Grâce au confinement, les marques de restaurants virtuels cartonnent sur les plateformes de livraison de repas à domicile comme Uber Eats ou Deliveroo. Analyse d’un phénomène en passe de devenir une tendance de fond.
Et si on se commandait un petit burger chez Saint-Burger, du poulet grillé chez Braise, Braise, Kitchen Club ou chez Out Fry, un plat thaï chez Mission Saigon ou un couscous chez Sababa ? Si vous ne connaissez aucune de ces enseignes, c’est que vous n’utilisez pas les plateformes de livraison de repas comme Deliveroo ou Uber Eats.
Car toutes ces marques ont plusieurs points communs. D’abord, elles cartonnent auprès des fans de la « delivery food ».
Ensuite il s’agit de marques de restaurants virtuels, des restaurants fantômes qui ne possèdent pas de restaurants. Ni tables, comptoirs, ni serveurs. Juste une cuisine qui prépare des plats, à la commande, avant d’être livrés par les sociétés de livreurs.
Le concept, né aux Etats-Unis, a déjà quelques années. Mais le confinement mondial le consacre désormais comme une tendance de fond. On en compte déjà près de 500 en France actuellement.
« Depuis le début de la crise, nos 5 cuisines tournent à plein régime », valide Jean Valfort, le patron du groupe Dark Kitchen (Kitchen Club). Et pas seulement à Paris, puisque le centre ouvert à Bordeaux connaît le même succès. Avec 1500 commandes assurées par jour pour un ticket moyen de 20 euros, son entreprise réalise un chiffre d’affaires qui fait saliver de nombreux restaurateurs, obligés de laisser leur rideau baissé jusqu’à nouvel ordre.« La crise nous a permis de prouver notre modèle de pure player livraison. Le format des cuisines sans restaurant est parfaitement adapté aux nouvelles exigences d’hygiène et de sécurité comme la distanciation des salariés, le port des masques, l’absence de point de contact… », explique Jean Valfort.
Et les investisseurs ne s’y trompent pas. Les marques virtuelles de restaurant font l’objet de toutes leurs attentions. Dark Kitchen a levé 1 million d’euros en 2019. La start-up parisienne Taster, lancée par un ancien de Deliveroo, a déjà engrangé près de 13 millions d’euros en l’espace de deux ans et s’est déjà installée à Madrid et à Londres. Frichti, de son côté, avec 60 millions de levées de fonds continuent de faire la course en tête avec des ambitions décuplées puisque la marque veut désormais s’installer dans les entreprises sous forme de cantines virtuelles.
Si les marques sont virtuelles, le savoir-faire, lui, est bien concret. Dans ces cuisines 100 % dédiées à la livraison, les process sont au cordeau. « Nous devons mettre en place une organisation au carré pour limiter le staff », insiste Jean Valfort qui compte 50 CDI dans ses 5 cuisines. « Pour préparer rapidement un produit qui sera encore chaud au moment de la livraison, il faut une équipe capable de calibrer la viande, le temps de cuisson, de bien fermer le sac isotherme… Notre temps de préparation est de 6 m 30 en pointe » explique-t-il.
« Ensuite, il faut se concentrer sur les plats compatibles, c’est-à-dire élaborés à partir des mêmes ingrédients de base ». Par exemple, en cuisine, les tacos sont réalisés avec la même viande et les mêmes légumes que les burgers. « Il faut optimiser. Compresser les coûts. Les consommateurs ne seront jamais prêts à débourser 30 euros pour manger chez eux » assure Jean Valfort.
Coté marketing, ceux que l’on appellera sûrement bientôt « digital native virtuel restaurant » n’ont rien à envier à leurs collègues du textile, les DNVB, comme Le Slip français et Sezane. « Nous connaissons parfaitement nos clients grâce aux données des plateformes, et nous communiquons avec eux grâce à nos sacs et des flyers pour leur proposer toute notre gamme de produits » complète l’ancien étudiant de l’Essec. Un panel qui compte déjà des burgers (Saint-Burger), du poulet grillé (Braise, Braise Chicken Club), des plats orientaux (Sababa) des poutines (Fat Fat) et des tacos (Mama roll) et qui pourrait très vite intégrer des sushis ou des pizzas et des plats végétariens.
« Nous voulons désormais aller très vite pour notre développement. Ouvrir une dark kitchen coûte 10 fois moins cher qu’un restaurant classique.
Nous étudions aujourd’hui différentes possibilités, notamment la franchise pour accélérer », conclut Jean Valfort qui possède également 5 restaurants physiques à Paris, notamment dans le Passage des Panoramas, qu’il compte bien rouvrir au plus tôt. « Les deux activités sont complémentaires. D’ailleurs, tous les restaurants se lancent désormais dans la vente à emporter ».« Rien ne vaut le contact avec les clients », avoue-t-il. D’ailleurs dès le mois de juin, il compte bien inaugurer en grande pompe son nouveau restaurant de tapas de 600 m2 à Nice. « Dès que possible nous allons faire la fête sur l’incroyable roof top » promet-il.
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