Le Louvre est devenu mercredi le premier grand musée à retirer le nom de la famille Sackler de ses murs, dans la continuité d’une tendance de nombreuses organisations à se distancer du mécénat des propriétaires de Purdue Pharma (dont la fortune était estimée à 13 milliards de dollars par Forbes en 2016), une famille inextricablement liée à la crise américaine des opioïdes.
- Depuis 1997, la collection d’artéfacts persans et levantins du Louvre était hébergée dans l’aile Sackler des Antiquités Orientales, selon le New York Times. Mais depuis mercredi, la plaque et les panneaux portant le nom des Sackler sont masqués avec du ruban adhésif gris.
- De nombreuses institutions culturelles à travers l’Europe et les États-Unis – y compris le musée Solomon R. Guggenheim et le Metropolitan Museum of Art de New York, ainsi que la chaîne de musées de la famille Tate au Royaume-Uni – ont annoncé en mars qu’elles n’accepteraient désormais plus de dons de la part de la famille Sackler. Au cours du même mois, deux fondations caritatives Sackler au Royaume-Uni ont annoncé qu’elles cesseraient toute activité.
- La National Portrait Gallery du Royaume-Uni et la South London Gallery auraient respectivement rejeté et retourné des dons de la famille Sackler, selon le New York Times.
- En plus des musées, d’autres organisations – l’Université Columbia, l’Académie New-Yorkaise des Arts et des Sciences, ainsi que le Centre Hastings et deux fonds de couverture – ont coupé les ponts avec les Sackler depuis février, alors que davantage d’informations faisaient surface à propos de la crise des opioïdes et que de nombreuses poursuites étaient engagées à l’encontre de la famille et de Purdue Pharma.
- Certaines institutions, telles que l’Université de Harvard et le Smithsonian, ne se dissocieront pas du nom des Sackler, ou sont dans l’incapacité de le faire. Ces deux institutions ont déclaré publiquement qu’elles ne retireraient pas le nom des Sackler de leurs établissements, et qu’elles ne retourneraient pas non plus leurs dons, cela dû à des obligations légales et contractuelles – sans compter le fait que les dons venaient d’Arthur M. Sackler, qui n’était plus propriétaire de Purdue Pharma et qui était décédé avant que le médicament OxyContin soit développé et mis sur le marché.
- Le Wall Street Journal a rapporté que près de 2 000 procédures judiciaires sont en cours contre Purdue Pharma, tenant l’entreprise pour responsable dans le scandale des opioïdes. Purdue Pharma avait mis sur le marché dans les années 90 son médicament OxyContin (un analgésique soumis à prescription contenant de l’oxycodone), et les procès allèguent que le laboratoire aurait induit le public en erreur sur son caractère addictif.
Le Washington Post a rapporté mercredi que 76 milliards de pilules analgésiques à base d’oxycodone et d’hydrocodone avaient envahi le marché américain entre 2006 et 2012 (avec environ 75 % de ces médicaments distribués par seulement six entreprises). Au cours de cette même période, 100 000 décès ont été attribués à une addiction aux opioïdes. Parmi les principaux fabricants de médicaments, Purdue Pharma occupe le quatrième rang avec une part de marché de 3%. Aux côtés de Purdue, près de deux douzaines d’autres entreprises pharmaceutiques sont poursuivies pour avoir conspiré de manière à rendre le pays dépendant de ces puissants analgésiques. Les entreprises en question ont fréquemment fait porter le blâme de la crise des opioïdes aux médecins et aux pharmacies, pointant du doigt des prescriptions abusives, ainsi qu’aux patients qu’elles accusent d’abuser des médicaments.
Quant à Purdue et les huit membres de la famille Sackler nommés en justice, toutes les personnes impliquées ont nié les allégations, et indiqué qu’elles étaient unies dans leur désir de résoudre tous les litiges. L’entreprise et trois membres de la famille, cependant, avaient plaidé coupable en 2007 à des accusations fédérales d’avoir induit le public en erreur au sujet de la dépendance créée par OxyContin entre 1995 et 2001, selon le Wall Street Journal. Ensemble, ils avaient dû payer plus de 630 $ millions d’indemnités, avec la signature par Purdue d’un accord d’intégrité entreprise d’une durée de cinq ans avec le gouvernement américain. Purdue remplissait les conditions de l’accord en 2013, d’après le gouvernement. Près d’une dizaine d’années plus tard, les communes affectées par l’épidémie des opioïdes ont commencé à engager des poursuites judiciaires contre Purdue et d’autres entreprises et distributeurs pharmaceutiques.
Purdue Pharma avait débuté en 1952 lorsque trois frères Sackler, tous psychiatres, avaient acquis une entreprise pharmaceutique basée à New-York pour 50 000 $. À la base, l’entreprise fabriquait des produits sans prescription tels que des produits anti-cérumen, des laxatifs et des antiseptiques. Leur percée survint avec l’autorisation américaine de mise sur le marché en 1995 de l’OxyContin, un médicament opiacé à libération prolongée. Purdue a vendu plus de 35 milliards de dollars d’OxyContin à ce jour, avec plus de 4 $ milliards de ses bénéfices reversés à ses propriétaires depuis 2007.
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