L’Irak prévoit de commander à la France environ 14 Rafale Dassault F4, mais pourquoi cet appareil en particulier et quel rôle Bagdad envisage-t-il de leur confier ?
L’accord a fuité pour la première en février dernier : Bagdad prévoirait de verser 240 millions de dollars en pétrole pour s’offrir ces avions de combat. Cependant, aucun autre détail sur la transaction n’est sorti dans la presse.
L’on ignore si l’Irak souhaite acquérir la dernière génération de Rafale (F4) ou si l’accord portera sur des Rafale F3. L’on ignore également si ces avions de combat seront neufs, d’occasion ou, comme ce fut le cas pour la Grèce, une combinaison des deux.
Il n’est pas non plus évident de déterminer pourquoi l’Irak veut ces avions de combat. Après tout, le pays possède déjà 34 Falcon F-16C et F-16D Block 52.
Pour l’heure, et très probablement dans un avenir proche, l’armée de l’air irakienne continuera à cibler les vestiges de l’État islamique (Daech) dans tout le pays. Pour ce faire, l’Irak a besoin d’avions à turbopropulsion supplémentaires afin d’améliorer ses capacités limitées en matière de renseignement, surveillance et reconnaissance (ISR), ainsi que de drones armés à moindre coût, mais efficaces.
Ainsi, l’Irak pourrait se procurer une flotte modeste de Rafale pour servir principalement d’intercepteurs ou simplement pour avoir un fournisseur d’avions de combat autre que les États-Unis.
La France se montrera certainement disposée à vendre ces appareils. En effet, Paris a vendu à Bagdad une importante flotte de Mirage Dassault F1 dans les années 1970 et 1980. En 2011, bien après la destruction de l’ensemble de ces Mirage et la chute du régime de Saddam Hussein, la France a proposé à l’Irak 18 Mirage F1 modernisés pour un milliard de dollars.
Néanmoins, certains pays ne verraient pas d’un très bon œil l’arrivée en Irak de Rafale armés de missiles air-air Meteor à longue portée.
La principale raison pour laquelle l’Irak chercherait à utiliser des Rafale comme intercepteurs plutôt que des F-16 est que ces derniers ne sont armés que de missiles air-air à courte portée AIM-7 Sparrow et AIM-9, et non de missiles AIM-120 AMRAAM dont la portée est comparable à celle du missile Meteor. Cela place donc les F-16 irakiens dans la même catégorie que leurs homologues égyptiens.
Les États-Unis, et surtout Israël, pourraient s’opposer à ce que l’Irak obtienne des Rafale équipés de missiles Meteor.
Israël aurait mené une série de frappes contre des cibles appartenant à des milices soutenues par l’Iran en Irak tout au long de l’été 2019. En outre, les avions israéliens utilisent l’espace irakien lorsqu’ils ciblent des milices soutenues par l’Iran à la frontière orientale de la Syrie.
Ainsi, les Rafale irakiens pourraient potentiellement interférer avec ces opérations, surtout si un gouvernement davantage pro-iranien arrive au pouvoir à Bagdad.
La Turquie pourrait également s’opposer à un tel accord, car les Rafale français pourraient permettre à l’Irak d’intercepter les F-16 ou les drones turcs ciblant régulièrement le groupe du Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK) au Kurdistan irakien. Par ailleurs, un Mirage irakien a abattu un F-100F Super Sabre turc après qu’il a violé l’espace aérien irakien le 14 septembre 1983.
Il existe un précédent. Lorsque la France a accepté de vendre des Rafale à l’Égypte dans les années 2010, les États-Unis et Israël ont fait pression pour que Paris revoie à la baisse le nombre de missiles air-air qu’elle vendrait au Caire, insistant pour que la France n’offre à l’Égypte que le missile MICA à courte/moyenne portée. Ainsi, les États-Unis et Israël pourraient à nouveau faire pression sur la France dans le cadre de l’accord avec l’Irak.
Si Bagdad souhaite que le Rafale serve principalement, voire exclusivement, d’intercepteur, il s’agirait d’une rupture avec sa décision historique d’acquérir des Mirage F1.
Les Irakiens ont insisté dès le départ sur le fait qu’ils voulaient que le Mirage soit un chasseur multirôle capable d’accomplir toute une série de tâches allant du combat contre les F-14A Tomcats iraniens aux attaques au sol en passant par des missions anti-navires.
Le Rafale avec un avion de combat multirôle bien plus sophistiqué que le Mirage. Il dispose d’une gamme d’armements et de systèmes qui en font une plateforme efficace pour diverses missions sur le champ de bataille moderne dans un avenir proche.
C’est certainement pour cette seule et unique raison, plus générale et plus directe, que Bagdad veut se procurer plusieurs Rafale pour renforcer sa force aérienne.
Article traduit de Forbes US – Auteur : Paul Iddon
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