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Palantir devient l’action la plus chère du S&P et permet à son PDG Alex Karp de figurer dans le classement Forbes 400

Forbes 400
Le cofondateur et PDG de Palantir, Alex Karp. | Source : capture d'écran vidéo Palantir

Alex Karp figure pour la première fois dans le classement Forbes 400 des personnalités les plus riches des États-Unis, grâce aux résultats exceptionnels de sa société Palantir cette en 2024.

Article de Phoebe Liu pour Forbes US – traduit par Flora Lucas

 

Dans une vidéo officielle publiée sur la chaîne YouTube de Palantir en septembre dernier, le PDG Alex Karp fait un jogging dans une forêt vêtu d’un cycliste et tenant des bâtons de marche rose vif, un micro accroché à son tee-shirt.

« De nombreuses personnes n’arrivent pas à comprendre comment nous avons tiré notre épingle du jeu [alors que] les experts, les gestionnaires professionnels et certains analystes considéraient notre projet comme une forme de Frankenstein ramené à la vie par un savant fou, moi, et comment nous sommes devenus cette entreprise dynamique et clairement rentable, à même de figurer dans le S&P 500 », a déclaré Alex Karp, 57 ans. « Et nous l’avons fait à notre manière, […] les rebelles ont gagné. »

 

Une croissance sans pareille et une grande marge de manœuvre pour se développer

Alex Karp a certainement gagné. Palantir, qui conçoit des logiciels pour aider d’autres entreprises à rassembler, gérer et analyser leurs données, d’abord avec des agences gouvernementales secrètes comme la CIA et maintenant aussi avec des clients commerciaux dans un large éventail d’industries, a connu une année record. Palantir a décollé, avec un chiffre d’affaires annuel qui a augmenté de plus de 20 % au cours de l’année écoulée pour atteindre 2,5 milliards de dollars. En outre, la société est passée d’une perte nette de 50 millions de dollars en juin 2023 à un bénéfice net de 400 millions de dollars un an plus tard. Cette année record a été couronnée par l’entrée de l’entreprise dans le S&P 500 en septembre.

La croissance de l’entreprise s’explique en partie par le fait que nombre de ses logiciels de données s’inscrivent dans la vague d’engouement pour l’intelligence artificielle (IA). « Palantir construit cette technologie qui est le meilleur moyen d’opérationnaliser l’IA depuis 20 ans maintenant », déclare Mariana Pérez Mora, analyste chez Bank of America Merrill Lynch, soulignant que Palantir a réussi à le faire pour de grandes organisations complexes telles que les gouvernements. « L’IA a été un énorme catalyseur. »

 


« Nous sommes confrontés à un désordre mondial croissant. Nous avons fondé l’entreprise et construit nos produits pour lutter contre un monde désordonné, et nous pensons que nous sommes prêts pour ce moment. »

Alex Karp, cofondateur et PDG de Palantir


 

Il n’est donc pas surprenant que les actions aient augmenté de 134 % au cours de l’année écoulée, faisant de Palantir l’action la plus chère de l’indice S&P en termes de multiples de revenus (plus encore que Nvidia, la coqueluche des concepteurs de puces). L’ascension fulgurante de Palantir a valu à Alex Karp de figurer pour la première fois dans le classement Forbes des 400 personnalités les plus riches des États-Unis, avec une fortune estimée à 3,6 milliards de dollars, grâce à sa participation dans Palantir et à environ un milliard de dollars de liquidités provenant de la vente d’actions au 1er septembre, date à laquelle Forbes a finalisé les fortunes nettes pour son classement.

Alex Karp, le philosophe devenu entrepreneur, attribue son succès et celui de son entreprise à sa croyance dans la « production de la vérité », écrivant dans un courriel à Forbes que le logiciel de Palantir « fournit une source unique de vérité : une vue, sans fard, de l’ensemble de “l’être” d’une entreprise, de la manière dont toutes ses personnes, ses actifs et ses actions sont liés les uns aux autres ».

Et Palantir dispose d’une grande marge de manœuvre pour se développer, ajoute-t-il : « Nous sommes confrontés à un désordre mondial croissant. Nous avons fondé l’entreprise et construit nos produits pour lutter contre un monde désordonné, et nous pensons que nous sommes prêts pour ce moment. Ce n’est que le début. »

 


Des valorisations élevées, des actionnaires enthousiastes

Palantir se négocie à une valeur bien supérieure à celle des plus grandes entreprises technologiques et des sociétés de conseil avec lesquelles elle est en concurrence, grâce notamment à une armée fidèle d’actionnaires individuels. Sur la base d’un multiple de chiffre d’affaires, elle est plus valorisée que n’importe quelle autre entreprise du S&P 500. Les multiples sont basés sur les cours de clôture du 30 septembre et sur les données financières de l’exercice se terminant en juin 2024 (voir tableau).


 

De philosophe à entrepreneur à succès reconnu par ses pairs

Né à New York et élevé dans les environs de Philadelphie par un père pédiatre et une mère artiste, Alex Karp s’est toujours réjoui de n’entrer dans aucune case. « Je suis de confession juive, mais j’entretiens une relation très ambiguë avec mes racines, je me sens donc libre de dire ce que je veux », a-t-il déclaré au New York Times en août, depuis sa propriété d’un million de dollars dans le New Hampshire, ajoutant qu’il possédait neuf autres « refuges de ski » à travers le pays. Il a fait ses études à Haverford, a étudié le droit à Stanford (où il a rencontré Peter Thiel, cofondateur de Palantir et membre du classement Forbes 400), puis a obtenu un doctorat en théorie sociale néoclassique à l’université Goethe de Francfort, où il a rédigé une thèse sur le rôle de l’agression dans l’intégration sociale.

