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Mirror : Comment L’Idée Géniale De Cette Start-Up A Révolutionné Le Fitness

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Le 13 mars dernier, alors que New York se prépare à se confiner pour ralentir la propagation du Covid-19, Brynn Putnam, fondatrice de Mirror, décide de fermer les bureaux de sa start-up fitness et renvoie chez eux près de 100 salariés.

L’ancienne danseuse étoile réside à Greenwich Village avec son mari, Lowell, un entrepreneur, et leur fils George âgé de 3 ans. Le couple alterne entre les réunions Zoom et la garde de leur enfant, mais s’il y a bien une chose qui ne leur pose pas de problème, c’est de faire du sport à la maison. Brynn Putnam a ramené dans leur appartement deux exemplaires de son compagnon d’exercice Mirror, l’un dans la chambre, l’autre dans la chambre d’amis. Elle explique : « Si Lowell veut faire de la boxe, et moi du yoga, c’est possible ».

Le business du sport à la maison a été florissant pendant le confinement. Avec une capitalisation boursière de 13 milliards de dollars, l’entreprise Peloton a été la plus utilisée par les Américains ces deux derniers mois. Pour autant, l’entreprise de notre ballerine n’est pas en reste, et dispose d’un avantage sur sa concurrente : son dispositif est plus compact. Le produit de Brynn Putnam ressemble à un vrai miroir, avec 55 cm de haut, 130 cm de long et 3,5 cm de profondeur. Mais il suffit de l’allumer pour voir à côté de son reflet un professeur prêt à donner un cours de sport à distance.

Le Mirror en lui-même coûte 1 495 $, et il faut par la suite payer un abonnement mensuel de 39 $ pour accéder aux cours en direct (cardio, barre, musculation, yoga) de 15, 30 ou 60 minutes, ainsi qu’à des conseils personnalisés. Kevin Thau, associé chez Spark Capital, l’un des premiers investisseurs de Mirror, raconte : « Personne n’avait pensé à mettre un écran dans un miroir et à en faire une plateforme d’entraînement. Cela paraît évident après coup, mais ce n’était pas le cas avant ».

Les salles de sport représentent, selon l’International Health Racquet and Sportsclub Association, un business de près de 100 milliards de dollars. Lorsque Brynn Putnam a lancé son produit en septembre 2018, cinq ans après les débuts de Peloton, elle s’orientait déjà vers le sport à la maison. Désormais, alors que des millions de personnes sont enfermées chez elles et cherchent à rester en forme, les ventes de son dispositif dépassent toutes ses espérances. L’ancienne danseuse est même présente dans le classement Next Billion-Dollar Startups, qui présente les 25 entreprises les plus susceptibles de devenir des licornes selon Forbes. Elle réagit : « C’est Noël en avril ».

Si Brynn Putnam et ses équipes se gardent bien de révéler leur chiffre d’affaires, Forbes l’estime à 45 millions de dollars en 2019, et plus de 100 millions en 2020, ce que l’entrepreneure confirme. Si l’objectif principal de l’entreprise est la croissance, la jeune femme affirme qu’elle s’attend à ce que Mirror devienne rentable en début d’année prochaine.

Pour Ben Lerer, associé de l’entreprise d’investissement Lerer Hippeau : « C’est incontestablement l’une des stars les plus excitantes de notre portefeuille. Mirror peut devenir une très grosse entreprise, aussi grosse que Peloton, en très peu de temps ». À ce jour, Brynn Putnam a levé 72 millions de dollars de plusieurs sociétés d’investissement (Lerer Hippeau, Spark Capital et Point72 Ventures). La fondatrice pèse au moins 80 millions de dollars, si ce n’est plus depuis la crise du coronavirus. Son prochain défi : s’assurer que Mirror soit démocratisé même après la pandémie.

Brynn Jinnett Puntam, aujourd’hui âgée de 36 ans, est née à Manhattan d’un père avocat et d’une mère au foyer. Elle commence à prendre des cours de danse à 3 ans et rejoint la School of American Ballet à 7 ans. Ses débuts au New York City Ballet, dans Casse-Noisette, sont remarqués par le New York Times. Mais la jeune femme ne se contente pas de danser : elle étudie aussi la littérature et la culture russe à Harvard sur les conseils de son père. Après ses études, elle part sur les routes avec le Pennsylvania Ballet et Les Grands Ballets Canadiens de Montréal, et enseigne la danse classique pendant son temps libre. Lorsque Brynn Puntam prend sa retraite du monde du ballet il y a 10 ans, les studios de danse sont un marché florissant et c’est donc tout naturellement qu’elle décide d’ouvrir le sien.

À l’époque, elle a 15 000 $ d’économies en poche et arpente les rues de Manhattan à la recherche d’un local. En passant devant une église orthodoxe dans l’Upper East Side, elle entend des gens parler en russe engage la conversation avec le pasteur, qui lui apprend qu’il a un espace à louer qui pourrait lui convenir. Le seul problème : il n’y a pas assez de place pour des équipements standards, ce qui la pousse à développer avec son mari un appareil compact, muni de poulies et de bandes de résistance, afin de permettre aux clients de s’entraîner sans prendre trop de place.

