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Long-Story | L’art de l’investissement selon Warren Buffett : l’équilibre subtil entre analyse financière et psychologie

Warren Buffett
Le philanthrope Warren Buffett est rejoint sur scène par 24 autres philanthropes et hommes d'affaires influents figurant dans le classement Forbes des 100 plus grands esprits d'affaires, lors de la célébration du centenaire du magazine économique américain Forbes au Pier 60, le 19 septembre 2017 à New York. Getty Images

Découvrez les secrets d’investissement de Warren Buffett, une figure emblématique du monde financier, connue pour ses réalisations exceptionnelles et sa philosophie unique.

Un article de John Dobosz pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie

 

Warren Buffett, figure emblématique du monde des affaires, est largement vénéré pour ses réalisations exceptionnelles. Depuis 1965, sa société Berkshire Hathaway a surclassé de façon spectaculaire l’indice S&P 500, affichant un rendement annuel composé de 19,8 % contre 10,2 % pour l’indice de référence. Cette performance remarquable équivaut à une valeur 140 fois supérieure sur une période de 59 ans. Avec une fortune personnelle atteignant 133 milliards de dollars (123 milliards d’euros), il se classe parmi les dix personnes les plus riches de la planète. Connu pour son engagement philanthropique, Warren Buffett s’est engagé à consacrer sa richesse à des causes sociales. Son aura ne se limite pas seulement à ses réalisations financières, mais aussi à sa capacité à inspirer et à conseiller, notamment à travers ses lettres annuelles et ses réunions d’actionnaires, où il partage généreusement son expertise sur l’investissement et la vie en général.

Surnommé l’« Oracle d’Omaha » en raison de ses analyses claires sur l’investissement boursier et la gestion d’entreprise, Warren Buffett se distingue dans des domaines où beaucoup échouent en raison des émotions telles que la peur et la cupidité. Son approche est simple : trouver une entreprise solide, l’acheter et la conserver indéfiniment.

Lors de la réunion annuelle des actionnaires de Berkshire Hathaway qui s’est déroulée le week-end dernier, Warren Buffett, âgé de 93 ans, s’est retrouvé pour la première fois sans son acolyte de longue date, Charlie Munger, décédé en novembre dernier à l’âge de 99 ans. L’absence de son bras droit depuis toujours, connu pour ses répliques mordantes et ses commentaires perspicaces qui équilibraient les discours de Buffett, a été fortement ressentie. À plusieurs reprises, Buffett a semblé instinctivement se tourner vers le siège vacant à sa gauche, comme s’attendant à voir son compagnon habituel. À un moment donné, après avoir répondu à une question sur la production d’électricité dans l’Utah, il a même prononcé le nom de Charlie, réalisant ensuite que son ami n’était plus là. À la place, le siège était occupé par Greg Abel, le successeur désigné de Buffett, qui occupe le poste de président-directeur général de Berkshire Hathaway Energy et celui de vice-président des opérations hors assurance depuis 2018.

Depuis novembre 1969, date à laquelle Forbes a publié son premier portrait de Warren Buffett sous le titre « How Omaha Beats Wall Street » (que l’on pourrait traduire par : « L’ascension fulgurante d’Omaha face à Wall Street »), le magazine suit de près les performances boursières de l’investisseur légendaire. À l’époque, son Buffett Partnership gérait des actifs d’une valeur de 100 millions de dollars (92,5 millions d’euros). Aujourd’hui, sous la direction de Buffett, les actifs de Berkshire Hathaway ont dépassé la barre impressionnante des 1 000 milliards de dollars (925 milliards d’euros).

La stratégie globale de l’Oracle d’Omaha a évolué au fil des ans, en grande partie grâce aux conseils avisés de Charlie Munger. Warren Buffett a débuté sa carrière en tant qu’investisseur axé sur les actions de valeur, en suivant les principes énoncés par Graham et Dodd. Cependant, ses succès les plus récents découlent principalement de sa stratégie d’investissement dans des franchises durables, acquises à des prix raisonnables. Les positions surdimensionnées de Berkshire Hathaway dans des entreprises emblématiques telles que Coca-Cola, American Express et Apple, ainsi que dans des sociétés détenues à 100 % comme GEICO, ont été les principaux moteurs de la réussite de Berkshire en matière d’investissement au cours des six dernières décennies.

