Dans le monde des fusions et acquisitions, les femmes émergent comme des acteurs clés, apportant une perspective unique et des compétences précieuses qui redéfinissent le paysage des transactions commerciales.
Un article de Jennifer J Fondrevay pour Forbes US – traduit par Lisa Deleforterie
« Lors d’une entrevue pour mon livre sur les fusions et acquisitions, un PDG a souligné le caractère singulier des femmes dans ce domaine », explique Jennifer J Fondrevay, auteure de cet article. Selon lui, la capacité des femmes à aborder les aspects émotionnels de ces transactions est inestimable ; une dimension souvent négligée par les hommes.
En tant que consultante spécialisée dans l’aspect humain des fusions et acquisitions, j’ai remarqué une tendance croissante : la participation active des femmes dans ces processus. Selon une étude récente de Datasite, les femmes représentent désormais près de la moitié de la main-d’œuvre du millénaire et de la génération Z dans le secteur des fusions et acquisitions, signalant ainsi une évolution positive, comme l’a noté le PDG.
Les femmes ont une perspective unique en matière de négociation. Dans le domaine des fusions et acquisitions, leur présence au sein des équipes de transaction a souvent permis de mettre en lumière des aspects souvent négligés. De nombreux professionnels ont constaté que pendant les négociations, les personnes étaient plus ouvertes avec les femmes et partageaient des informations qu’elles n’auraient pas partagées autrement. De plus en plus, les hommes reconnaissent l’importance de la contribution des femmes dans la réalisation des objectifs de la transaction.
John Segenberger, directeur des intégrations et des séparations chez Virtas Partners, reconnaît la valeur des compétences uniques que les femmes apportent aux négociations, surtout lorsque les égos peuvent perturber les discussions. Il se rappelle d’une collègue qui intervenait régulièrement pour recentrer la discussion lors des délibérations sur un accord.
« Elle parvenait à éviter que la discussion ne dégénère en querelle entre collègues et clients, en recentrant l’équipe sur les priorités. Ses conseils étaient inestimables et nous ont fait gagner un temps précieux. »
Les femmes sont de plus en plus nombreuses à tirer parti de leurs compétences uniques et de leur intuition pour améliorer les résultats des transactions. « Les transactions ne se résument pas à des tableurs et des documents. Ce sont les individus qui les réalisent, et ces personnes sont influencées par une multitude de motivations et d’expériences personnelles qui peuvent façonner une transaction. Ainsi, la compréhension de l’aspect humain est cruciale pour garantir des résultats optimaux », a commenté Justine Mannering, directrice générale de Stifel, alors qu’elle discutait avec Mme Fondrevay du rôle joué par les femmes dans la conclusion des transactions.
Elle a ajouté : « En tant que banquiers, notre rôle est de faciliter les transactions pour nos clients et d’en maximiser les résultats. Pour ce faire, il faut combler les lacunes entre les acheteurs et les vendeurs afin de parvenir au bon résultat. Connaître son client – la personne, pas l’entreprise – et comprendre ses besoins est essentiel pour comprendre ce qu’il considère comme une réussite. L’intelligence émotionnelle, l’intuition et l’empathie sont des compétences que j’ai exploitées et qui se sont révélées précieuses pour assister mes clients dans la finalisation des transactions. »
Voici les cinq compétences uniques que possèdent les femmes et qui contribuent à la réussite de leurs affaires :
- Les femmes mettent en lumière l’aspect humain des fusions et acquisitions (qui a tendance à être ignoré).
- Les femmes ont une intuition aiguisée qui leur permet de discerner des aspects (qui ne sont pas forcément évidents pour les autres).
- Les femmes peuvent amener les gens à s’ouvrir à elles (de manière perspicace).
- Les femmes simplifient le message (pour qu’un plus grand nombre de personnes puissent le comprendre)
- Les femmes peuvent anticiper les défis futurs (grâce à leur intuition de ce qui pourrait mal tourner).
Lors de conversations avec des femmes réalisant des opérations de fusion et d’acquisition, elles ont partagé des anecdotes et des observations sur la manière dont le fait de s’appuyer sur leurs facultés uniques, plutôt que de les diminuer pour s’intégrer, a contribué à la réussite de leur rôle et de leurs opérations.
#1 Les femmes mettent en lumière l’aspect humain des fusions et acquisitions (qui a tendance à être ignoré).
Avant une transaction, se concentrer uniquement sur l’établissement de listes de contrôle peut conduire à négliger la pression subie par les équipes et les individus. Dans de telles situations, la sensibilité des femmes à l’égard du bien-être des personnes impliquées peut s’avérer d’une valeur inestimable. Rekha Devarapelli, directrice principale des fusions et acquisitions chez Camping World, a partagé son observation selon laquelle certains processus pouvaient et devaient être revus.
