Kobe Bryant est mort et c’est tout le sport mondial qui éponge ses larmes. Le « Black Mamba » était un joueur de légende, une source d’inspiration, et l’argument de ventes des plus grandes marques.
Ce matin vers 9h, heure française, l’Australien Nick Kyrgios est rentré sur le court de l’Open d’Australie avec un maillot des Lakers, floqué du numéro huit et du nom « Bryant ». Les larmes aux yeux, le fantasque tennisman – qui « déteste son sport » -, a rendu hommage à « Kobe » décédé dimanche. Lui, sa fille de 13 ans, Gianna, et sept autres personnes ont péri dans un crash d’hélicoptère qui les menaient à un entraînement.
On ne sait quelles autres images retenir des hommages qui se sont succédé depuis hier suite au décès de Kobe Bryant. Rudy Robert, le Français des Jazz de Utah, meilleur défenseur de la NBA – i.e. du monde -, a insisté sur le fait que cette mort était un « choc pour nous tous ». Michael Jordan, le plus grand des plus grands, n’a pas caché son chagrin profond : « J’aimais Kobe, il était comme un petit frère pour moi. Nous nous parlions souvent, et ces conversations vont beaucoup me manquer. Il était un compétiteur féroce, l’un des plus grands de l’histoire du basket, et une force créatrice. Kobe était aussi un père exceptionnel qui aimait profondément sa famille, et qui tirait beaucoup de fierté de l’amour de sa fille pour le basket. » Si la planète basket semble dévastée, peut-on envisager la détresse de Vanessa Bryant, mère des quatre enfants de Kobe, qu’il a épousée en 2001, et qu’il avait rencontrée quand elle avait 17 ans ?
Lui et Jordan
A chaque larme versée, une facette du champion s’éclaire. Dans celles de Jordan, on lit à quel point Bryant a été un des plus grands joueurs de tous les temps. Cinq fois champion NBA avec les Los Angeles Lakers, dont trois titres d’affilée entre 2000 et 2002, il a également remporté le titre de MVP de la saison régulière en 2008. Il est aussi le quatrième meilleur marqueur de l’histoire de la ligue nord-américaine, derrière Karim Abdul-Jabbar (autre légende des Lakers de Los Angeles), Karl Malone, et le « King » Lebron James. Ironie du sort, c’est avec le maillot des « angelinos » sur le dos que James est passé devant Bryant au classement du scoring, la veille de la mort de Bryant.
Bryant s’est toujours comparé à Jordan, et Jordan a toujours été comparé à Bryant. Mais à quoi bon ? Sur la question du palmarès, le joueur des Lakers n’est pas au niveau du mythique arrière des Bulls, qui totalise 6 titres NBA et 5 de MVP. Pour le reste, Bryant a marqué de son empreinte le basket américain des années 2000-2010, autant que Jordan a marqué celui des années 80-90.
« Black Mamba » et « trou-du-cul »
Kobe était ce joueur au mouvement spectaculaire, fluide et élégant, obnubilé par le panier et sa capacité à tenir son équipe. Paroxysme : son match à 81 points contre Toronto en 2006, qui en fait le second plus gros marqueur de tous les temps sur un match. Compétiteur sans limite, la tristesse désarçonnante de Doc Rivers – ancien coach des Celtics de Boston, grand rival des Lakers de Bryant -, à l’annonce de la mort du joueur, rappelle à quel point il était respecté et adulé même par ses adversaires. Même si c’était parfois au prix d’un comportement odieux avec ses coéquipiers. Steve Nash, le double MVP canadien qui l’a côtoyé aux Lakers le qualifiait dans un documentaire de « putain de trou-du-cul ».