Sa méthode Refine voit alors le jour, et les clients ne tarissent pas d’éloges, ce qui permet à Brynn Putnam de s’agrandir, en faisant de sa marque une chaîne. En 2016, la jeune femme est enceinte et souffre de nausées matinales, ce qui l’empêche de donner ses cours. À l’époque, la méthode cycliste Peloton explose, mais l’ancienne danseuse ne veut pas d’un vélo dans son appartement. Elle ne trouve pas non plus son bonheur dans les applications de fitness, et c’est quand qu’elle refait la décoration de ses salles de sport, en rajoutant des miroirs, que l’inspiration la frappe : « J’ai réalisé qu’une grande partie de la technologie que j’avais envisagée pouvait être placée dans un miroir ». Elle fabrique alors un prototype dans sa cuisine avec une tablette, un bout de miroir et une carte Raspberry Pi.

Une fois en possession d’un prototype suffisamment viable pour lancer un appel de fonds, la jeune femme est alors enceinte de sept mois et enchaîne les refus de la part d’investisseurs, qui luiconseillent d’attendre d’avoir accouché. D’autres entrepreneurs lui disent : « Ce que vous faites est génial, mais cela ne va pas être facile. Les investisseurs ne soutiennent que très peu les entrepreneurs seuls, et ils soutiennent encore moins des entrepreneures, qui plus est si elles sont enceintes de 7 mois ». 

Mais Brynn Putnam ne veut pas attendre et finit par clôturer son financement de départ avec Lerer Hippeau depuis son lit d’hôpital en novembre 2016, le jour de la naissance de son fils. La société de financement concède : « Il ne faut pas jouer avec Brynn. Elle est très douée pour pousser les gens à croire en sa vision et à la suivre ».

Dès lors, l’ancienne danseuse et sa petite équipe commencent à s’affairer dans la cuisine de la jeune femme pour mettre au point les programmes sportifs qui seront proposés par Mirror. Des ingénieurs se joignent également au projet. Abby Bales, coach sportif aujourd’hui conseiller chez Mirror, se souvient : « Il y avait toujours des trucs partout, des accessoires et des miroirs, différents prototypes ». Très vite, Brynn Putnam installe l’un de ses prototypes dans sa salle de sport pour avoir l’avis de ses clients les plus fidèles. Kailee Combs, aujourd’hui vice-présidente du contenu fitness de Mirror, raconte : « Il était très grand, vraiment énorme, avec beaucoup de métal, et vraiment pas facile à déplacer ».

Après deux ans de travail, en septembre 2018, la jeune entrepreneure lance son produit, désormais fabriqué au Mexique. Trois mois plus tard, alors qu’elle passe Noël en famille, elle se rappelle avoir entendu son cousin pousser un cri : « Alicia Keys avait posté une photo de mon miroir sur Instagram ». Très vite, l’objet attire de nombreuses célébrités : Reese Witherspoon, Ellen DeGeneres, Gwyneth Paltrow et Kate Hudson, entre autres. Brynn Putnam précise : « C’est le réseau qui a fonctionné. Au début, quand les commandes arrivaient, notre mâchoire en tombait tellement il y avait de célébrités ». 

La jeune femme signe alors avec des influenceurs et fait installer des panneaux d’affichage, préférant cette méthode aux publicités ciblées sur Facebook et sur Instagram, comme le font la plupart des start-ups : « Dès le début, nous savions que nous lancions un nouveau produit, mais aussi une nouvelle catégorie. Il nous fallait faire un lancement digne de ce nom ».

Depuis que Jane Fonda a sorti ses premières cassettes de cours de gym en 1982, il est devenu évident pour certains que le business du sport allait évoluer vers les foyers. La différence, c’est qu’au XXIe siècle les avancées technologiques offrent une expérience plus personnalisée. Jed Katz, directeur général chez Javelin Venture Partners, affirme : « Cette technologie a de l’avenir. Ce n’est pas juste une mode. C’est addictif, pratique et le contenu est de très bonne qualité ».

Mais pour la jeune femme, tout n’est pas si rose, car la concurrence fait rage : la société Tonal offre désormais une salle de sport intelligente à domicile, Hydrow vend des rameurs intelligents et FightCamp vend des cours de boxe et de kickboxing interactifs à domicile. Par ailleurs, les salles de sport se tournent vers le numérique depuis le début du confinement, comme L’Usine ou Fitness Park en France. La start-up Echelon propose même une alternative à Mirror, avec son miroir interactif concurrent Reflect. 

Le secret de Brynn Putnam pour rester en tête : faire de son miroir un troisième écran pour la maison, après la télévision et le smarpthone. La jeune femme a déjà ajouté des cours de méditation à son appareil, en partenariat avec Lululemon, une marque de vêtements de yoga. Elle a également lancé des séances d’entraînement personnel à 40 $ par personne, qui se déroulent à distance. Prochaine étape : des séances de physiothérapie et de rééducation. À long terme, elle envisage même de proposer Mirror pour de la télésanté et de la thérapie.

D’ailleurs, Brynn Putnam reçoit chaque jour des demandes de partenariats diverses et variées et raconte : « Pour une entreprise qui se développe si rapidement et qui a tant de potentiel, il est parfois difficile de dire non. C’est la leçon la plus importante à tirer de ces 18 derniers mois ».

 

Article traduit de Forbes US – Auteure : Amy Feldman

 

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