« Parmi les éléments de la liste de contrôle de l’intégration figurait la nécessité pour les services informatiques de remplacer tous les équipements pendant la nuit à chaque acquisition de concession de véhicules récréatifs. Cela obligeait les informaticiens à travailler jour et nuit. Une fois l’opération terminée, le service informatique devait répondre aux demandes de tous les clients le jour de l’ouverture. J’ai observé les répercussions de ce processus sur l’équipe et l’expérience médiocre qu’il offrait aux employés des concessions. Ce n’était pas la manière dont Camping World souhaitait accueillir les gens au sein de l’entreprise », a-t-elle expliqué.
« Après avoir pris conscience de la situation, j’ai collaboré avec le vendeur pour élaborer un calendrier de trois jours, pendant lesquels nous avons procédé au remplacement de l’équipement informatique et à la préparation pour l’ouverture, selon un plan défini. Cette approche a considérablement soulagé l’équipe informatique et a augmenté sa productivité. Ce n’était pas une tâche difficile à accomplir », ajoute Mme Devarapelli, « mais ce n’était pas l’objectif initial. Le fait de voir l’aspect humain du processus a permis d’améliorer l’expérience pour tous. »
#2 Les femmes ont une intuition aiguisée qui leur permet de discerner des aspects (qui ne sont pas forcément évidents pour les autres).
Lorsque Elon Musk a lancé son offre hostile d’acquisition de Twitter, Stacey Fix Conti, responsable de l’intégration des fusions et acquisitions pour Twitter à l’époque, avait le sentiment que l’équipe chargée de l’opération ne recevrait pas beaucoup de conseils de la part de l’équipe d’Elon Musk. Elle envisageait également que la direction de l’entreprise ne serait probablement pas impliquée pour soutenir la transition si l’opération aboutissait. Mme Conti envisageait alors trois options :
- Ne rien faire en matière de planification post-clôture et espérer que tout irait bien (ce qui n’est pas idéal pour l’entreprise ni pour les employés).
- Procéder à la planification habituelle de la transition d’une entreprise publique sans tenir compte de l’avis de l’acheteur (plan de transition, plan de communication, etc.).
- Poursuivre la planification critique tout en ne prenant aucune décision ou en effectuant des travaux qui ne pourraient pas être annulés si la transaction échouait (par exemple, des travaux visant à privatiser l’entreprise).
Son équipe a choisi l’option n° 3 et une équipe opérationnelle a poursuivi la privatisation. Mme Conti a déclaré : « Après le licenciement de plus de 80 % des employés de Twitter, les paiements en espèces ont changé la donne en ce qui concerne le maintien en poste des employés occupant des fonctions essentielles. Si je n’avais pas suivi mon intuition, la transition après la fermeture aurait pu être encore pire pour les employés licenciés, les employés restants et l’entreprise. La leçon à retenir pour les femmes : faites confiance à votre intuition ».
#3 Les femmes peuvent amener les gens à s’ouvrir à elles (d’une manière perspicace).
En un mot, les négociations sont stressantes pour toutes les personnes impliquées. Les équipes analysent des masses de données, de nombreux acteurs ont des agendas divergents et les délais sont toujours très courts. Une fois la transaction conclue, les attentes à l’égard du chef d’entreprise chargé de réaliser la valeur de la transaction sont élevées. Les PDG peuvent se demander vers qui se tourner pour prendre des décisions.
Jennifer O’Brien, associée, M&A chez West Monroe, a raconté comment une relation qu’elle avait nouée avec un PDG l’avait aidé à traverser une période particulièrement délicate dans son entreprise. « J’ai noué une excellente relation avec le PDG de l’une des entreprises du portefeuille de soins de santé d’un client de capital-investissement qui investissait dans les sciences de la vie », a révélé Mme O’Brien. « Nous avons eu plusieurs conversations au cours desquelles j’ai pu l’aider à réfléchir à la manière de présenter certaines décisions au conseil d’administration, ainsi qu’à résoudre certains problèmes de leadership qu’il rencontrait. Sa capacité à amener le PDG à « s’ouvrir » l’a aidé à se sentir soutenu lors des étapes clés de l’entreprise et a permis au client de Mme O’Brien de réussir avec une entreprise du portefeuille.
