Netflix a enregistré une croissance vertigineuse en accumulant plus de 16 millions de nouveaux abonnés lors du premier trimestre 2020. Une hausse soutenue en écrasante majorité par le marché mondial.
« Toutes vos connaissances se sont mises à Netflix ». Voilà ce qu’a titré le New York Times à l’annonce des chiffres du premier trimestre de la plate-forme de streaming. Et on n’a pas trouvé meilleure formule.
Netflix totalise désormais près de 183 millions d’abonnés dans le monde. Ils sont 15,7 millions à avoir rejoint la plate-forme depuis le début de l’année : 2,3 millions viennent des Etats-Unis et du Canada, 13,4 du reste du monde.
Cette croissance de feu confirme une double tendance. En période de confinement, où doivent demeurer à la maison célibataires ennuyés et familles sous pression, le streaming est le parfait compagnon pour tromper la solitude, divertir, et trouver un peu de calme. D’autant plus quand les salles de cinéma sont fermées, même si le streaming n’a pas eu besoin de ça pour se faire une place dans les habitudes de consommation de la population mondiale – enfin de la partie qui en a les moyens et qui profite d’une connexion internet convenable. La crise du coronavirus exacerbe donc le succès de Netflix, comme de l’ensemble des plate-formes de streaming en tout genre par ailleurs. On pouvait s’en douter.
L’autre enseignement de ces chiffres tient en l’importance du marché mondial dans la croissance de la plate-forme au gros N rouge. En 2019 déjà, la croissance de Netflix reposait à 90% sur le marché hors US : la tendance se confirme puisque l’international représente 85% des nouveaux souscripteurs au premier trimestre 2020. Si les Etats-Unis représente toujours le premier marché de Netflix avec plus de 60 millions d’abonnés (soit plus d’un Américain sur six), Netflix y subit une concurrence rude. L’arrivée récente de Disney+, la plate-forme de Disney, lui a coupé les pattes. Sa hausse de tarification n’a guère joué non plus en sa faveur.
Pour le moment, le streaming souricier s’installe aux US mais n’a pas encore envahi les ordinateurs portables outre-Atlantique, avec ses 50 millions d’abonnés revendiqués à travers le monde. De même Amazon Prime, commercialisée avec l’offre premium d’Amazon, si elle peut se targuer de plus de 150 millions d’abonnés, jouit davantage de la marque iconique de Jeff Bezos que de la portée symbolique de ses créations.
Pour poursuivre sa croissance hors de sa terre natale, et y asseoir sa domination actuelle, Netflix doit faire des efforts. Surtout sur le segment qui pêche le plus : son offre de films. Outre ses créations originales qui, à l’instar de ses séries, oscille frénétiquement entre bouses incommensurables et chefs-d’œuvre d’anthologie, avec son lot de productions intermédiaires inégales, Netflix ne se souciait guère de son catalogue filmique. En France, un tel dilettantisme est forcément regardé d’un mauvais œil. Car une fois soupé les « classiques » tarantinesque et scorseciens, et autres joyeusetés du néo-Hollywood, plus rien à se mettre sous la dent.
Mais ce 21 avril, la lumière fut : Netflix et MK2 ont annoncé un partenariat portant sur une sélection de films iconiques issue du catalogue de MK2. « Tout au long de l’année 2020, des chefs-d’œuvre du cinéma français et international seront proposés sur Netflix, en France, avec des films de réalisateurs tels que François Truffaut, Charlie Chaplin ou Jacques Demy », a-t-on pu lire par communiqué. Cette plate-forme, qui n’a de cesse de jouer la carte de la profusion et de l’exhaustivité, avait oublié un élément central, une condition sine qua none à son adoubement : le patrimoine.
On pourrait penser qu’à force de viser tous azimuts, Netflix n’en ressorte avec une image de marque brouillée. Il n’en est rien. Netflix, c’est ce gros « N » rouge, la consommation sérielle comme addiction, la salle de cinéma transposée dans son lit, et le siège en velours rouge prenant la forme d’un canapé avec un gros plaid. Elle est l’incarnation d’une certaine idée du « chill », de la paresse, de l’extension du domaine du divertissement. Cela n’exclut pas l’exigence, le cinéma d’auteur et la beauté désuète : sans doute cette dernière est la clé pour passer de la surconsommation aliénante à la contemplation libératrice.
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