La plateforme d’hébergement de vidéos a annoncé jeudi une étape importante pour YouTube Premium et YouTube Music, les services payants d’accès sans publicité et de streaming musical de la société détenue par Google : 100 millions d’abonnés au total.
Un article de Richard Nieva pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie
Le nombre d’abonnés est encore faible par rapport aux 2,5 milliards d’utilisateurs de YouTube, mais Neal Mohan, PDG de YouTube, a déclaré à Forbes que l’activité d’abonnement du site faisait partie d’un plan de « croissance à deux moteurs » avec son activité publicitaire.
« Nous sommes évidemment une entreprise soutenue par la publicité », a-t-il déclaré. « Mais nous avons également travaillé très dur pour développer une activité d’abonnement. Il s’agit d’une part importante de notre activité à l’heure actuelle. »
Le fait d’atteindre les trois chiffres signifie que l’activité d’abonnement de l’entreprise rattrape lentement un certain nombre de rivaux bien établis. Amazon Prime, sans doute l’étalon-or des offres d’abonnement numérique, aurait compté plus de 200 millions d’abonnés l’année dernière, tandis que Spotify Premium compte 226 millions d’abonnés. (Les 100 millions d’abonnés de YouTube Premium comprennent également les personnes qui bénéficient actuellement d’un mois d’essai gratuit, a indiqué la société, mais YouTube a refusé d’en préciser le nombre).
Le service Premium, qui coûte 12,99 euros par mois et a été lancé en 2015, comprend l’accès à YouTube Music Premium (qui coûte 10,99 euros par mois) et des fonctions spéciales, comme la possibilité de télécharger des vidéos pour les visionner hors ligne. Les utilisateurs Premium ont également accès aux premières fonctionnalités expérimentales de YouTube, comme un outil d’intelligence artificielle testé par la société l’année dernière, qui utilise l’IA générative pour permettre aux internautes de poser des questions sur une vidéo.
YouTube Music (qui a une version payante sans publicité) a été lancé dans le cadre de YouTube Premium il y a neuf ans pour concurrencer le géant du streaming musical Spotify et Apple Music, qui était alors en plein essor. Trois ans plus tard, YouTube a permis aux utilisateurs de s’abonner à YouTube Music Premium de manière autonome, séparément de l’offre premium plus large de la société.
Lors d’une conférence téléphonique sur les résultats en début de semaine, Sundar Pichai, PDG d’Alphabet, a déclaré que le pool de services d’abonnement de Google avait généré un chiffre d’affaires combiné de 15 milliards de dollars (13,7 milliards d’euros) l’année dernière. Cela comprend YouTube Premium et Music ; YouTube TV, et Google One, un plan d’abonnement pour un stockage supplémentaire pour les applications Google telles que Gmail et Drive. « YouTube est le principal moteur de nos revenus d’abonnement », a déclaré M. Pichai lors de la conférence téléphonique. « YouTube Music et Premium ont le vent en poupe. »
On ne sait pas exactement combien de revenus Premium et Music génèrent par an, étant donné que ce chiffre de 100 millions inclut les essais gratuits et que M. Mohan a refusé de donner plus de détails. En dehors des abonnements, YouTube a généré 9,2 milliards de dollars (8,4 milliards d’euros) au quatrième trimestre, soit une hausse de 15,5 % par rapport à l’année précédente.
YouTube n’a pas ménagé ses efforts pour augmenter ses chiffres. L’entreprise commercialise agressivement son service au moyen d’une publicité contextuelle située dans le coin des pages de visionnage, masquant parfois partiellement l’écran et le titre de la vidéo, et offrant un mois d’essai gratuit. Ces publicités sont si fréquentes qu’elles sont devenues des mèmes.
M. Smith a déclaré à Forbes qu’il était au courant de l’existence de ces mèmes. « Nous mesurons clairement l’impact de ce type d’affichage », a-t-il déclaré. « Depuis un an ou deux, ce phénomène s’est atténué parce que nous comprenons mieux qui sont les utilisateurs qui ne sont vraiment pas intéressés par un abonnement, et contre lesquels nous ne devrions donc plus faire de marketing actif. »
Le point de départ de YouTube
YouTube Premium a connu un parcours sinueux. La plateforme a fait ses débuts il y a neuf ans sous le nom de YouTube Red, un service d’abonnement qui offrait une multitude d’avantages. Outre la musique, l’une des principales caractéristiques était l’accès à YouTube Originals, une série d’émissions et de films produits par des professionnels que YouTube distribuait pour concurrencer Netflix et Amazon Prime Video. Parmi les titres : Cobra Kai, la série dérivée de Karate Kid (qui a finalement été transférée sur Netflix) et Step Up : High Water, une série basée sur le film de danse hip hop (qui a été reprise par Starz, une chaîne de télévision américaine payante, avant d’être annulée en 2022). Mais trois ans plus tard, YouTube a fermé sa division de programmation Originals.
« Il s’agit en fait de l’évolution de notre produit », a déclaré M. Mohan à propos de l’abandon de YouTube Originals, en soulignant que les gens voulaient simplement voir le contenu traditionnel de YouTube réalisé par des créateurs. « Dans leur esprit, c’est le contenu pour lequel ils utilisent YouTube… C’est donc sur celui-ci que nous avons décidé de nous concentrer. »
La plateforme a également indiqué qu’elle versait aux créateurs une partie des revenus générés par les abonnements, mais n’a pas voulu donner de détails sur le fonctionnement de cette répartition.
L’étape de l’abonnement intervient alors que le modèle économique de la publicité, dont dépendent de nombreuses grandes plateformes, continue de faire l’objet d’un examen minutieux. Google devrait faire l’objet, dans le courant de l’année, d’un vaste procès antitrust portant sur sa technologie publicitaire et sur la question de savoir si le géant de la recherche a évincé la concurrence avec ses services d’enchères publicitaires. Le modèle publicitaire a également été accusé d’être à l’origine des plus grands maux de l’internet moderne, en favorisant un système où les yeux et les clics mènent aux revenus, ce qui encourage les contenus extrémistes et la désinformation.
« Dans un monde où la publicité est reine en interne, comment démontrer que l’on peut construire une entreprise qui répond, avant tout, aux besoins de nos utilisateurs ? », se questionne Adam Smith, vice-président de YouTube. « Au sein de YouTube, le service sans publicité n’a pas toujours été facile à vendre. Beaucoup étaient sceptiques et pensaient que le service nuirait aux relations de YouTube avec les annonceurs, qui craignaient d’être évincés au profit d’un autre modèle », poursuit-il.
Un nouveau type d’abonnement
Le vice-président de YouTube a indiqué que l’entreprise prévoyait de créer un autre niveau d’abonnement Premium qui se concentrerait principalement sur la fonction sans publicité. L’abonnement serait moins cher et n’inclurait pas d’autres avantages comme YouTube Music.
M. Mohan, qui est devenu le PDG de YouTube après le départ de Susan Wojcicki, cadre chevronnée de Google, l’année dernière, est profondément ancré dans le monde de la publicité. Il a rejoint Google en 2007 après avoir acquis DoubleClick, une startup spécialisée dans le ciblage comportemental sur Internet, qui a contribué à établir l’importante activité publicitaire du géant de la technologie.
Il peut donc être surprenant de constater à quel point il s’est engagé en faveur d’un produit sans publicité. « C’est un sujet sur lequel nous avons travaillé très, très dur », a déclaré M. Mohan. « Il s’agit vraiment de permettre au public de choisir la manière dont il souhaite utiliser YouTube. »
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