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La BCE laisse ses taux inchangés pour la quatrième fois consécutive

Europe |  L’institution monétaire attend des signes clairs d’une baisse durable de l’inflation avant de procéder à un desserrement de sa politique monétaire. 

 

Les « colombes » n’ont toujours pas repris l’ascendant du côté de Francfort. Ces partisans d’une politique monétaire plus accommodante n’ont pas réussi à faire infléchir le conseil des gouverneurs de la Banque centrale européenne (BCE), qui a opté pour un nouveau statu quo, le quatrième, ce jeudi 7 mars. Le taux sur les dépôts bancaires, sorte de référence pour l’institution, reste à 4%. La BCE a, par ailleurs, revu ses prévisions d’inflation annuelle à la baisse, passant de 2,7 % à 2,3 % pour 2024. 

Si certains investisseurs misaient, il y a encore quelques semaines, sur une baisse de taux lors de cette réunion, la décision de la BCE était attendue. Le 28 février dernier, le gouverneur de la banque centrale slovaque, de facto l’un des vingt-six membres de l’instance décisionnaire de l’institution, estimait qu’ «il n’y pas de raison de se précipiter » soulignant qu’un desserrement de la politique monétaire en mars était « exclu». « Nous progressons bien vers notre objectif d’inflation », mais « nous ne sommes pas suffisamment confiants », a expliqué Christine Lagarde, la présidente de la BCE en conférence de presse. 

Mais pourquoi la Banque centrale se montre-t-elle aussi prudente alors que les conséquences de sa politique monétaire plus restrictive se font fortement ressentir dans les économies des 27 ? Pour rappel, l’unique mission de la BCE est de maintenir l’inflation aux alentours de 2%. Ainsi, quand l’institution s’est lancée, en juillet 2022, dans le resserrement monétaire le plus rapide de son histoire, la hausse des prix frôlait les 9% sur les douze derniers mois dans la zone euro. Cet indicateur affiche désormais 2,6% en février, en baisse de 0,2 point par rapport à janvier. Soit un chiffre très proche de l’objectif initial. 

 

Sueurs froides 

Seulement, l’inflation sous-jacente – qui ne tient pas compte des prix volatils tels que l’énergie et les produits alimentaires -, reste à un niveau plus élevé : +3,1% en février sur les douze derniers mois. Et celle des services, scruté de près par les grands argentiers, est évaluée à 3,9%, après avoir affiché 4% les trois mois précédents. « Ces données suggèrent que le cœur de l’inflation est plus fort que ce que nous pensions, observe Mark Cus Babic, économiste à Barclays auprès du Monde. La trajectoire de l’inflation est à la baisse, mais la dynamique de désinflation ralentit ». Dans ces conditions, la Banque centrale juge qu’il est encore trop tôt pour amorcer un desserrement. 

D’autant que la hausse des salaires donne des sueurs froides du côté de Francfort. Ce n’est pourtant pas nouveau. Durant toute l’année 2023, alors même que les membres du directoire de la BCE reconnaissait que l’inflation était nourrie par les profits des entreprises, Christine Lagarde n’oubliait que très rarement d’agiter le spectre d’une boucle prix-salaire. En ce début de 2024, de nombreuses négociations entre syndicats et patronat se sont ouvertes à propos des rémunérations à travers l’Europe. Le niveau de vigilance s’en retrouve démultiplié. « Les pressions sur les prix intérieurs restent élevées, en partie à cause de la forte croissance des salaires », a justifié la présidente de l’institution monétaire. 

Reste que l’inflexibilité de la BCE n’est pas du goût de tous. La pression politique commence à s’accentuer. En marge du G20 des ministres des Finances au Brésil, Fernando Medina, le ministre portugais, critiquait ouvertement la ligne de crête décidée à Francfort. « Plusieurs pays européens connaissent un fort ralentissement. Dans certains, il y a déjà une stagnation ou une récession. En ce moment, le risque de laisser la situation telle quelle est plus élevé que de démarrer le processus de réduire les taux d’intérêt. L’économie a déjà assez ralenti », assurait-il. 

 

Une baisse en avril déjà exclue ? 

En renchérissant le coût de l’argent, l’endettement est devenu plus difficile pour les entreprises comme les ménages, affectant la consommation. Résultat : la zone euro est entrée en stagnation sur les quatre trimestres de 2023. Pour ne rien arranger, la BCE a abaissé sa prévision de croissance du PIB pour la zone euro en 2024 à 0,6 % contre 0,8 % précédemment – et 1,2% en novembre – dans ses nouvelles projections macroéconomiques présentées jeudi. Celle pour l’an prochain est restée stable à 1,5%. 

La prochain rendez-vous est fixé au mois prochain. « Nous en saurons un peu plus en avril, mais nous en saurons beaucoup plus en juin », a plaidé Christine Lagarde. Faut-il comprendre qu’une baisse des taux lors de la prochaine réunion de politique est d’ores et déjà exclue ? Les marchés semblent avoir pris le pari. Ils misent désormais sur près de 100 points de base d’assouplissement cette année, probablement lors des réunions de juin, septembre et décembre, qui s’accompagneront de nouvelles projections économiques.

 


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