 

Les 10 principales actions de Berkshire Hathaway

Lors de la récente réunion annuelle, les remarques de Warren Buffett sur certaines de ses positions clés ont mis en lumière son utilisation de la psychologie comportementale pour orienter bon nombre de ses décisions d’investissement. Cette approche, forgée au fil des ans par son expérience, repose en grande partie sur son intuition.

L’évaluation des niveaux globaux de peur et de cupidité parmi les investisseurs a toujours joué un rôle essentiel dans la stratégie d’investissement de valeur de Berkshire Hathaway. Un exemple remarquable remonte à 1964, lorsque Buffett a investi massivement dans les actions d’American Express après qu’une filiale de l’entreprise a été impliquée dans un scandale de vente frauduleuse. La panique a fait chuter le cours de l’action d’Amex de plus de 50 %, mais elle s’est ensuite redressée de manière spectaculaire une fois la peur dissipée. Aujourd’hui, Berkshire Hathaway détient toujours des actions d’American Express d’une valeur de plus de 36 milliards de dollars (33 milliards d’euros), générant un rendement impressionnant de 25 966 % au cours des 50 dernières années.

Un autre exemple frappant de l’approche de Buffett est son investissement de 5 milliards de dollars dans Goldman Sachs au plus fort de la crise financière de 2008. Cette décision illustre sa capacité à tirer profit des réactions extrêmes des investisseurs pour réaliser des bénéfices substantiels.

Voici quelques extraits de la réunion des actionnaires de Berkshire Hathaway qui s’est tenue à Omaha en 2024. Une attention particulière est portée à la manière dont la psychologie du comportement influe fortement sur certaines des plus importantes participations de l’entreprise, telles qu’Apple, qui représente désormais 43,3 % du portefeuille d’actions de Berkshire, d’une valeur de 336,9 milliards de dollars (312 milliards d’euros).


Au fil des années, Buffett et Munger ont acquis une profonde compréhension de l’importance des préférences des consommateurs dans leurs décisions d’investissement. Buffett a souligné l’impact crucial de la psychologie en illustrant comment il a tiré parti de ces observations pour orienter ses stratégies d’investissement.

Warren Buffett : Les gens ont spéculé sur ma décision d’investir massivement dans Apple. Charlie et moi avons beaucoup appris sur le comportement des consommateurs. Notre expérience avec l’acquisition d’une chaîne de magasins de meubles à Baltimore nous a été précieuse. Bien que nous ayons rapidement réalisé que c’était une erreur, cette expérience nous a permis de mieux comprendre le processus d’allocation du capital et d’anticiper les tendances de consommation futures, que ce soit dans le secteur des grands magasins ou dans d’autres domaines auxquels nous n’avions pas nécessairement prêté attention auparavant. Ainsi, nous avons tiré une leçon précieuse sur le comportement des consommateurs, même si la gestion d’un grand magasin n’était pas notre domaine d’expertise.

Ensuite, nous avons eu l’exemple de See’s Candies, qui a également été une étude du comportement des consommateurs. Nous n’avions aucune expérience dans la fabrication de bonbons. Il y avait tant d’aspects que nous ignorions, mais nous avons continué à en apprendre davantage sur les préférences des consommateurs. Cette expérience, dans un sens plus général, a été une préparation pour notre étude ultérieure du comportement des consommateurs en ce qui concerne les produits Apple.

Je crois que les psychologues appellent cela la « masse aperceptive ». Il y a quelque chose qui rassemble toute une série d’observations que vous avez faites, ainsi que des connaissances que vous avez accumulées, et qui cristallise votre pensée en action, en une grande action dans le cas d’Apple. Je suppose que mon esprit a atteint cette masse aperceptive, dont je ne sais vraiment rien, mais je sais reconnaître le phénomène quand j’en fais l’expérience.

