Cette décision doit faciliter le report des voix de gauche, dans les circonscriptions où les candidats du Nouveau Front populaire vont se retirer au profit de la majorité pour faire barrage au RN.
Retournement de situation du côté de Matignon. Après avoir défendu contre vents et marées la réforme controversée de l’assurance chômage au lendemain des européennes, Gabriel Attal a changé d’avis. Le durcissement des règles d’indemnisation, dénoncé tant par l’extrême droite que par l’alliance de gauche, qui ont largement distancé le camp présidentiel dimanche soir au 1er tour des législatives, a été suspendu ce dimanche par le Premier ministre.
Le nouveau dispositif devait réduire à partir du 1er décembre la durée maximale d’indemnisation de 18 à 15 mois pour les personnes âgées de moins de 57 ans. Il aurait aussi fallu avoir travaillé huit mois sur les 20 derniers mois pour être indemnisé, contre six mois au cours des 24 derniers mois actuellement. Il devait permettre à l’Etat de réaliser 3,6 milliards d’euros d’économies par an.
Des reports de voix dans le viseur
La réforme n’est pas enterrée pour autant. Elle pourra « faire l’objet d’aménagements, de discussions entre forces républicaines », explique l’entourage de Gabriel Attal, renvoyant à de « futures majorités de projets et d’idées » après le 2e tour des législatives. Très critiquée par les syndicats, cette réforme, prévue pour entrer en vigueur au 1er décembre, devait être entérinée par un décret publié au Journal officiel lundi. Mais le Rassemblement national (RN), à l’extrême droite, comme la gauche, réunie dans le Nouveau Front populaire (NFP), avaient promis d’abroger ce projet. Cette décision doit faciliter le report des voix de gauche, dans les circonscriptions où les candidats du Nouveau Front populaire vont se retirer au profit de la majorité pour faire barrage au RN.
« C’est une excellente nouvelle », a réagi dimanche soir auprès de l’AFP la leader de la CGT Sophie Binet. « Il faut maintenant abandonner définitivement cette réforme injuste et violente qui menace de faire basculer dans la pauvreté plus d’un million de travailleurs et de travailleuses », a-t-elle ajouté. Car rien n’est acquis. Afin d’éviter un vide juridique, les règles actuelles n’étant valables que jusqu’à ce dimanche, un « décret de jointure » a été publié exceptionnellement lundi matin pour prolonger les conditions en vigueur « jusqu’au 31 juillet ». Le futur gouvernement, quel qu’il soit, devra rapidement choisir entre plusieurs options : émettre un nouveau décret pour prolonger les mesures actuelles, publier son propre décret pour modifier les règles, ou rendre la main aux partenaires sociaux pour qu’ils renégocient.
Bruno Le Maire « circonspect »
La suspension de la réforme a été accueilli avec scepticisme du côté de Bercy. Interrogé sur France Inter, ce lundi 1er juillet, Bruno Le Maire a déclaré être « très circonspect sur les gages que l’on peut donner, sur les positions de circonstances, sur les accommodements, sur les calculs ». « Si la France veut le plein emploi, si elle veut sa réindustrialisation, si elle veut rester une puissance économique de tout premier plan, il faut aller vers le plein emploi et donc il faut poursuivre la réforme de l’indemnisation du chômage », a martelé le ministre de l’Economie. « Je ne vais pas changer de convictions en l’espace de 24 heures parce qu’il faudrait que j’arrive à convaincre untel ou untel », a-t-il ajouté.
Pour rappel, le camp présidentiel avait, jusqu’ici, répété assumer cette réforme au nom du plein emploi, cette objectif devenu une réelle obsession d’atteindre les 5% de taux de chômage. Mi-juin, le président Emmanuel Macron l’avait qualifiée d’ « indispensable » et a jugé que le gouvernement avait « raison de l’assumer en campagne », mais a assuré être ouvert sur les «modalités».
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