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Imprévisibilité tarifaire : pourquoi certaines entreprises européennes freinent leur expansion aux États-Unis

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Imprévisibilité tarrifaire : pourquoi certaines entreprises européennes freinent leur expansion aux États-Unis

Face aux politiques commerciales erratiques de Donald Trump, de plus en plus de petites et moyennes entreprises européennes hésitent à renforcer leur présence outre-Atlantique. Une réticence révélatrice de la nouvelle donne géoéconomique, entre incertitude tarifaire, coût de production en hausse et instabilité diplomatique.

Ce qu’il faut retenir 

L’annonce d’une série de droits de douane sur les importations en provenance de l’Union européenne, effective depuis le 2 avril, a jeté un froid sur les projets d’expansion de nombreuses PME européennes aux États-Unis. Alors que le marché américain reste le premier partenaire commercial de l’UE, des entreprises allemandes, italiennes ou suisses préfèrent désormais geler leurs investissements ou reconsidérer leurs stratégies.

Ces réticences ne sont pas anecdotiques : elles illustrent un basculement plus large dans l’équilibre économique mondial, où même les marchés historiquement attractifs comme les États-Unis deviennent source d’inquiétude en raison d’un protectionnisme devenu structurel. Le secteur industriel, de l’automobile à la pharmacie, est en première ligne.

Pourquoi c’est important à suivre

Cette hésitation croissante des entreprises européennes face au marché américain pourrait avoir des conséquences majeures sur la croissance et l’innovation transatlantique. Les PME, qui constituent le socle économique de pays comme l’Allemagne ou l’Italie, sont particulièrement sensibles aux chocs réglementaires. En raison de leur faible capacité à absorber les surcoûts liés aux tarifs et à l’augmentation du prix des matières premières, plusieurs d’entre elles optent désormais pour un gel stratégique de leurs investissements aux États-Unis.


C’est un signal fort qui va à rebours des ambitions affichées par l’administration Trump de rapatrier des activités et de créer des emplois. L’effet inverse se produit : les entreprises temporisent, déplacent leur attention vers d’autres marchés — l’Inde, l’Asie du Sud-Est ou l’Amérique latine — et alimentent une dynamique de désengagement progressif du marché américain. Les conséquences se feront ressentir sur l’emploi, la dynamique industrielle et, potentiellement, sur la compétitivité même des États-Unis.

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« Contrairement aux espoirs de Donald Trump, son protectionnisme ne conduira pas à un plus grand nombre d’entreprises allemandes se déplaçant aux États-Unis et y créant des emplois », déclare Marc Tenbieg, directeur de l’association DMB, à Reuters.

Cette déclaration résume la dissonance entre l’objectif politique affiché — relocaliser la production en Amérique — et la réalité industrielle vécue par les PME : incertitudes réglementaires, coûts de main-d’œuvre multipliée par six comparé au Mexique, et l’imprévisibilité politique font du “rêve américain” un pari risqué.

Le chiffre à retenir : 235,6 milliards de dollars

C’est le montant du déficit commercial des États-Unis avec l’Union européenne en 2024. Un chiffre record, qui alimente le discours protectionniste de Donald Trump et justifie, à ses yeux, l’instauration de tarifs punitifs pouvant atteindre jusqu’à 20 %, ramenés temporairement à 10 % après une forte volatilité des marchés.

Mais cette approche, loin de rassurer les investisseurs, nourrit une instabilité chronique. Selon le cabinet de conseil AlixPartners, les dépenses discrétionnaires moyennes des ménages américains pourraient chuter de plus de 10 %, tombant à 27 000 dollars par an dans un contexte post-tarifaire — un indicateur direct des impacts que ces politiques peuvent avoir sur la consommation intérieure.

À surveiller 

La suite des événements dépendra autant de l’évolution politique américaine que des décisions des industriels européens. Certains groupes, comme LAPP en Allemagne, maintiennent leurs plans d’expansion à long terme, mais ils sont désormais minoritaires. Une partie croissante des entreprises adopte une posture « pause et observation ». Ce mouvement pourrait s’intensifier si les tensions tarifaires s’accentuent ou si une récession venait à frapper les États-Unis, comme le redoutent plusieurs acteurs du secteur manufacturier. Les groupes industriels européens appellent désormais à diversifier les débouchés, incitant à tourner le regard vers des marchés moins volatils. En parallèle, les gouvernements, comme celui d’Emmanuel Macron, multiplient les appels à la prudence.

 


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