J’ai peut-être déjà évoqué cet exemple, mais si vous demandez à la plupart des gens, possédant à la fois un iPhone et une deuxième voiture, de choisir entre les deux, même si cette voiture leur a coûté 30 000 ou 35 000 dollars, ils choisiront généralement de conserver l’iPhone. Les gens ne pensent généralement pas à leurs achats de cette manière, mais je suis attentif à leur comportement ; nous prenons souvent des décisions sans même en être conscients. Il y a peut-être un petit génie à l’intérieur de l’iPhone ou quelque chose comme ça. Je n’ai aucune idée de son fonctionnement précis, mais je comprends son importance. Je sais ce que cela représente pour les gens, comment ils l’utilisent, et je pense avoir suffisamment de connaissances sur le comportement des consommateurs pour reconnaître qu’il s’agit de l’un des meilleurs produits, voire le meilleur produit de tous les temps.

Je l’ai constaté avec GEICO lorsque je m’y suis rendu en 1950. Je n’avais pas une compréhension claire de ce que je voyais, mais le PDG de GEICO, Lorimer Davidson, a pris le temps de m’expliquer les tenants et aboutissants de l’assurance automobile en seulement quatre heures un samedi. J’avais déjà une bonne compréhension des voitures et des motivations des consommateurs. Je percevais que souscrire une assurance ne suscitait guère d’enthousiasme chez les gens, mais j’étais aussi conscient de sa nécessité. C’était assez révélateur. Davidson a réussi à combler toutes les lacunes de mes connaissances lors de cette après-midi. Lorsque vous pouvez proposer un produit de qualité, à moindre coût que la concurrence, et qui est indispensable pour tout le monde, cela devient très intéressant de s’y investir.

Aucune entreprise ne fait autant d’affaires dans le monde que Coca-Cola. Elle est la boisson non alcoolisée préférée dans quelque 170 ou 180 pays sur 200. Bien que ces chiffres datent de quelques années et soient des estimations approximatives, le niveau d’acceptation mondiale est tout simplement remarquable.


Becky Quick, de CNBC, a souligné lors du récent rapport trimestriel de Berkshire que la société avait vendu 115 millions d’actions Apple. Elle a ensuite relayé la question d’un actionnaire malaisien âgé de 27 ans : « L’année dernière, vous avez mentionné Coca-Cola et American Express comme étant les deux participations partielles à long terme de Berkshire, et vous avez passé du temps à parler des vertus de ces deux merveilleuses entreprises. Dans votre récente lettre aux actionnaires, j’ai remarqué que vous avez exclu Apple de ce groupe d’entreprises. Est-ce que votre point de vue ou celui de votre gestionnaire d’investissement sur les aspects économiques de l’activité d’Apple ou sur son attrait en tant qu’investissement a changé depuis que Berkshire a investi pour la première fois en 2016 ? »

Warren Buffett : Non, mais nous avons vendu des actions, et je pense qu’à la fin de l’année, il est très probable qu’Apple soit notre plus grande participation. Charlie et moi considérons les actions ordinaires comme des entreprises. Ainsi, lorsque nous avons une participation dans une société comme Dairy Queen, nous la considérons comme une entreprise. De même, lorsque nous détenons des actions de Coca-Cola ou d’American Express, nous les percevons comme des entreprises à part entière.

Il y a certes des différences au niveau des impôts et divers autres aspects, mais en ce qui concerne l’investissement de votre argent, nous considérons toujours chaque action comme une entreprise. Nous n’avons aucun moyen de prédire les marchés, et nous n’essayons pas de le faire.

Depuis mes débuts, j’ai été fasciné par les actions et j’ai rapidement plongé dans leur étude. Je n’ai pas hésité à investir mon temps dans la lecture de tous les livres disponibles et de tout ce que je pouvais trouver sur le sujet.

