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Hongrie, Italie, Pologne : qu’ont fait les gouvernements d’extrême droite en matière d’économie ?

President of the Council Giorgia Meloni receives Hungarian Prime Minister Viktor Orban in the courtyard of Palazzo Chigi. Rome (Italy), June 24th, 2024 (Photo by Massimo Di Vita/Archivio Massimo Di Vita/Mondadori Portfolio via Getty Images)

L’extrême droite est arrivée en tête dans plusieurs pays européens, ces dernières années. Forbes raconte les différentes politiques économiques mises en place par ces gouvernements. 

« On a jamais essayé ».  Cette petite phrase était devenue récurrente chez les électeurs du Rassemblement national (RN) durant la campagne des élections législatives anticipées de 2024. Si la France n’a finalement pas donné les rênes du pouvoir au parti d’extrême droite, la gauche ayant obtenu la majorité, certains voisins européens ont « déjà essayé » pour reprendre les mêmes termes. Sur un plan strictement économique, le bilan apparaît peu reluisant. Forbes fait un tour d’horizon. 

 

Hongrie 

Le premier ministre hongrois, Viktor Orban, tient le pays d’une main de fer depuis 2010. Sur le papier, il y a mis en place une politique pro-marché. Mais dans les faits, son parti politique, le Fidesz, favorise certaines sociétés détenues « alliées »détenues par  « des amis d’enfance » ou autres « voisins de village » de l’autocrate. « Entre 2011 et 2021, les entreprises alliées à Orban ont eu six fois plus de chances de remporter les appels d’offres publics que dans un marché réellement concurrentiel » expose la chercheuse Rachel Kleinfeld dans une étude de la Fondation Carnegie pour la paix internationale reprise par l’Express. A cela s’ajoutent des aides publiques au financement, un accès facilité à des programmes publics spéciaux, des réglementations mises en place pour favoriser ces sociétés. En clair, une concurrence faussée qui favorise la prospérité de quelques-uns au détriment des autres. Une corruption endémique qui ne favorise pas les investissements étrangers. 

D’autant que la Hongrie fait face à de nombreuses difficultés économiques que le Premier ministre n’a pas réussi à endiguer : un déficit public très élevé, une monnaie faible, une importante part de son PIB dédié au remboursement de sa dette, et une inflation très importante. Entre 2021 et 2023, le pays a subi plus que tous autres pays de l’Union européenne, la poussée inflationniste, avec une hausse des prix cumulés de plus de 33%. « La Hongrie faisait déjà face à une pression sur les prix très forte avant même l’épidémie de Covid-19, en raison des hausses de salaire et du manque de main-d’œuvre », expliquait Peter Virovacz, économiste à la branche hongroise de la banque ING dans un article du Monde en décembre dernier. Mais cela s’est aggravé ensuite en raison de la grande dépendance énergétique de son économie, de la faible productivité de son secteur agroalimentaire et des mesures du gouvernement pour soutenir les ménages avant les élections de 2022 ». 

L’économie hongroise ne s’est pas effondrée pour autant. Viktor Orban, qui n’est pas le plus grand europhile que le vieux continent ait connu, peut remercier Bruxelles. « Les mécanismes financiers de l’UE ont continué à apporter un soutien économique important au pays »,  observe la chercheuse Rachel Kleinfeld.

 

Italie 

Lors de sa campagne, Giorgia Meloni avait fait de nombreuses promesses : réduction d’impôts, politiques familiales plus généreuses, bouclier tarifaire pour les prix de l’énergie, retour à la retraite à 60 ans (contre 67 ans)… Une fois au pouvoir à l’automne 2022, la nouvelle Première ministre italienne a été contrainte de revoir ses ambitions à la baisse. La faute à des marchés financiers qu’il a fallu vite rassurer. Au final, son programme économique s’ inscrit dans la lignée de celui de son prédécesseur Mario Draghi. Soit une politique néolibérale classique fondée sur des baisses d’impôts. 

Pour financer celles-ci, la Première ministre italienne s’est attaquée aux mesures de protections sociales. En juillet 2023, elle  annonçait la  suppression « du revenu de citoyenneté » – sorte de  RSA italien – et son remplacement par une allocation sous condition. Bien que le mécanisme a permis de sortir 1 million de personnes de la pauvreté, son coût de 8 milliards d’euros pour les finances publiques était jugé trop important. La mesure a été très bien accueillie par les entreprises quand elle a suscité la colère de la rue et des oppositions.  Et contrairement à ses promesses de campagne, Giorgia Meloni a durci les conditions d’accès à la retraite avant l’âge de départ légal, hormis quelques exceptions pour les mères de famille. 

La Première ministre italienne a également acté la fin  du « super bonus 110 »,  un mécanisme d’aide à la rénovation de logements très coûteux. Chiffrée à plus de 140 milliards d’euros pour les finances italiennes, la mesure a alimenté l’inflation en augmentant la demande en matériaux et a ouvert la porte à certaines fraudes. A première vue donc, sa suppression apparaît logique. Mais en y regardant de plus près, le dispositif a permis d’accélérer la rénovation énergétique des logements, soutenant ainsi la croissance. La hausse de l’investissement dans le secteur de la contribution a fortement contribué à la hausse du PIB entre 2019 et 2022. Cette année-là, la croissance s’était élevée à 4%. En 2023, année de la transformation du « super bonus 110 » en crédit d’impôt, la hausse du PIB a chuté à 0,8%. 

Enfin, sa volonté de taxer les superprofits des établissements bancaires à l’été 2023 a rapidement été vidée de sa substance. En moins de 48h, Giorgia Meloni faisait machine arrière, cédant aux pressions du lobby bancaire et des marchés financiers. 

 

Pologne 

De 2015 à 2023, le parti d’extrême droite Droit et Justice (PiS) a gouverné le pays; Il a abaissé l’âge de départ à la retraite, et a instauré un programme nommé « 500 + », consistant en l’octroi d’une allocation de 500 zlotys (115 euros) pour chaque nouvel enfant dans les familles polonaises. « La question des inégalités est prise en charge dans le discours des populistes de droite, soulignait Julien Vercueil, professeur d’économie à l’INALCO, l’institut national des langues orientales auprès de RFI en 2018. Une politique nataliste, étant donné qu’elle distribue des ressources sans distinction de revenu, va forcément avoir un impact plus important sur les populations aux revenus les plus modestes. Cela explique l’adhésion d’une certaine couche de la population à ce type de discours ». 

Pour autant, le choix de ne pas réserver cette allocation aux ménages les plus pauvres a fait débat en Pologne. Surtout cette politique favorise les différences salariales entre les femmes et les hommes. « Dans ces pays d’Europe de l’Est, on a la chance de ne pas avoir de gros écart salarial entre femme et homme, conséquence des régimes soviétiques, exposait Ana Boata, économiste chez Euler-Hermès, une filiale de l’assureur allemand Allianz auprès de RFI.  Avec ce type de mesures, on se dirige vers des politiques plus traditionnelles où les femmes restent à la maison avec les enfants »

Le passage de l’extrême droite n’a pas d’incidence majeure sur son rattrapage économique. De 2015 à 2023, la Pologne n’a connu aucune année de récession, (Hormis en 2020 en raison du Covid) La Pologne figure même parmi les économies de l’UE ayant le mieux résisté à la pandémie de Covid19.


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