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Future of Work | Slasheurs sachant slasher : on peut choisir sans renoncer

Pour ma première chronique, j’ai choisi le sujet du slashing. Sla-quoi ? Slashing ! Une tendance de fond que vous côtoyez peut-être sans jamais la nommer. Le mot vient de slash, la petite barre oblique qu’on utilise dans l’expression et/ou pour indiquer qu’on a le choix entre deux possibilités.

Future of | A partir du 13 mai, tous les jours sur forbes.fr, vous retrouverez un contributeur qui, chaque semaine, analysera les perpectives et les dynamiques à venir dans chacune des grandes thématiques traitées par Forbes : future of world (le lundi), of money (le mardi), of work (le mercredi), of tech (le jeudi) et sustainibility (le vendredi).

 

Les slasheurs, eux, choisissent sans renoncer, ce sont des cumulards : salariés pour une partie de leur vie, ils sont entrepreneurs pour une autre.  On en comptait 2 millions en 2022, ils seraient aujourd’hui plus de 6 millions à pratiquer ainsi le travail au pluriel. Si ce n’est pas nouveau, la multi-activité est un puissant marqueur de notre époque, qui dit notre besoin de sécurité et de stabilité, autant que notre soif de plus d’autonomie, d’équilibre et de sens. Je veux appartenir à un collectif qui m’élève, me protège, me forme, faire partie d’une aventure plus grande que moi, autant que j’aspire à être capitaine de ma vie, gérer ma propre boîte, établir mes règles et récolter le fruit de mes actions.

La multi-activité choisie est une réponse à cette ambivalence. Notre identité ne se réduit plus à un seul emploi, à une seule entreprise, une trajectoire linéaire. Face au désir de certains collaborateurs de cumuler emploi salarié et aventure entrepreneuriale, les dirigeants commencent souvent par exprimer une réticence. Ne risque-t-on pas de désagréger le collectif, la culture d’entreprise ?  Et un inévitable surmenage ne menace-t-il pas ces jongleurs trop confiants ? 

Le risque d’une charge de travail trop importante est réel et il faut l’adresser, comme Mazars, SThree et d’autres entreprises pionnières en slashing avec qui j’ai pu mener des expérimentations dans le cadre du Do Tank Future of Work*, qu’une organisation a tout à gagner à encourager ses salariés à avoir des vies professionnelles plurielles.

D’abord parce que le slashing est une opportunité unique pour attirer et engager les talents. Il est bon de questionner les fondements du contrat de travail salarié si on veut s’aligner avec le sens recherché par ses collaborateurs. Quand mon entreprise me laisse la possibilité de développer un side project, elle ne me met plus en demeure de choisir entre elle et un projet qui me donnerait le sentiment de me réaliser pleinement et entreprendre ma vie ; je peux vivre les deux, nos intérêts convergent.  Comme dit le proverbe : « il faut laisser la cage ouverte pour que l’oiseau revienne ».

Le slashing est la permaculture des entreprises – j’adore l’image, empruntée à Marielle Barbe qui a écrit avant tout le monde Profession Slasheur. Comme la permaculture qui fait cohabiter différentes espèces pour rendre la terre durablement fertile, la multi-activité choisie est régénératrice : accomplissement personnel, développement de compétences plus larges, adaptabilité accrue, autant d’atouts qui bénéficient à l’entreprise en quête d’agilité et d’audace pour se réinventer.

Pour le collaborateur enfin, le slashing peut être une bonne première étape avant de lâcher la rampe du salariat pour se mettre à son compte. L’occasion de tester sa motivation, ses ressources, ses aptitudes à développer une activité qui marche et qui dure – c’est-à-dire à aller arracher tous les mois son salaire. Entreprendre est tentant mais précaire, et certainement pas la seule façon de trouver du sens. On peut toujours innover dans le cadre.

 

Comment encadrer juridiquement le slashing ?

 

  • Tous les salariés de droit privé peuvent slasher. Les contrats de travail doivent le permettre. Il faut revoir la trame de ses contrats et supprimer ou limiter la clause d’exclusivité ;
  • Il convient d’informer sur tous les dispositifs offerts : possibilité d’un temps partiel, d’un congé pour création d’entreprise…
  • Élaborer une charte du slashing permet de sécuriser les parties sans en faire une obligation ;
  • La charte définit la multi-activité, ce que c’est, pourquoi et comment on le fait. Il est important de préciser que c’est un avantage qu’offre l’entreprise et un choix personnel, et que le « side project » concerne une activité professionnelle et rémunératrice ;
  • Préciser qui est éligible, les contrats concernés, les postes spécifiques, l’ancienneté, ainsi que toutes les conditions : temps minimal de repos, entretiens de suivi…
  • Rappeler les engagements de l’entreprise et du slasheur : informer l’entreprise en cas de cumul d’activité salariés, obligation de loyauté, directe ou indirecte ;
  • Contractualiser le slashing quand c’est à la demande du salarié ; 
  • Impliquer ses managers en amont permet de les rassurer. Ils ne peuvent pas s’opposer au slashing mais gagneront à être partie prenante de la charte du slashing ;

 

* Le Do Tank Future of Work est le club des entreprises qui partagent et expérimentent ensemble les pratiques RH les plus innovantes pour attirer, onboarder, former, manager, retenir les talents, qu’ils soient salariés ou freelances, transformer son organisation et sa culture managériale.

 


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