Les Jeux Olympiques d’hiver de Sotchi sont les JO les plus chers de l’histoire, avec un coût total estimé à 50 milliards de dollars (40 milliards d’euros). De son côté, la Corée du Sud a réussi à ne pas dépasser 12,9 milliards de dollars (10,3 milliards d’euros), mais elle a tout de même crevé le plafond de son budget initial. Comment la Corée du Sud a-t-elle réussi à dépenser presque quatre fois moins que son prédécesseur ?
Dès le début, le comité olympique de Sotchi et celui de PyeongChang avaient des approches très différentes. Les ambitions extravagantes de Sotchi ont fait s’envoler son budget dès le premier jour. Cependant, les organisateurs de PyeongChang sont restés assez modestes, et c’est certainement ce qui leur a permis de maintenir un budget « raisonnable ». Dans l’histoire des Jeux Olympiques modernes, les organisateurs n’ont jamais su respecter leur budget. Depuis des décennies, les sommes se sont envolées et les prochains JO qui doivent se dérouler à Tokyo semblent suivre la norme. Le coût réel d’un tel événement est difficile à chiffrer à cause de son ampleur. Même les 50 milliards attribués à Sotchi en 2014 ne sont qu’une estimation. Durant leur préparation, des responsables olympiques russes prédisaient un budget de 51,08 milliards de dollars (41 milliards d’euros), mais bien sûr, ils n’ont pas publié leurs comptes, d’ailleurs personne ne le fait et les contribuables doivent souvent payer l’addition durant de nombreuses années. Après le passage des JO d’hiver à Grenoble en 1968, les contribuables ont fini de payer la facture dans les années 90 et les JO de Montréal de 1976 ont été complètement remboursés en 2006. Étant donné le peu de transparence de la Russie en matière d’économie, il est difficile d’estimer quand elle aura fini de régler ses JO. Les pays ont pris conscience du fait que l’organisation de ce genre d’événements est un gouffre financier ; la Corée du Sud a donc été plus regardante à la dépense.
Tous les JO dépassent leur budget
Une étude menée par Wladimir Andreff, professeur d’économie à la Sorbonne, se demandait pourquoi les gros événements sportifs, tels que les JO, explosent si souvent leur budget. Elle révèle que le coupable est bien souvent le système de candidature lui-même. Wladimir Andreff propose donc d’en finir avec cette procédure en choisissant un site dédié aux JO et de ne plus en changer. La plupart des candidatures échouent car elles sont trop ambitieuses. Les organisateurs se présentent en pensant que les JO précédents étaient trop onéreux et qu’ils peuvent faire mieux. Dans l’euphorie de la candidature, le scepticisme n’est pas le bienvenu et bien souvent, ce sont les estimations de budget les plus farfelues qui sont retenues. La candidature originale de Sotchi présentait un budget de 8,5 milliards de dollars (6,8 milliards d’euros) et il a été multiplié par quatre en trois ans pour atteindre 33 milliards de dollars lorsque la ville a été choisie par le CIO (Comité international olympique).
Durant sa candidature, PyeongChang chiffrait son budget entre 3,5 et 9,5 milliards de dollars (2,8 à 7,6 milliards d’euros). Lorsque Sotchi n’a pas pu respecter son budget de 8,5 milliards de dollars, un nouveau budget a été mis en place, puis un autre et ainsi de suite jusqu’à atteindre les 50 milliards. Mais lorsque le comité de PyeongChang n’a pas pu respecter son budget initial de 3,5 milliards, le dépassement a été limité.
La corruption
Les investissements des JO de Sotchi n’ont pas été épargnés par la corruption et les fraudes, ce qui n’a fait qu’augmenter la facture. Un rapport prétend qu’entre 25 et 30 milliards de dollars (20 et 24 milliards d’euros) du budget ont été détournés. La Corée du Sud n’est pas non plus étrangère aux scandales de corruption. Mais l’étroit contrôle des dirigeants du pays a certainement permis de diminuer les risques de fraude et de sauver le budget des JO par la même occasion. L’ancien président, Park Geun-hye, a été destitué et arrêté l’an dernier et les investigations sont toujours en cours auprès de l’administration en place. L’enquête ne cesse de dévoiler de nouveaux chefs d’inculpation contre l’ancien chef d’état. Après l’arrestation du président, la confiance de la population coréenne envers les JO a sensiblement augmenté, nous a indiqué Chung Hee-joon, professeur en science du sport à l’université de Dong-A, située à Busan.
La cohésion est essentielle
En 2015, Boston a retiré sa candidature pour les JO d’hiver de 2022 car ses habitants avaient peur de la facture de cet événement. Stockholm, Oslo et Cracovie se sont également retirées pour des raisons similaires. Seules Pékin et Almaty au Kazakhstan ont maintenu leur candidature. Le maire de Boston a déclaré qu’accueillir les JO dans sa ville revenait à « mettre son avenir en péril ». La plupart des dépenses sont destinées au développement d’infrastructures, avec l’espoir qu’elles permettront d’attirer des touristes dans la région durant de longues années. La Corée du Sud n’a pas dû faire face aux même inquiétudes. Fin 2014, le conseiller de la province de Gangwon, Lee Ki-Chan, a menacé de refuser d’accueillir l’événement sportif si le gouvernement national ne s’engageait pas à couvrir au moins 75 % des dépenses engendrées par les JO. En 2014, la troisième ville du pays, Incheon, avait brandi des menaces similaires avant d’accueillir les jeux d’Asie. La ville a tout de même réussi à accueillir les jeux pour la modique somme de 2 milliards de dollars (1,6 milliards d’euros). Elle s’est autoproclamée comme étant le nouveau modèle à suivre pour l’organisation des jeux panasiatiques. En réalité, PyeonChang s’est largement inspirée des méthodes d’Incheon. La ville a su réduire les dépenses en évitant tous les investissements inutiles. Le comité a fait construire des stades éphémères à bas coût en lieu et place d’infrastructures massives qui seraient très peu utilisées par la suite. Le stade de PyeongChang a coûté 109 millions de dollars (87,3 millions d’euros) et il servira quatre fois avant d’être détruit.
Bien que devoir distribuer des plaids au public durant la cérémonie d’ouverture donne l’impression d’avoir lésiné sur les infrastructures, de telles économies aident à limiter les dépassements de budget à long terme.
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