Suite à une saison ratée sur le plan sportif engendrant une non qualification en coupe d’Europe, l’Olympique de Marseille a vu ses revenus chuter de façon conséquente. Le club a donc entamé une cure d’austérité et a réduit son budget annuel de plus d’un tiers. Mais alors que le secteur sportif est en péril et que l’opportunité de ligue européenne fermée se profile, ne faudrait-il pas investir massivement et ignorer les directives du fair-play financier ?
Etat des lieux sportif
L’Olympique de Marseille vient de subir sa première défaite de la saison, de surcroit à domicile et contre un adversaire supposé plus faible. Selon Franck Sauzée, Consultant sportif pou Canal+ « L’OM de cette année ressemble trait pour trait à celui de l’an dernier ». D’après lui, les maux de l’an dernier sont les mêmes à l’orée de cette nouvelle saison. De quoi laisser augurer une saison aussi compliquée sur le plan sportif ? Nul n’est capable de l’affirmer. Mais comment penser le contraire alors que les voyants semblent indiquer le rouge ?
Les concurrents de l’Olympique de Marseille quant à eux, semblent tous être sur une dynamique positive :
- Le Paris-Saint Germain possède des joueurs de classe mondiale et jouit toujours du soutien financier de l’Etat du Qatar ;
- L’AS Monaco, après un exercice catastrophique, compte sur ses fonds propres pour rejouer les premiers rôles ;
- L’Olympique Lyonnais vit un renouveau sportif et récoltera bientôt pleinement les fruits de la construction de son nouveau stade ;
- Le Lille Olympique Sporting Club vient de céder des joueurs pour un montant de 150 millions d’euros et a vu la valeur de son effectif monter en flèche ;
- L’OGC Nice est sur le point de se faire racheter par le milliardaire britannique Jim Ratcliffe ;
- Et L’AS Saint-Etienne vient pour la première fois de son histoire de boucler un budget 2019/2020 à plus de 100 millions d’euros.
L’austérité comme réaction
Le football est une industrie très fragile car dépendante de l’aléas sportif. Un but marqué ou encaissé peut, par effet d’entrainement, avoir des conséquences monumentales sur l’atteinte ou non d’objectifs financiers et ainsi engendrer des spirales positives ou négatives. C’est peut-être ce qui s’est passé en fin de saison 2017/2018 quand l’OM a terminé aux portes du podium de Ligue 1. La saison 2018/2019, quant à elle, a eu des conséquences encore plus néfastes sur le budget olympien. En cas de qualification en Ligue des Champions (couplée d’une vente de joueurs en Premier League ?) celui-ci aurait pu atteindre les 180 à 200 millions d’euros pour la saison suivante. L’équipe en aurait été renforcée d’autant. Malheureusement pour le club, l’OM a terminé en cinquième position du dernier championnat national et a raté l’opportunité de se qualifier pour une lucrative coupe d’Europe. Son budget a donc du être réévalué à la baisse. Il atteint péniblement les 110 millions d’euros pour l’exercice en cours.
En conséquence, l’Olympique de Marseille semble tenir un nouveau cap : réduire la voilure, analyser l’échec et tenter de faire mieux avec moins. Pour ce faire, le club a déjà cédé des joueurs à forte valeur marchande, a laissé partir en fin de contrat certains gros salaires et intègre davantage de jeunes pousses issues du centre de formation. L’OM a tout de même consenti à quelques achats ciblés et qualitatifs.
L’idéal serait donc de réussir, malgré la cure d’austérité, ce que l’équipe n’est pas parvenue à faire durant trois années de forts investissements. Mais dans ces conditions, le succès est-il le scénario le plus probable ? L’austérité est-elle seulement la seule option ?
Fair-play ou risk management ?
Le fair-play financier est une règle adoptée par l’UEFA. Il a pour but d’empêcher les clubs de football professionnels d’investir subitement et massivement en dépensant plus que les revenus qu’ils génèrent grâce à leur exploitation. Le but étant de tenter de garantir une équité sportive et de luter contre le risque de péril en cas de retrait soudain d’un investisseur.
Dans le cas présent, le FPF empêche Frank McCourt, actionnaire principal de l’Olympique de Marseille, d’aider son club à atteindre ses objectifs en poursuivant sa stratégie d’investissement. L’OM n’ayant pas réussi à augmenter ses revenus, ne peut plus augmenter ses dépenses. Le club a d’ailleurs signé un accord avec l’UEFA, qui le contraint à réduire ses dépenses. Pourquoi ? Car l’UEFA menace le club d’une sanction financière pouvant aller jusqu’à 6 millions d’euros sur les revenus éventuels de ses participations futures aux compétitions européennes, une limitation des joueurs pouvant être inscrits à ses compétitions (23 au lieu de 25). L’UEFA peut même décider d’exclure le club d’une future compétition européenne. L’UEFA avait d’ailleurs décidé d’exclure le Milan de la Ligue Europa. Mais ce dernier avait fait appel de la sanction devant le Tribunal Arbitral du Sport, qui l’avait réintégré.
Au vu de la situation critique de l’équipe et de l’historique récent des clubs européens, l’UEFA peut-elle vraiment contraindre l’OM et l’empêcher de relancer la machine sportive grâce à l’apport pécuniaire de son propriétaire ? Si l’OM se remettait à investir, que pourrait-il se passer ? Voici deux scénarios purement spéculatifs qui aident à comprendre les enjeux :
- Scénario 1 – le plus optimiste : L’OM investit sur l’acquisition de joueurs à forte valeur ajoutée sportive, parvient à se qualifier pour la Ligue des Champions, génère donc plusieurs dizaines de millions d’euros de revenus supplémentaires (droits TV, cessions joueurs, billetterie…) et est contraint par le FPF à une amende de six millions d’euros (comme évoqué dans l’accord récemment signé par le club).
- Scénario 2 – le plus pessimiste : Le club investit massivement dans les transferts pour se renforcer, échoue à nouveau à une qualification européenne et est contraint de payer une amende de 20 millions d’euros fermes (sanction financière prononcée à l’encontre de Manchester City en 2014).
Dans le scénario 1, l’OM génère bien plus de revenus que les sanctions qui planent sur elles. Il a donc tout intérêt à investir malgré le FPF, il tentera de s’y contraindre l’année suivante grâce à l’augmentation des recettes.
Dans le scénario 2, l’équipe ne parvient pas à ses objectifs malgré l’apport de valeur ajoutée sportive. Faut-il en conclure que le jeu n’en vaut pas la chandelle ? Pas forcément, car si le risque sportif demeure en investissant sur l’acquisition de nouveaux joueurs de qualité, il est d’autant plus grand sans la contribution éventuelle de ces derniers.
Si on ajoute à cela, la possibilité d’une ligue fermée, non gérée par l’UEFA, et dont la participation garantirait des revenus colossaux aux clubs, le club phocéen a tout intérêt à envisager le recours au financement par son actionnaire pour générer une spirale vertueuse qui pourrait le mener vers la performance sportive et financière. Il reste en tout cas trois semaines de période des transferts pour corriger la trajectoire sportive du club. A moins que le fair play financier ne soit pas la raison de l’arrêt des investissements et que l’actionnaire… Réponse dans les prochaines semaines.
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