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Pierre Nanterme : « La France Contribue Enormément À L’Innovation D’Accenture »

© Accenture

En matière de course au numérique, vous avez qualifié la France « d’élève doué mais qui pourrait beaucoup mieux faire s’il exploitait tout son potentiel ». Pouvez-vous expliciter ce propos ?

La France est certainement l’un des pays qui encourage le plus la création de start-up. Nous avons un réservoir de talents, notamment scientifiques, qui est, relativement à notre taille, certainement le meilleur au monde.  En France, on adore les jeunes pousses. La voix de la France – cela s’est d’ailleurs vu dernièrement au CES de Las Vegas – compte désormais. Tout cela va donc très bien. Mais malheureusement, les choses se gâtent quand ces jeunes pousses veulent grandir.  Tout à coup, au sein de cette France qui adore les start-up, il y a un véritable changement de climat. C’est l’avènement d’une véritable ère glaciaire, avec notamment une bureaucratie des plus complexes qui les empêche de déployer leurs ailes.

Comment expliquez-vous cette frilosité ?

La France est un pays qui s’est créé par l’Etat. Certains épisodes, de notre Histoire, ont exacerbé ce poids de l’Etat, notamment dans le giron économique. L’Etat fait tout, l’Etat dirige tout, l’Etat réglemente. L’Etat génère aussi une certaine forme de psychologie dans la population, dans le sens où celle-ci a tendance à tout attendre de l’intervention étatique. Ce constat s’est encore renforcé au cours des 70 dernières années. La France n’a jamais été un pays libéral sur le plan économique et vit, d’une manière ou d’une autre, selon un modèle d’économie dirigée quand d’autres pays se sont développés sur l’initiative individuelle et de manière décentralisée. L’Allemagne est régionale, l’Espagne également, même l’Italie a un côté décentralisé, sans parler des Etats-Unis, quand la France a davantage privilégié l’initiative collective dans un cadre plutôt centralisé.

Pour en terminer sur des considérations plus financières, le parcours boursier d’Accenture est résolument flamboyant depuis votre arrivée à la tête de l’entreprise (le titre a, en effet, plus que doublé sur la période pour une valorisation d’environ 65 milliards de dollars). Comment êtes-vous parvenu à maintenir un tel rythme de croisière, en dépit des incertitudes pesant sur l’économie mondiale ?

Il n’y a pas de secret. Nous exécutons une stratégie qui est extrêmement claire et nous nous y tenons. Toutes les entreprises sont aujourd’hui confrontées à une course de vitesse, qui consiste à générer de la croissance dans les nouveaux métiers le plus rapidement possible pour compenser l’érosion des métiers historiques. Accenture fait aujourd’hui partie de ceux qui réussissent le mieux cette rotation vers ces nouveaux métiers, et nos investisseurs y sont sensibles car cela démontre que nous avons un modèle de croissance pérenne. Ces nouveaux métiers liés au services digitaux représentent aujourd’hui environ 40% de notre chiffre d’affaires total, soit plus de 13 milliards de dollars, et connaissent une croissance de l’ordre de 30%. Nous avons démarré cette course relativement tôt et nous sommes résolument obstinés. A titre personnel, je suis plus qu’obstiné, je suis obsédé par cela.

Nous avons également mené un travail important de communication avec nos investisseurs. Nous leur parlons énormément car nous les considérons comme des partenaires. Par exemple, lorsque nous avons initié notre stratégie d’acquisition, qui marquait une véritable rupture par rapport au passé, nous en avons discuté avec eux. Nous avons également repositionné complètement la marque Accenture. Nous avons été les premiers à utiliser les techniques du B to C en communication. Ce qui est résolument atypique pour une société de conseil et de services. Nous faisons partie des cinquante marques les plus valorisées au monde (environ 27 milliards de dollars, selon le dernier classement BrandZ), le tout sans vendre le moindre produit, si ce n’est des prestations intellectuelles.  Après, bien sûr, cela repose sur des résultats, relatifs à notre marché, que je qualifierais de spectaculaires.

Vous pensez que les entreprises qui ne feront pas cette transformation sont vouées à disparaitre ?

C’est exactement cela et il faut rester en alerte en permanence, sans jamais se reposer sur ses lauriers. J’en suis convaincu. Tous les jours, nous recherchons les meilleurs talents, nous passons au crible les start-up pour sélectionner les plus prometteuses, nous étudions des cibles d’acquisitions pour compléter nos expertises, notamment dans les nouveaux métiers (environ 1 milliard de dollars investis en 2016 et près de 600 millions de dollars au cours du dernier trimestre).

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