J’ai acheté un exemplaire de L’investisseur intelligent à Lincoln, dans le Nebraska, qui disait, de manière bien plus éloquente que je ne saurais le faire : Si vous considérez les actions comme une activité commerciale et que vous traitez le marché comme quelque chose qui n’est pas là pour vous instruire, mais pour vous servir, vous obtiendrez de bien meilleurs résultats au fil du temps que si vous essayez de prendre des graphiques et d’écouter les gens parler de moyennes mobiles et d’examiner les déclarations et tout ce genre de choses. Cela m’a semblé très logique à l’époque, et même si ma perspective a évolué au fil des ans, le principe de base a été énoncé par Benjamin Graham dans ce livre que j’ai acquis pour quelques dollars. Par la suite, Charlie a apporté son expertise pour optimiser son utilisation, ce qui a en partie motivé notre choix de détenir des parts d’entreprises aussi remarquables qu’American Express, Coca-Cola et Apple.

À moins que quelque chose de vraiment extraordinaire ne se produise, nous posséderons Apple, American Express et Coca-Cola lorsque Greg Abel, vice-président de Berkshire Hathaway, prendra les rênes de l’entreprise. Apple deviendra notre principal investissement, mais dans les conditions actuelles, je ne vois aucun inconvénient à maintenir une position de trésorerie. Lorsque je considère les alternatives disponibles, comme les marchés boursiers, et que j’examine la situation mondiale, je trouve cela très attrayant.


Buffett a ajouté que la réduction de la participation de Berkshire dans Apple était en partie motivée par ce qu’il considère comme des taux d’imposition sur les sociétés historiquement bas.

Warren Buffett : La plupart des personnes que je connais accordent une grande importance à l’optimisation fiscale, et je pense que c’est une pratique justifiée, mais chez Berkshire, nous ne sommes pas réticents à payer nos impôts. Nous payons actuellement un taux fédéral de 21 % sur les bénéfices que nous réalisons grâce à Apple. Ce taux était de 35 % il n’y a pas si longtemps, et il a atteint 52 % dans le passé, lorsque je débutais. Le gouvernement fédéral a une part des bénéfices que nous générons. Bien qu’il ne détienne pas les actifs, il perçoit un pourcentage des bénéfices, et ce pourcentage peut être modifié chaque année. Actuellement, ce taux est fixé à 21 %. »

Je dirais qu’avec les politiques fiscales actuelles, il est nécessaire de faire des concessions, et je pense qu’une augmentation des impôts est tout à fait probable. Si le gouvernement souhaite prélever une part plus importante de revenu des Américains, du mien ou de celui de Berkshire, il en a le pouvoir, et il peut décider à tout moment de réduire le déficit fiscal, car cela a des répercussions significatives. Il pourrait décider de prélever un pourcentage plus élevé de nos revenus, et nous devrons nous y conformer.

Chez Berkshire Hathaway, nous maintenons notre engagement à verser un impôt fédéral sur le revenu substantiel. Nous considérons cette contribution comme appropriée. L’année dernière, nous avons envoyé plus de 5 milliards de dollars au gouvernement fédéral américain. Si 800 autres entreprises avaient suivi notre exemple, aucune autre entreprise aux États-Unis n’aurait eu à payer un centime d’impôt fédéral, qu’il s’agisse d’impôt sur le revenu, de sécurité sociale ou de successions. Je ne ressens aucune gêne à rédiger ce chèque. En considération de tout ce que l’Amérique a accompli pour nous tous, j’espère sincèrement que cela ne dérange pas non plus les autres. Que nous le fassions à un taux de 21 % cette année ou à un taux plus élevé ultérieurement, je ne pense pas que la vente de certaines parts d’Apple cette année dérange.


Berkshire Hathaway détient 189 milliards de dollars (175 milliards d’euros) en liquidités et en titres à court terme qui pourraient être investis en actions. Nous avons donc interrogé Buffett sur la raison pour laquelle il n’avait pas investi cette énorme réserve de capitaux dans l’achat d’actions.

Warren Buffett : Je doute que quiconque assis à cette table ait la moindre idée de comment l’utiliser efficacement. Par conséquent, nous n’avons pas recours à ces fonds. Même si le taux du Trésor à court terme était de 5,4 % aujourd’hui, nous ne l’utiliserions pas, et nous ne l’utiliserions pas non plus s’il était à 1 %. Ne dites pas cela à la Réserve fédérale.