Abbie Roberts, directrice principale chez Datasite, estime que les femmes jouent un rôle essentiel dans la création d’un environnement où les gens s’ouvrent et s’engagent. « Dans le domaine du développement d’entreprise, le processus d’origination d’une affaire peut faire la différence entre la réussite et l’échec bien avant que les documents ne soient signés. Mais souvent, ce processus est trop secret, ce qui entrave la croissance », a déclaré Mme Roberts. « Lorsque j’étais responsable mondial du développement de l’entreprise chez Acuris, j’étais convaincue que la création de voies d’échange d’idées ouvertes permettrait d’améliorer le pipeline d’opérations et de réaliser des acquisitions fructueuses. En mobilisant l’ensemble des employés et en adoptant une approche collaborative de la prospection de nouveaux marchés et d’acquisitions, notre équipe a non seulement enrichi notre pipeline d’origination, mais nous avons également pris des décisions plus intelligentes et réalisé des intégrations plus harmonieuses. »
#4 Les femmes simplifient le message (pour qu’un plus grand nombre de personnes puissent le comprendre)
« Après avoir cru pendant des années que je devais m’affirmer davantage et être plus agressive dans ma communication, j’ai réalisé que j’avais tort », a déclaré Claire Feagley, qui a été directrice des opérations auprès de l’armée. « Une grande partie de ma carrière a été consacrée au Commandement des opérations spéciales des États-Unis, où je me suis concentrée sur l’obtention de contrats d’une valeur de plusieurs millions, voire de plusieurs milliards de dollars. De nombreux membres contribuant à ces efforts, si ce n’est tous, sont des vétérans militaires à la retraite et des hommes. J’ai souvent constaté que le manque de cohésion de l’équipe, une mauvaise communication ou l’ego avaient un impact sur la capacité de l’équipe à élaborer des communications convaincantes. J’ai choisi de « m’appuyer » sur ma vulnérabilité, ce que je croyais au départ totalement contraire à la création d’une cohésion d’équipe parmi les hommes. Ma vulnérabilité, ma transparence et ma franchise dans la communication ont été la clé de la cohésion de l’équipe et de ma réussite dans ce secteur », raconte-t-elle.
#5 Les femmes peuvent anticiper les défis futurs (grâce à leur intuition sur ce qui pourrait mal tourner).
Catherine Cummings, qui a été directrice des ressources humaines dans plusieurs entreprises technologiques en passe d’être vendues, reconnaît qu’elle est capable d’écouter ce qui se dit et ce qui ne se dit pas, afin d’anticiper les problèmes potentiels.
« Qu’il s’agisse de capter l’énergie d’une pièce ou de détecter les réticences d’une personne, j’ai découvert que j’étais capable d’entendre ou de voir les tensions non exprimées et d’envisager des solutions avant qu’elles ne deviennent un problème », a révélé Mme Cummings. « Dans une affaire, l’équipe était tellement concentrée sur la tactique de séparation d’environ 40 % des employés qu’elle avait élaboré un plan de communication sommaire (par exemple, par courrier électronique) pour les 60 % restants. Je savais que nous serions confrontés à des difficultés futures si nous ne faisions pas en sorte que les employés restants se sentent bien accueillis dans la nouvelle entreprise et qu’ils aient un rôle essentiel à jouer dans la réussite de l’entreprise. Le temps et l’énergie que notre équipe a consacrés à la mise en place d’une communication tout aussi solide pour les employés restants ont accéléré la réussite de la fusion et ont entraîné beaucoup moins de perturbations que prévu », explique-t-elle.
De nombreuses jeunes femmes travaillant dans le secteur des fusions et acquisitions ont déclaré avoir été positivement influencées par la présence de femmes à différents niveaux jouant un rôle essentiel dans les transactions. Mimi Ghosh, qui s’occupe de la couverture des sponsors financiers chez Bank of America Corp, est d’accord : « Lors de ma progression professionnelle, du statut de banquière à celui de responsable de la couverture, j’ai remarqué que bon nombre des transactions que j’ai conclues impliquaient des femmes en première ligne, que ce soit en tant qu’investisseuses ou en tant que fondatrices.
Elle a pu observer que le point de vue unique d’une personne peut libérer la valeur potentielle pour un client et, en fin de compte, conduire à des résultats plus solides pour tous. Mme Ghosh a ajouté : « Fondamentalement, la négociation repose sur les relations, et la force de ces relations est souvent le facteur déterminant pour savoir qui, parmi les nombreux individus talentueux qui présentent l’entreprise, remporte le mandat ».
S’appuyer sur ces cinq compétences uniques peut être la clé pour établir des relations et réussir dans le domaine des fusions et acquisitions. Il est temps pour les femmes de mettre en valeur leurs atouts et de briller.
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