Dans une démarche surprenante de la part d’un docteur en philosophie récemment diplômé et n’ayant aucune formation technique, Alex Karp a cofondé Palantir en 2003, aux côtés de Peter Thiel, des diplômés en informatique de Stanford Stephen Cohen et Joe Lonsdale et de l’ancien ingénieur de PayPal Nathan Gettings, avec pour mission d’« aider les agences de renseignement à mieux utiliser leurs données de manière sûre et responsable ». Palantir a également pour mission explicite de soutenir les valeurs occidentales et la défense américaine, ce dont Alex Karp n’hésite pas à parler. « Nous soutenons sans réserve les États-Unis et ses alliés », écrit-il dans son courriel à Forbes, en insistant sur un engagement unique en faveur de « la réussite de nos partenaires dans les affaires et sur le champ de bataille ».

Le premier bailleur de fonds et client de l’entreprise a été la CIA, et Palantir a opéré principalement dans le domaine du renseignement jusqu’en 2010 environ, lorsque la banque JPMorgan est devenue son premier client commercial. Au fil des ans, l’entreprise a continué à se concentrer sur les très gros clients et en compte aujourd’hui près de 600.

 


Partenariat public-privé

Le chiffre d’affaires de Palantir augmente de plus de 20 %, les recettes provenant des clients gouvernementaux représentant un peu plus de 50 % du total chaque année. Bien que de plus en plus de concurrents entrent sur le marché des contrats gouvernementaux, Palantir remporte toujours des contrats non concurrentiels, selon l’analyste Mariana Pérez Mora (voir graphique).


 

« Très peu d’entreprises ont à la fois une croissance de plus de 25 % et des marges de plus de 25 % », déclare Gil Luria, analyste chez D.A. Davidson. « C’est ce qui fait de Palantir une entreprise rare. »

 

Une valorisation qui reflète réellement le succès de l’entreprise ?

Cependant, l’entreprise doit-elle être aussi valorisée (actuellement, elle se négocie à une valeur de marché correspondant à 36 fois son chiffre d’affaires annuel) ? Les analystes n’en sont pas sûrs : seuls cinq des vingt analystes qui couvrent Palantir lui attribuent une recommandation à « acheter », les autres se répartissant entre des recommandations à « vendre » ou à « conserver ». Brian Gesuale, analyste chez Raymond James, a abaissé sa recommandation à « acheter » pour une recommandation à « conserver » au début de la semaine dernière, écrivant dans une note aux investisseurs que Palantir doit « croître dans sa riche évaluation ». Cependant, Mariana Pérez Mora reste optimiste, affirmant que certains analystes considèrent Palantir sous l’angle du logiciel plutôt que sous celui de l’entreprise de défense et elle l’évalue sur la base du flux de trésorerie disponible plutôt que sur le volume des ventes. En se basant sur les projections de Mariana Pérez Mora concernant le flux de trésorerie disponible futur, l’évaluation de Palantir devient beaucoup plus raisonnable et s’aligne sur les évaluations de ses concurrents, explique-t-elle.

Bien entendu, même si Palantir porte le nom d’une boule de cristal indestructible dans Le Seigneur des anneaux, personne ne sait si le cours de son action va continuer à monter en flèche. Alex Karp et le cofondateur de l’entreprise, Peter Thiel, qui s’est enrichi de 3,3 milliards de dollars cette année, en grande partie grâce à sa participation dans Palantir, sont en train de retirer certaines actions de la table. Depuis le 1er janvier, Alex Karp a vendu pour plus de 300 millions de dollars (avant impôts) d’actions Palantir, tandis que Peter Thiel s’est délesté de plus d’un milliard de dollars d’actions Palantir.

Gil Luria a établi un parallèle entre l’entreprise et Tesla et son PDG Elon Musk, lorsque l’entreprise de véhicules électriques atteignait des sommets en 2021. « L’action Tesla s’est échangée pendant une très longue période bien au-delà de toute évaluation ou mesure comparable. La raison en est que les gens étaient vraiment enthousiasmés par la mission et les perspectives de l’entreprise. » (Aujourd’hui, les actions de Tesla sont inférieures de 40 % au sommet atteint en 2021.)

Selon Mariana Pérez Mora et Gil Luria, le leadership centré sur la mission d’Alex Karp, qui consiste à défendre les valeurs occidentales et à aider les États-Unis à l’ère de la défense alimentée par l’information (environ la moitié de ses revenus proviennent de contrats avec l’armée américaine) confère à Palantir une valeur unique et rend l’entreprise moins sensible aux aléas financiers.

Et si le culte de la personnalité autour d’Alex Karp et de Palantir n’est pas encore aussi important que celui qui entoure Elon Musk, la personnalité la plus riche au monde, il contribue à maintenir les actions de Palantir à un niveau élevé et à pousser Alex Karp encore plus sous les feux de la rampe.

Comme l’a déclaré Alex Karp à Forbes en 2013, « l’une des choses que je trouve vraiment difficiles et que je considère comme un frein énorme […] est que je perds ma capacité à être complètement anonyme ».

 


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