Nous ne poursuivons que les opportunités qui nous semblent prometteuses. Certes, dans des pays comme le Japon, une entreprise réalisant un chiffre d’affaires de 30 ou 40 milliards de dollars aurait généré d’excellents rendements des capitaux propres. Si une telle opportunité se présentait aujourd’hui, nous l’envisagerions pour Berkshire Hathaway. Je tiens à souligner que je ne suis pas en train de mener une quelconque grève de la faim ni rien de semblable. Simplement, les opportunités ne sont pas suffisamment attrayantes pour le moment. Nous étudions néanmoins divers moyens pour améliorer la situation, et nous verrons comment les choses évoluent.


Le marché boursier chinois est en contraction. Au cours des trois dernières années, l’indice FTSE China A50 a enregistré un rendement de -36 %. Interrogé sur sa volonté d’investir dans des entreprises basées en Chine et à Hong Kong, Buffett a affirmé sa conviction que les entreprises américaines offrent une exposition internationale suffisante.

Warren Buffett : Nos principaux investissements se feront toujours aux États-Unis. American Express fait des affaires dans le monde entier, et aucune entreprise ne fait des affaires dans le monde comme Coca-Cola. Je pense que son taux d’adoption à l’échelle mondiale est presque inégalé.

Il y a cinq ans, nous avons pris un engagement au Japon, et cela s’est révélé extrêmement convaincant. [En 2020, Berkshire a révélé qu’elle détenait des participations dans cinq grandes sociétés commerciales japonaises : Sumitomo, Mitsubishi, Mitsui, Itochu et Marubeni]. Nous avons rapidement investi dans ces entreprises. Au cours d’une année, nous avons réussi à obtenir quelques pour cent de nos actifs dans ces cinq grandes entreprises. Cependant, vous ne nous verrez pas réaliser beaucoup d’autres investissements en dehors des États-Unis, même si nous participons à l’économie mondiale grâce à ces investissements.

Je comprends les règles, les forces et les faiblesses des États-Unis, quelles qu’elles soient. Je n’ai pas le même sentiment pour les économies du monde entier. Je ne saisis pas très bien les autres cultures et, heureusement, je n’ai pas à le faire, car je ne vis pas dans un tout petit pays qui n’a pas une grande économie. Je suis dans une économie qui, après avoir démarré avec un demi pour cent de la population mondiale, a fini par représenter plus de 20 % de la production mondiale dans un laps de temps étonnamment court.

Notre focus reste sur les États-Unis. Si nous entreprenons quelque chose d’impactant, il est probable que cela se fasse ici. Je reste informé des développements sur la plupart des marchés, mais il est peu probable que nous nous engagions de manière significative dans presque tous les pays que vous pourriez mentionner, même si nous ne fermons pas la porte à cette possibilité. Notre position au Japon nous satisfait pleinement, mais nous considérons que les risques de commettre des erreurs majeures sont bien plus faibles aux États-Unis que dans de nombreux autres pays.


Warren Buffett a été interrogé sur l’impact de l’émergence de l’intelligence artificielle (IA) générative sur le monde de l’investissement et sur la vie humaine en général. Il a comparé l’IA au développement de la bombe atomique.

Warren Buffett : Je suis peu familier avec l’IA, mais cela ne signifie pas que je nie son existence ou son importance. L’année dernière, j’ai comparé le développement de l’IA au fait de libérer un génie de la bouteille avec les armes nucléaires, et nous en voyons maintenant les conséquences. Le pouvoir de l’IA est ce qui me préoccupe le plus, et je ne sais pas comment le maîtriser. L’IA est maintenant en marche, et elle continuera d’être développée. Nous pouvons aspirer à des merveilles, ou bien regretter d’avoir ouvert cette boîte de Pandore. Je ne suis pas la personne qualifiée pour évaluer son potentiel, tout comme je n’aurais pas été qualifié pendant la Seconde Guerre mondiale pour juger de l’utilisation des armes nucléaires. Nous avons choisi de libérer ce génie de la bouteille pour atteindre un objectif immédiat, mais son impact sur l’avenir de la société demeure incertain.