Méprisant et insultant envers ses coéquipiers, Kobe Bryant avait aussi sa part d’ombre. A l’été 2003, il est accusé de viol par une employée d’un hôtel du Colorado où il passait sa rééducation à la suite d’une blessure. L’affaire a eu un écho énorme dans les médias américains, Kobe Bryant ayant notamment admis avoir eu une relation sexuelle avec l’employée, affirmant cependant qu’elle était consentante. L’image de Kobe Bryant est fortement entachée, certaines marques, dont Nutella, rompant leurs contrats avec le joueur. De cette face obscure, mêlée aux vives ondulations de son corps entre les chevilles de ses adversaires, et en référence au Kill Bill de Tarantino film dont il est fan, il prend très tôt le surnom de Back Mamba, ce serpent extrêmement vif et venimeux.
Adidas et Nike
Icône sur les terrains, motif d’inspiration en dehors, les plus grandes firmes ont vite pris position sur son nom et la marque qu’elle pourrait devenir. Alors qu’il va intégrer la NBA à 17 ans lors de la draft 1996, sans passer par l’université – cas très rare -, Adidas, son sponsor, joue son avenir en coulisse. La marque aux trois bandes fait du lobbying pour que Charlotte qui l’avait sélectionné l’envoie aux Lakers, la firme pensant avoir mis la main sur « le futur Jordan ».
Bryant, âgé de 21 ans, a atterri sur la couverture de Forbes US en 2000, armé d’un nouveau contrat de jeu de 71 millions de dollars et d’ententes de parrainage avec Adidas, Mattel, Sprite, Spalding et Giorgio Armani. C’est Nike qui reprendra le flambeau. La firme à la virgule avait signé Bryant pour un contrat de 40 millions de dollars sur quatre ans juste avant l’accusation de viol, et ne l’a pas lâché. Ses chaussures de signature Nike se sont classées parmi les meilleures ventes de la NBA au cours des 15 années suivant sa signature, et ont permis à Nike de conquérir un marché de 6 milliards de dollars en Chine, où Bryant était idolâtré pour ses compétences sur le terrain et sa volonté d’embrasser la culture chinoise.
Pèlerinages en Chine
Il a fait des pèlerinages d’été annuels en Chine pour faire la promo de Nike avant que les autres stars s’y mettent aussi. Il était sans doute l’athlète le plus populaire aux Jeux olympiques d’été de 2008 à Pékin. Son maillot était régulièrement le best-seller de la NBA en Chine, et il a décroché des campagnes de pub spécifiques à la Chine avec Mercedes-Benz, Smart Car et Alibaba.
Bryant, comme ses collègues superstars mondiales Serena Williams, Lebron James et Kevin Durant, a utilisé sa tribune tout en étant un athlète actif pour faire avancer ses intérêts commerciaux. Il a créé Kobe Inc. en 2013 et a déclaré à Forbes à l’époque : « La mission de Kobe Inc. est de posséder et de développer des marques et des idées qui défient et redéfinissent l’industrie du sport tout en inspirant le monde ». Le premier investissement de Kobe Inc. a été dans la nouvelle boisson pour sportifs BodyArmor. Il a acquis plus de 10% de l’entreprise pour environ 5 millions de dollars. L’investissement est devenu une action d’éclat lorsque Coca-Cola a investi 300 millions de dollars dans la start-up en 2018, poussant la valeur de la participation de Bryant à 200 millions de dollars.
Entrepreneur oscarisé
Bryant a pris sa retraite en 2016 avec un revenu total de 680 millions de dollars provenant du salaire et des avances. Il s’agit du total le plus élevé jamais enregistré par un athlète d’un sport d’équipe au cours de sa carrière de joueur.
Quelques mois après sa retraite, il a dévoilé son fonds de capital-risque de 100 millions de dollars, en partenariat avec l’entrepreneur Jeff Stibel, pour investir dans des entreprises de médias, de technologie et de données. Leur portefeuille comprend le site web des médias The Players Tribune, le concepteur de jeux vidéo Scopely et la société de services juridiques LegalZoom. Bryant a régulièrement parlé de son amour de la narration et a endossé ce rôle dans sa carrière post-NBA, avec des campagnes publicitaires pour BodyArmor, une série de livres pour jeunes adultes et son court métrage d’animation Dear Basketball, inspiré de sa décision de partir à la retraite en 2016, et qui a remporté un Oscar en 2018. Une légende on vous dit.
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