Economie | L’exécutif, qui souhaite ramener son déficit sous la barre des 3% en 2027, devra faire une croix sur son objectif de croissance pour y parvenir, estime le Haut conseil des finances publiques.
A peine annoncé, aussitôt étrillé. Dans un avis rendu public, le Haut Conseil des finances publiques (HCFP) estime que la trajectoire budgétaire du gouvernement « manque de crédibilité » et de « cohérence ». Dévoilé la semaine dernière, le nouveau « programme de stabilité » prévoit un retour du déficit public sous les 3% en 2027. Il a été adopté en Conseil des ministres ce mercredi et doit désormais être envoyé à la Commission européenne dans les prochains jours.
Dans son avis, le Haut Conseil s’inquiète du niveau des finances publiques à l’aune de l’augmentation de la charge d’intérêts de la dette. Le HCFP craint que cette mauvaise performance puisse compromettre les marges de manœuvres dont dispose la France en cas « de chocs macroéconomiques ou financiers », mais aussi pour le financement de la transition écologique.
Incompatibilité
« Le retour du déficit public sous 3 points de PIB en 2027 supposerait un ajustement structurel massif entre 2023 et 2027 (2,2 points de PIB sur quatre ans) », résume le HCFP. Soit la mise en place d’un effort de réduction des dépenses publiques « jamais réalisé par le passé », auquel le Haut Conseil ne fait pas mine d’y croire. « Sa documentation reste à ce stade lacunaire », expose l’avis. Et son application repose sur « une gouvernance rigoureuse » associant l’Etat, les collectivités locales et la Sécurité sociale. Un facteur essentiel « qui n’est pas réuni aujourd’hui » selon le HCFP.
Voilà pour le côté « manque de crédibilité ». Pour ce qui du « manque de cohérence », le Haut conseil cible des perspectives de croissance trop élevées alors que celles-ci viennent pourtant d’être revues à la baisse (1 % en 2024 et 1,4 % en 2025, au lieu de 1,4 % et 1,7 %). « Il y a un arbitrage à faire entre croissance et réduction des déficits expliquait Mathieu Plane, directeur adjoint du département analyse et prévision de l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), la semaine passée lors de la présentation des prévisions de son institut. Quand vous réduisez la dépense publique, cela a des conséquences sur la consommation des ménages et l’activité des entreprises » . En clair, la tenue des deux objectifs en simultané s’avère incompatible car l’ajustement budgétaire pèse mécaniquement sur la croissance.
Impasse
Selon ses calculs, l’OFCE estime que l’annulation des 10 milliards d’euros de crédit amputera 0,2 point au PIB français en 2024. Les 20 milliards d’économie annoncés pour l’année suivante pourraient retirer jusqu’à 0,6 point de croissance. In fine, une trajectoire « surévaluée », pèsera nécessairement sur les finances publiques, les rentrées d’argent attendues étant, elles aussi, surestimées. Pour rappel, si le déficit à été rehaussé à 5,5% en 2023, contre 4,9 % initialement prévu, c’est en raison de recettes inférieures au montant escompté.
Devant cette impasse, le HCFP se risque à remettre en cause la politique de l’offre voulue par Emmanuel Macron, en demandant « un réexamen des baisses prévues de prélèvements obligatoires ». En clair, compte tenu de la situation actuelle, le Haut conseil considère que la réduction des impôts, tant pour les particuliers – comme l’a promis le président envers les classes moyennes pour un montant de 2 milliards d’euros – que pour les entreprises, avec la suppression progressive de la CVAE, n’est plus pertinente.
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