En ce qui concerne l’IA, une expérience récente m’a mis mal à l’aise. J’ai vu une image de moi-même à l’écran, parfaitement reproduite jusqu’à ma voix et mes vêtements, mais délivrant un message qui ne venait pas de moi. Cela soulève des inquiétudes sur le potentiel d’escroquerie, avec la capacité de créer des scénarios crédibles pour extorquer de l’argent. L’escroquerie a toujours été présente, mais l’IA ouvre de nouvelles voies pour les fraudeurs. Bien sûr, l’IA a également des applications positives, mais je ne suis pas certain de la manière dont le monde va gérer ces avancées, tout comme nous n’avons pas su gérer le génie nucléaire. Je reconnais son énorme potentiel, qu’il soit bénéfique ou malveillant, mais je suis incertain quant à son évolution.


Warren Buffett a rarement montré autant d’émotion que lorsqu’un jeune actionnaire lui a demandé : « Si vous aviez un jour de plus avec Charlie, que feriez-vous avec lui ? »

Warren Buffett : C’est curieux parce qu’en réalité, j’ai eu un jour de plus. Je veux dire, ce n’était pas une journée entière, mais nous avons toujours vécu de manière à être satisfaits de ce que nous faisions chaque jour. Charlie aimait apprendre. Il s’intéressait à une grande variété de sujets, bien plus que moi. Il avait une vision plus large, tandis que je préférais me concentrer sur certains domaines.

Nous nous amusions beaucoup ensemble, que ce soit au golf, au tennis ou peu importe l’activité. Nous faisions tout ensemble. Vous trouverez peut-être cela intéressant, mais paradoxalement, nous avons souvent trouvé plus de satisfaction dans les échecs que dans les succès, car cela nous obligeait à travailler dur pour trouver des solutions. Avoir un partenaire pour surmonter les difficultés était souvent plus gratifiant que de voir une idée rentable évoluer au fil du temps.

Il a vraiment fait preuve de ténacité. Il a vécu jusqu’à 99,9 ans. C’est remarquable quand on pense à sa philosophie de vie. Il a publiquement avoué n’avoir jamais pratiqué volontairement d’exercice physique au cours de sa vie, sauf pendant son service militaire. Il ne surveillait pas son alimentation non plus. Bien que Charlie ait eu des intérêts plus divers que moi, notre confiance mutuelle était inébranlable. Si nous avions eu un jour de plus ensemble, je suis convaincu que nous aurions simplement répété ce que nous avions fait les jours précédents, sans aucun regret.

Il y a un grand avantage à ne pas savoir où l’on va, ni quel jour on va mourir, et Charlie disait toujours : « Dites-moi où je vais mourir pour que je n’y aille jamais ». En réalité, son esprit était partout, ce qui lui permettait non seulement de rester passionné par le monde à 99 ans, mais aussi de susciter l’intérêt du monde entier pour lui. Tout le monde voulait rencontrer Charlie, et il était toujours heureux de discuter avec eux. La seule autre personne à laquelle je puisse penser est le Dalaï Lama. Je ne sais pas s’ils avaient beaucoup d’autres choses en commun, mais Charlie a vécu sa vie comme il l’entendait, et il a pu partager ses idées librement. Il prenait plaisir à s’exprimer devant un public.

Je ne me souviens pas qu’il ait été en colère contre moi ou que je l’aie été contre lui, il n’y a jamais eu une seule dispute entre nous C’était toujours plaisant de l’appeler, surtout à une époque où les tarifs des appels longue distance étaient élevés. Nous avions l’habitude d’échanger quotidiennement pendant de longues périodes. Nous avons continué à apprendre et nous aimions apprendre ensemble. Avec le temps, nos expériences et nos erreurs nous ont permis de progresser et d’acquérir de nouvelles connaissances. Notre complicité dans ce domaine faisait que le monde restait toujours passionnant pour nous, même à 99 ans pour lui et à 93 ans pour moi.

