La griffe britannique Burberry, dont les derniers résultats ont particulièrement déçu le marché, a détruit pour plus de 30 millions d’euros d’invendus en 2017. Une « initiative » qui a déclenché le courroux de certains actionnaires alors que Burberry peine encore à convaincre les analystes du bien-fondé de sa nouvelle stratégie.
Une « polémique » dont Burberry se serait bien passée. La célèbre marque au tartan est dans le collimateur de plusieurs actionnaires (et de l’opinion publique) après avoir fait état, dans son rapport annuel, de la destruction pour plus de 30 millions d’euros de « marchandises » en 2017. Une pratique « en vigueur » chez les grandes marques de luxe mais ce qui interpelle bon nombre d’observateurs, c’est la « progression » (+50%) de cette pratique par rapport à l’année 2015. Une hausse qui peut néanmoins s’expliquer, en partie, par les quelque 10 millions de livres (soit l’équivalent de 11 millions d’euros) de stocks de parfums et cosmétiques imputable à la cession de la licence beauté de la maison britannique à l’américain Coty. Ce « procédé » équivaut, comme souligné par l’AFP, à la disparition en fumée d’environ 20 000 des trenchs iconiques de la célèbre marque. Pour justifier avoir brûlé ses invendus, Burberry a mis en avant la protection de la marque. La destruction de produits est répandue, comme évoqué en préambule, – tant parmi les grands distributeurs que les marques de luxe – qui y voient une façon de protéger la propriété intellectuelle et d’empêcher la contrefaçon, en détruisant leurs stocks au lieu de les écouler à bas prix.
La célèbre marque suédoise Hennes & Mauritz, plus connue sous l’appellation H&M, a reconnu également avoir recours à ce genre de pratiques…mais uniquement pour les produits « défectueux ou dangereux ». Le groupe scandinave aurait ainsi brûlé 60 tonnes d’habits depuis 2013, à raison de douze tonnes de vêtements par an, qualifiant alors ce processus « d’absolu recours ». Contrainte d’éteindre la polémique, Burberry a dépêché un porte-parole pour tenter d’apaiser la grogne montante chez certains actionnaires… qui se demandaient pourquoi lesdits invendus n’avaient pas été cédés aux investisseurs privés de la société. Mais la griffe britannique s’est également attirée les foudres de la sphère politique locale. Tim Farron, porte-parole sur l’environnement du parti d’opposition des Libéraux démocrates, est notamment monté au créneau, qualifiant la pratique du groupe de « scandaleuse », estimant que « recycler est bien meilleur pour l’environnement que de brûler pour générer de l’énergie ».
Une stratégie de « retour vers le vrai luxe »
Face à ce tir groupé, Burberry s’est défendue, tant bien que mal, en assurant travailler « avec des entreprises spécialisées qui sont capables de récupérer l’énergie de l’opération » de destruction. « Quand on est obligé de détruire des produits, on le fait de manière responsable et on continue à chercher des moyens de réduire et revaloriser nos déchets », a assuré le porte-parole. Fin de citation. Une polémique qui tombe très mal pour la griffe britannique et qui est sans doute amplifiée par les résultats décevants enregistrés par le fabricant de trench-coats, publiés la semaine dernière. Surtout, ce sont les perspectives inchangées qui ont poussé les opérateurs à sanctionner le titre qui avait entraîné dans sa chute les autres valeurs du secteur en Europe. Ainsi, Burberry a confirmé ses objectifs annuels à taux de change courants et s’était dit « bien partie » pour réaliser des réductions de coûts de 100 millions de livres (113 millions d’euros).
Sur le front des résultats du premier trimestre de son exercice décalé, Burberry a fait état, sur les 13 semaines au 30 juin, d’un chiffre d’affaires de 479 millions de livres, pratiquement identique à celui réalisé un an plus tôt, avec une croissance des ventes comparables de 3%, conforme aux attentes des analystes. En plein « refondement stratégique », Burberry doit rapidement renouer avec le fil de son histoire et compte, pour cela, sur la première collection en septembre du nouveau directeur artistique Riccardo Tisci, transfuge de Givenchy (LVMH). « La transformation de Burberry reste à faire, mais les premières mesures que nous avons prises pour redynamiser la marque donnent des signes prometteurs », s’est enthousiasmé Marco Gobbetti, directeur général du groupe, au mois de mai dernier. En outre, la marque britannique – toujours dans sa volonté de renouer le fil de son histoire avec le luxe haut de gamme – entend concentrer, dans le cadre de son plan de relance, tous ses efforts sur la mode et la maroquinerie.
Objectif : 2021
Mais prudence étant mère de sûreté, le patron du fabricant de trench-coats, a averti les investisseurs, dès novembre 2017, qu’il ne fallait pas s’attendre à un redressement sensible des ventes et des profits avant 2021. « Si le potentiel de hausse à long terme peut sembler intéressant, une période de transition de deux ans implique une réduction d’environ 15% des estimations de bénéfices à moyen terme, suggérant que la patience sera de rigueur avant d’arriver sur une vraie trajectoire de redressement », abondait Morgan Stanley, cité par Reuters, en novembre dernier. Le chemin est encore long et s’annonce (encore) parsemé d’embûches.
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