l’horizon 2040. Il existe principalement deux types de monétisation : l’utilisation des données utilisateurs pour la publicité ciblée ou l’utilisation de la donnée pour l’optimisation servicielle.
L’utilisation du véhicule comme support à la publicité semble complexe en l’état et très lié au véhicule autonome. Ce sera au mieux un revenu d’appoint car les coûts de fabrication des véhicules resteront élevés. Et les volumes d’audiences ne seront de toute façon pas aussi importants que sur les téléphones et ordinateurs. D’autant que les utilisateurs de véhicules autonomes continueront à utiliser leur smartphone. En revanche, l’utilisation de la donnée pour optimiser le service est déjà une réalité, par exemple pour les trajets avec Uber ou encore la maintenance connectée. Le véhicule pourra à terme identifier les pannes probables, prévenir le conducteur ou le réseau. La donnée sera ainsi génératrice de valeur et sera un élément déterminant de la performance économique et la réponse à la concurrence.
Une tribune rédigée par: Guillaume Kerbrat, Directeur Associé de TNP.
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