Lors de ces réunions, on nous demandait parfois, à Charlie ou à moi, avec qui nous aimerions déjeuner parmi les personnes ayant vécu au cours des 2 000 dernières années. Charlie répondait qu’il les avait déjà toutes rencontrées, car il avait lu tous les livres. Pour lui, pas besoin d’aller au restaurant pour rencontrer ces figures historiques ; il leur avait déjà rendu visite à travers ses lectures. Il avait rencontré Benjamin Franklin en lisant simplement un livre, sans avoir besoin de le rencontrer en personne.

C’est une question intéressante. Ce que vous devriez probablement vous demander, c’est avec qui vous aimeriez passer le dernier jour de votre vie ? Cherchez dès maintenant à rencontrer ceux que vous aimeriez avoir près de vous. Et ne vous préoccupez pas de l’avis des autres.


Warren Buffett a généré d’énormes richesses pour lui-même et les actionnaires de Berkshire Hathaway. Il s’est engagé à léguer sa fortune à des œuvres caritatives et a facilité les donations importantes de ses investisseurs à des causes qu’ils soutiennent. Par exemple, le Dr Ruth Gottesman a utilisé 1 milliard de dollars d’actions Berkshire pour permettre à l’Albert Einstein College of Medicine d’offrir la gratuité des frais de scolarité à perpétuité.

Warren Buffett : Le geste philanthropique du Dr Ruth Gottesman, qui a donné un milliard de dollars à l’Albert Einstein College of Medicine, représente le prototype de nombreux actionnaires de Berkshire Hathaway. C’est la raison pour laquelle Charlie et moi avons tant apprécié notre rôle de dirigeants chez Berkshire.

Il existe de nombreuses entreprises publiques riches à travers l’Amérique, et dans certains cas, des individus ou des familles consacrent une grande partie de leur richesse à la philanthropie, comme la famille Walton chez Walmart et Bill Gates chez Microsoft. Ce qui distingue Berkshire, c’est le grand nombre d’actionnaires qui, à travers les États-Unis, ont contribué à des œuvres caritatives locales pour des montants de 100 millions de dollars ou plus, souvent de manière discrète. Il s’agit d’un niveau de générosité sans précédent dans le monde des entreprises publiques.

Il est rare de trouver une entreprise où un groupe d’actionnaires sans lien de parenté agit comme Ruth il y a quelques semaines. En échangeant simplement des titres détenus depuis des décennies, alors qu’ils ont déjà une vie bien remplie, ces actionnaires n’ont pas seulement pris soin de leur famille, mais ont aussi fait preuve d’une générosité remarquable envers la société. Beaucoup d’entre eux choisissent même de rester anonymes dans leurs actions philanthropiques, dans de nombreux États.

Nous avons accueilli un très grand nombre de personnes, dont beaucoup sont issues de familles arrivées tôt dans notre histoire. Elles ont mené une vie confortable, possédant des propriétés secondaires et étant bien intégrées dans la communauté. Cependant, elles ont toujours fait preuve de sagesse financière en utilisant judicieusement leurs réalisations et leurs économies. Leur approche était de ne pas se priver de la jouissance des fruits de leur travail, mais plutôt de considérer l’épargne comme une forme de consommation différée.

C’est une véritable source d’inspiration de voir comment les gens peuvent différer leur propre consommation pendant des décennies au sein de leur famille pour ensuite agir de manière altruiste. Cela offre à 150 personnes la possibilité de transformer leur vie, permettant à des individus talentueux et variés de réaliser leur aspiration de devenir médecin sans se retrouver écrasés par des dettes insurmontables. Votre groupe d’actionnaires est véritablement unique parmi les entreprises publiques, grâce à votre capacité à différer votre propre consommation tout en vivant confortablement afin d’aider les autres. Bien que cela prenne du temps, cela peut avoir un impact significatif. Ce que Ruth a accompli en utilisant simplement ce petit bout de papier pour offrir un avenir meilleur à un flux continu de personnes pendant des décennies est véritablement remarquable.


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