Pierre Nanterme : « La France Contribue Enormément À L’Innovation D’Accenture »

Premier européen et, de facto, premier Français à présider aux destinées du mastodonte et leader mondial du conseil –  32,9 milliards de dollars de chiffre d’affaires sur l’année fiscale 2016 –  Pierre Nanterme a particulièrement mis l’accent, depuis sa prise de fonction, sur l’impérieuse nécessité de mener à bien la transition vers les nouveaux métiers, notamment liés au digital, rebaptisés le « New » dans le vocable d’Accenture. Une phase où « tout est à réinventer ».

Le Forum de Davos a ouvert ses portes ce mardi. Pouvez-vous nous évoquer, dans les grandes lignes, le rôle et l’implication d’Accenture au cœur de ce rendez-vous incontournable de l’économie mondiale ?

Accenture est un partenaire stratégique du Forum économique mondial depuis plus de 20 ans. Notre contribution est double : nous sommes l’un des partenaires technologiques du Forum et nous l’aidons également dans la définition de son agenda par les travaux de recherche qu’Accenture Strategy effectue. En tant que partenaire technologique, nous avons, par exemple, construit le réseau social utilisé par tous les participants. C’est la vitrine technologique du Forum à Davos. Quant aux travaux de recherche, Accenture Strategy mène chaque année des études et publie des rapports à Davos qui contribuent à nourrir la réflexion lors du Forum. Nous contribuons, par exemple, au programme de recherche Digital Transformation Initiative, une initiative du Forum destinée à analyser et évaluer les impacts économiques et sociétaux de la transformation numérique.

Vous êtes CEO D’Accenture depuis 2011 et Chairman depuis 2013. Quels ont été, depuis votre prise de fonction, vos principales priorités et autres axes de développement ? 

Ma priorité est de faire en sorte qu’Accenture reste différencié et compétitif par rapport à nos concurrents et, in fine, de toujours être pertinents vis-à-vis de nos clients. Lorsque j’ai été nommé CEO d’Accenture, nous étions surtout reconnus pour notre excellence dans l’exécution. Or, aujourd’hui, l’enjeu c’est l’innovation. Pour être pertinent auprès de nos clients aujourd’hui, il faut être pertinent dans ce que nous appelons, chez Accenture, le « New ». Derrière ce terme, nous regroupons tout ce qui est nouveau et notamment toutes ces technologies qui redéfinissent, ou vont redéfinir, le monde dans lequel nous vivons, et forcent les entreprises à se réinventer en permanence. C’est donc par définition un terme évolutif. Il inclut aujourd’hui l’intelligence artificielle, la réalité immersive, la blockchain, voire l’informatique quantique, mais d’autres technologies aussi disruptives viendront les remplacer ou les compléter dans l’avenir. Pour aider nos clients dans cette nécessité de réinvention permanente, nous avons mis l’innovation au cœur de notre offre de services et de notre modèle économique, tout en conservant notre capacité d’exécution. Nous avons notamment massivement investi dans la R&D, mais également dans les partenariats avec les membres de l’écosystème et, enfin, nous avons créé un « parcours d’innovation » qui nous permet d’identifier les innovations émergentes, à partir desquelles nous développons rapidement des solutions business pour en faire bénéficier nos clients. Ce parcours débute par Accenture Research, dont la vocation première est d’identifier les grandes tendances économiques et technologiques.

Ensuite, nous avons créé « Accenture Ventures » qui poursuit, pour sa part, deux objectifs : premièrement, via notre programme Open Innovation, nous passons au crible des milliers de start-up à travers le monde, ce qui nous permet d’avoir une visibilité sur les solutions innovantes qui se développent et les applications business qui peuvent en découler. Ainsi, lorsque nous travaillons avec des clients du manufacturing ou du retail, nous sommes en mesure de leur dresser une liste des start-up parmi les plus pertinentes du monde dans leurs domaines respectifs. Le second objectif poursuivi par Accenture Ventures est de prendre des tickets minoritaires pour aider ces « jeunes pousses » à grandir. Nous avons ensuite les « Accenture Labs » qui, il convient de le préciser, ne sont pas des laboratoires purement technologiques qui font de la recherche fondamentale, mais des laboratoires de R&D appliqués qui travaillent sur les nouveaux business models. Quelles sont les applications business de la réalité augmentée dans l’industrie aéronautique, par exemple ? Nous avons ainsi sept « Labs », à travers le monde, dont un à Sophia Antipolis, qui ont chacun une spécialisation dans un domaine particulier. Nous travaillons par exemple sur le génome du consommateur dans notre Lab de San Jose, tandis que nos Labs de Washington et en Israël planchent sur les questions de cybersécurité. Viennent ensuite les « Accenture Studios », dédiés au prototypage et à la conception de solutions en mode développement Agile. Enfin, nos « delivery centers » qui permettent d’industrialiser la mise en œuvre de ces innovations chez nos clients.

Toujours dans ce domaine, pouvez-vous nous présenter, plus spécifiquement, le centre d’innovation de Paris inauguré au mois de juin dernier ?

Nous voulons disposer de centres où nos clients peuvent explorer le champ des possibles en matière d’innovation, et où nous pouvons les aider à imaginer leur futur, créer de nouveaux services et réfléchir à leurs modèles économiques de demain. L’idée directrice est donc, en quelque sorte, d’amener non seulement « la Silicon Valley » mais toutes les « Valleys » à l’intérieur même des villes qui nous paraissent les plus stratégiques, et dont Paris fait clairement partie.  Tous nos centres d’innovation sont connectés avec nos Labs et ont accès aux start-up de notre programme Open Innovation. Notre centre à Paris possède également un Studio, permettant ainsi à nos clients de concevoir des prototypes rapidement après la phase d’idéation. Comme vous le voyez, la France contribue énormément à l’innovation d’Accenture et est pour nous un lieu d’innovation depuis des décennies. Nous avons ouvert notre Lab à Sophia Antipolis il y a plus de 20 ans. Le patron d’Accenture Research est un Français, tout comme le patron de la R&D. Je suis d’autant plus fier et à l’aise avec cela que ce n’est pas moi qui les ai nommés.  Et juste à côté de notre centre d’innovation parisien, il y aura l’ouverture prochaine (nldr : au printemps) de l’incubateur géant Station F, située à la Halle Freyssinet, avec lequel nous pourrions collaborer.

Page suivante. « La France n’a jamais été un pays libéral »