Dans les années 80, nous étions exposés à environ 300 publicités par jour ; aujourd’hui, c’est plus de 1200. Notre capacité d’attention est saturée et faire émerger un nouveau produit dans un environnement surchargé est devenu un véritable défi.
Pourtant, le monde de la publicité fonctionne encore sur une méthode ancienne : les annonceurs achètent du « GRP » (gross rating point), c’est-à-dire des « impressions publicitaires ». Mais rien n’indique si le destinataire est attentif ou non à cette exposition… Or sans attention, pas de mémorisation !
Dès lors, il n’y a pas vraiment de recette miracle. On achète suffisamment d’impressions pour toucher (théoriquement) jusqu’à 100% de la cible, sans savoir si cette cible est réceptive au message. Voilà qui n’est pas sans rappeler la célèbre phrase du magnat de la publicité John Wanamaker : « je sais que la moitié de mon budget pub est inutile, mais je ne sais pas de quelle moitié il s’agit. »
Le casse-tête de l’attention
Dans l’univers du marketing, il existe un référentiel nommé « Bêta de mémorisation », qui correspond au pourcentage d’individus ayant mémorisé un message après une exposition. Initié dans les années 70, cet outil permet de comprendre qu’en fonction du media utilisé, le ratio de mémorisation n’est pas du tout le même.
Or, même si le Bêta est partiellement réactualisé, le monde change vite ! Entre l’arrivée d’Internet et l’utilisation compulsive des smartphones, nos modes de consommation médiatiques ont évolué et notre capacité d’attention a changé. Pour réactualiser le métier d’annonceur et optimiser les investissements publicitaires, il devenait donc urgent d’inventer de nouvelles méthodes. Car la bataille qui se joue aujourd’hui n’est plus celle du nombre d’impressions, nous menons désormais une véritable bataille de l’attention. Après tout, que pouvez-vous retenir d’un message diffusé trois fois devant vous si vous ne l’avez écouté que d’une oreille ?
Une étude My Media menée en octobre 2018 avec Harris Interactive sur plus de 4000 Français a permis de mesurer l’attention portée par les individus aux différents messages reçus en fonction du support utilisé, afin de permettre une comparaison entre les différents médias. L’objectif : pouvoir acheter véritablement de l’attention plutôt que simplement de l’audience !
Nouvelle mesure, nouveaux repères
Cette étude permet d’élaborer une nouvelle mesure de l’attention, l’indice « Alpha », qui apporte un éclairage nouveau et parfois surprenant sur la hiérarchie et l’efficacité mémorielle des médias.
Par exemple, si le cinéma reste le média captant le plus l’attention de l’individu (Alpha 61), son efficacité est en baisse, ce qui s’explique par une moins grande disponibilité des spectateurs (avec par exemple une attention captée par un smartphone lors des présentations publicitaires).
La télévision s’affiche comme un média captivant et retenant l’attention du spectateur (Alpha 38) mais connaissant un recul sensible, sans doute en raison d’un encombrement publicitaire important et d’un auditoire vieillissant.
Enfin, l’affichage conserve une bonne efficacité (Alpha 33) et la presse papier reste un média à fort potentiel captif (Alpha 40), avec un bonus pour les publications mensuelles et trimestrielles (Alpha 46). Mais l’étude réserve deux surprises. Tout d’abord, la radio : historiquement associée à une faible attention, son Alpha 32 rivalise désormais avec l’affichage ! Ensuite, le numérique : l’indice de l’attention est à la peine sur le digital, pour les bannières (Alpha 21) comme pour les vidéos (Alpha 22)
Ces chiffres sont riches d’enseignements : alors qu’Internet fonctionne comme un aspirateur à budgets, les médias traditionnels comme la télévision ou la presse papier offrent une meilleure attention… donc une meilleure mémorisation. Faut-il pour autant laisser tomber le Web ? Bien sûr que non, mais se contenter d’acheter de l’affichage sur Internet n’est sans doute pas le plus efficace, là où les stratégies de contenu et le SEO offrent de meilleurs résultats.
En tout cas, sur la base de ces nouveaux chiffres, il est possible d’ouvrir un nouveau champ d’optimisation de l’efficacité publicitaire. Outre le message élaboré par le créatif, l’annonceur passe du GRP traditionnel au « GRP-Alpha » : il peut désormais acheter de l’attention concrète plutôt que de l’audience abstraite.
Acheter de l’attention, ça rapporte combien ?
Le développement de nouveaux outils pour mesurer l’attention est une véritable révolution dans le monde publicitaire, puisqu’il permet d’optimiser aussi bien les campagnes de notoriété (pour faire connaître une marque) que les campagnes plus commerciales (pour vendre un service ou un produit). Mais concrètement, à quel point est-ce rentable ?
En mesurant l’attention à la fois sur les spots individuels et les canaux de diffusion utilisés, on affine aussi bien le coût par affichage que la performance de distribution des contacts, ce qui maximise l’efficacité globale de la campagne. Arrive-t-on pour autant à faire mentir John Wanamaker en économisant 50% du budget ? Pas encore, mais nous sommes en bonne voie !
Les premières campagnes médias dopées au GRP-Alpha sont déjà lancées et les résultats sont prometteurs. En effet, l’Alpha d’une chaîne TV peut varier entre 20 et 60, soit un écart de 40 points… qui peut se répercuter rapidement sur le budget des annonceurs. Compte tenu des montants investis dans la publicité, les marges de manœuvre sont énormes. Et ce n’est que le début, le GRP-Alpha nous réserve sans doute quelques bonnes surprises.
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