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Les succès commerciaux dans les pays émergents passent par l’implication des populations locales

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Les femmes échappent à leurs maris tandis qu'elles vont chercher l'eau

Les succès commerciaux dans les pays en voie de développement reposent sur l’implication des populations locales. Le pire comme le meilleur en découle. Deux cas d’écoles mis dos à dos permettent de s’en convaincre.

 

Les pays émergents sont régulièrement le théâtre des pires et des meilleures tentatives visant à les mettre sur la voie du progrès. Celles-ci émanent le plus souvent d’entreprises étrangères intervenant généralement avec le soutien d’un Etat ou dans le cadre de coopérations internationales. L’histoire récente a montré combien il était fondamental d’impliquer les populations locales pour s’assurer de la réussite de ce type d’initiatives. Le cas d’échec d’un vaste projet destiné à alimenter en eau potable des villages africains et le succès du cinquième fabriquant mondial de jeans Arvind Mills en Inde, illustrent ce prérequis. Leurs successeurs sauront ils en tirer le leçons ?

 

L’eau potable, un cadeau empoisonné à l’Afrique ?

Le Global Water Trust (GWT) est une sorte de coalition internationale mobilisant des acteurs du monde de la finance, des grandes organisations philanthropiques, de la technologie, des ONG, des médias, des affaires, des gouvernements et de la société civile. Le GWT organise, génère et déploie les ressources essentielles et nécessaires à la lutte contre la crise mondiale de l’eau. Sans eau potable, les enfants continueront de mourir au rythme de 10 000 par jour, les économies des pays en développement s’effondreront ou ne décolleront jamais, les coûts des soins de santé monteront en flèche, les espoirs de rejoindre l’économie mondiale disparaîtront, les programmes de lutte contre le sida échoueront et des guerres sanglantes éclateront, affirme le site de cette coalition.

Rob Kramer, son président aime à rappeler un épisode assourdissant de l’aide des pays en voie de développement. En Afrique, un village en manque d’eau s’était vue doté d’un système d’alimentation en eau potable particulièrement imposant et coûteux. Son installation permettait entre autre d’éviter aux femmes du village de marché quatre heures par jour pour aller chercher de l’eau, parfois en portant un nouveau né sur leur dos, le plus souvent sous une chaleur épouvantable.

Qu’elle ne fut pas la surprise des parties-prenantes du vaste projet de voir les tuyaux qui alimentaient le village en eau, régulièrement vandalisés. Les conclusions de l’enquête édifièrent tout le monde. Les femmes du villages elles-mêmes sabotaient les tuyaux afin de conserver ces moments, certes pénibles, mais qui leurs permettaient d’échapper à leurs maris, de parler entre femmes, d’être de bonnes filles allant chercher de l’eau pour leur vielles mères qui l’avaient fait pour elles lorsqu’elles n’étaient qu’enfants, etc.

 

Les jeans Ruf & Tuf se taille une place en Inde

A l’extrême opposé, des entreprises sont parvenus à proliférer dans des régions pauvres en s’acclimatant aux uses et coutumes locales.

Arvind Mills, le cinquième fabriquant mondial de jeans a longtemps cherché à pénétrer le marché indien. Des pantalons dont le prix oscillaient entre 40 $ et 60 $ étaient bien trop chers, quant aux réseaux de distribution locale, ils étaient loin de permettre d’atteindre les villages dans un pays où la population rurale est encore très importante.

A l’instar d’IKEA, Arvind Mills lança la marque Ruf & Tuf composé de jean à monter soi-même, chaque kit comprenant de la toile de jean, une fermeture éclair, un bouton, des rivets, du fil et des patchs. Le tout pour 6 $. Les kits furent alors distribués via les nombreux tailleurs des villages qui virent leur intérêts à distribuer ces produits en pièces détachées que les villageois n’auraient ni le temps, ni l’envie, de monter eux-mêmes. Ruf & Tuf est désormais la marque de jeans la plus vendue en Inde, dépassant Levi’s et toutes les autres marques.

 

Quels enseignements tirés pour les prochaines tentatives

Plusieurs leçons peuvent être tirées des deux cas d’écoles précédents.

Tout d’abord, que l’ancien patron de General Motor avait tord lorsqu’il affirmait « Ce qui est bon pour General Motor est bon pour l’Amérique », tout comme les américains ont tord de penser que « Ce qui est bon pour les Etats-Unis » est bon pour le reste du monde. Le monde s’est globalisé, mais il n’est pas plat et encore moins lisse. Des particularités régionales résisteront toujours à une pensée unique, la plus bienveillante soit-elle.

Ensuite, qu’il est vain de vouloir en lieu et place des autres. Chaque peuple, chaque groupe humain, même ramené à sa plus simple expression de segments de marché, de typologie de clients, de tribus d’utilisateurs, a, doit avoir, et aura une destinée qu’il aura choisie. Si l’on peut se mettre dans les chaussures d’un autre, on ne peut pas mettre un pied devant l’autre à sa place.

Enfin, que toute solution n’est peut-être que transitoire. Les premiers tuyaux qui alimentaient en eau les villes américaines étaient en bois (il y en a encore d’ailleurs à Philadelphie). Le réseau téléphonique était il y a encore peu de temps en fils de cuivres et à présent un réseau 3G, 4G, 5G… Ce que nous pensons être une solution, une idée, une technologie de pointe, sera peut-être obsolète demain.

Pour terminer, ce sont parfois les initiatives d’acteurs privés animés par des motivations plus mercantiles que philanthropiques qui drainent le progrès. L’histoire économique récente est remplie d’exemples qui l’attestent.

 

Pendant ce temps là, loin en Afrique, des femmes marchent d’un pas éternel en portant sur leurs têtes de lourdes jarres remplies d’eau, sans jamais les faire tomber. Gardant précieusement le secret de leur technique qu’aucune multinational ne parviendra jamais à découvrir, pour mieux le décomposer avant de le revendre en kit.

 

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