Rechercher

Fusalp ou le réveil d’une belle endormie

En rachetant Fusalp en 2013, Sophie Lacoste, aux côtés d’Alexandre Fauvet son associé et Directeur Général, a opéré un tournant décisif. Avec une déclinaison urbaine qui représente désormais 50 % des collections, la marque pionnière du vêtement de montagne a doublé son CA depuis 2020 (40 millions d’euros). La petite-fille de René Lacoste nous livre ses cinq commandements pour réveiller une belle endormie.

 

  1. Qui sommes-nous ?

Il faut construire la plateforme de marque en cherchant les mots qui la caractérisent. À l’inverse, ont été bannies certaines expressions comme « vintage » qui enferment la marque. Ce n’est pas parce que Fusalp a 70 ans qu’il faut sortir des pièces des années 60. Cela ne durerait pas. Si on doit identifier l’héritage de la marque, c’est pour mieux l’inscrire dans le présent, en la modernisant. Comme par exemple son logo (dont le coq tricolore appartient presque à la mémoire collective) que l’on a remis au goût du jour. On a également travaillé certains points reconnaissables comme les lignes verticales, les smocks à losanges ou le cintrage en softshell. On a cette conversation permanente entre le passé et le futur.

 

  1. Que racontons-nous ?

Que dit notre marque ? Que veut-on dire d’elle ? Dans le cas de Fusalp, que l’on trouvait magnifique mais tombée dans l’oubli, on s’y est pris de deux manières. Tout d’abord, six mois après sa reprise, nous avons lancé une collection capsule avec Colete qui est un propulseur fantastique, car toutes les personnes qui travaillent dans notre industrie lisent la newsletter de Colete le lundi matin. Cette association nous a permis de marcher sur nos deux jambes : la mode et le sport. Ensuite, nous avons ouvert notre première boutique à Paris, dans le Marais. Le choix d’un quartier branché était délibéré pour décloisonner notre image, trop associée aux vêtements de ski. Fusalp fait un twist vers les vêtements de sport mais avec un style urbain, alliant style et technicité. L’idée maîtresse de Fusalp est de réinventer un vestiaire en adéquation avec nos manières de vivre.

 

  1. Quelles sont nos valeurs ?

Une fois définies, il est important de nourrir ces valeurs pour qu’elles gardent leur authenticité. Cela permet d’éviter l’écueil du beau concept marketing qui s’essouffle. Une marque ne doit pas être un concept figé mais au contraire revendiquer une forme de pensée. Il y a plein de manières de le faire. En ce qui nous concerne, cela passe par notre implication dans l’art, en particulier le festival Art en scène. On a récemment collaboré avec le plasticien Xavier Veilhan qui a fait un spectacle sur glace avec des patineurs habillés par Fusalp. Tout cela nous permet de sortir de nos frontières et donne de la consistance à notre communication et à la direction artistique. On a vraiment besoin de stimuler la créativité et l’imaginaire de nos équipes, au risque de tourner rapidement en rond. C’est pour moi un grand point de vigilance.

 

  1. Quelle est notre valeur ajoutée ?

Avec l’acquisition de Fusalp, pionnière du fuseau, on a également récupéré des savoir-faire inestimables. Il faut les conserver, les faire grandir et les transmettre au sein des équipes, au fil des fusions et des évolutions du personnel. II était essentiel pour nous de capitaliser sur la valeur ajoutée technique en poursuivant cette recherche d’innovation : on a équipé l’entreprise d’un laboratoire d’ingénierie textile (cinq ingénieurs). On vient de déposer un brevet technique, le softshell, qui reprend l’esprit du double vitrage sous forme de plusieurs matériaux associés entre eux, toujours plus fins et performants. Le nerf de la guerre est en quelque sorte la légèreté, qui est très difficile à obtenir. Fusalp, ce n’est pas la technique pour la technique, ni le style pour le style. C’est vraiment l’aller-retour entre les deux. L’écologie dans l’innovation est également un prérequis aujourd’hui : on est signataire du Fashion Pact* et on travaille la durabilité de la marque via un programme de réparabilité à vie des produits, mais aussi une garantie cinq ans à l’international qui concerne une large sélection de vêtements.

 

  1. Comment créer de la cohésion autour du projet ?

Bien constituer l’équipe est tout l’enjeu d’une start-up de 70 ans ! Le fil rouge de Fusalp, c’est l’aventure humaine. Celle d’une marque qui reste gravée dans l’esprit de ceux qui ont connu l’époque des champions de ski comme Jean-Claude Killy et qui reste un état d’esprit. Nous n’avons pas les mêmes arguments de salaire qu’un grand groupe quand il reprend une belle endormie. Le sujet du recrutement est central car, pour arriver au Fusalp de demain, le défi est de trouver les bons talents et de les attirer chez nous. Ils doivent avoir cet esprit start-up, tout en étant capables de projeter la marque à l’international et au bon niveau. Il faut ensuite structurer ces équipes pour qu’elles soient soudées autour de notre projet. On peut se féliciter depuis environ deux ans d’avoir une excellente équipe, hyper enthousiaste.

 

FUSALP EN 5 DATES

Avec un chiffre d’affaires de 40 millions d’euros (qui a doublé en deux ans ), la marque compte 70 salariés et sept filiales de distribution à l’étranger. Elle est présente dans 20 pays et dispose d’un réseau de 49 boutiques, dont 12 à Paris mais également à Marseille, Nice, Deauville et Aix-en-Provence.

1952 : lancement de la marque Fusalp, contraction de « fuseau » et « Alpes ». Pionniers dans le prêt-à-porter dédié à la montagne, Georges Ribola et René Veyrat, tailleurs de leur métier, conjuguent technicité et style avec le fuseau en stretch.

1964 : partenaire de l’équipe de France des JO d’hiver. Jusqu’en 1972, Fusalp habille l’équipe de France des JO d’hiver qui compte de nombreux champions comme Jean-Claude Killy ou encore les sœurs Goitschel.

1984 : dépôt de bilan. Confrontée à des problèmes de gestion, la société Fusalp fonctionne au ralenti.

2013 : rachat de Fusalp. Un nouveau chapitre (plus haut de gamme et plus large que la montagne) s’ouvre avec Sophie, Philippe, Mathilde Lacoste, et Alexandre Fauvet qui détiennent 77,6 % du capital de la société.

2022 : ouverture d’une première boutique à Aspen (États-Unis). Après l’Europe et l’Asie, Fusalp, dont la moitié de la clientèle sur internet est américaine, s’implante outre-Atlantique.

 

<<< A lire également : Fusalp devient l’équipementier officiel de l’équipe de ski alpin et para-alpin de GB Snowsport >>>

Vous avez aimé cet article ? Likez Forbes sur Facebook

Newsletter quotidienne Forbes

Recevez chaque matin l’essentiel de l’actualité business et entrepreneuriat.

Abonnez-vous au magazine papier

et découvrez chaque trimestre :

1 an, 4 numéros : 30 € TTC au lieu de 36 € TTC