Depuis leur intégration dans la loi Pacte en 2019, nous observons un fort engouement pour les entreprises à mission en France. D’après l’Observatoire des sociétés à mission, elles sont plus de 1 800, contre seulement 200 six ans plus tôt. Mais en 2025, peut-on concilier la quête de profit avec une mission sociale et environnementale ?
Une contribution de Philippe Pinault, CEO et cofondateur de Talkspirit
En 2025, le profit à tout prix n’est plus une option !
Depuis quelques années, nous subissons des événements hétérogènes comme : des crises climatiques sans précédent, la pandémie de Covid, l’accroissement des inégalités et l’appauvrissement de la population. Ces bouleversements mettent en lumière les limites d’un capitalisme purement axé sur les rendements financiers, et corollairement, l’absolue nécessité d’un nouveau système, plus humain !
En 2019, Marc Benioff, PDG de Salesforce, nous alertait dans une tribune du New York Times : « Le système actuel a engendré de profondes inégalités. Pour y remédier, il faut que les entreprises et les dirigeants accordent autant d’importance à leur mission qu’à leurs profits. » Une vision avant-gardiste pour l’époque puisqu’elle reflétait déjà une aspiration désormais d’actualité : un modèle alternatif couplant performances économiques et finalité sociétale.
Cette alternative pourrait très bien être le “For Purpose”, inspiré des travaux de Muhammad Yunus (Social Business: A Step Towards Creating a World Without Poverty), qui n’est pas sans nous rappeler les principes de “l’entreprise à mission” :
• le “For Profit” qui, motivé par l’enrichissement des actionnaires, perd de son attrait pour une jeunesse en quête de sens.
• le “Non Profit”, dépendant de subventions et dons, reste fragile et limité par son modèle économique.
• le “For Purpose” combine viabilité économique et impact positif, devenant une solution hybride répondant aux enjeux modernes.
Pourtant, aussi censé que puisse paraître le raisonnement de Yunus, j’entend encore (trop) souvent des voix s’interrogeant sur son bien-fondé dans un contexte économique particulièrement compliqué. Alors pour les détracteurs, comme pour les indécis, je vais tenter d’expliquer l’intérêt de devenir une entreprise à mission.
Pourquoi devenir une entreprise à mission ?
Devenir une entreprise à mission c’est avant tout un engagement. C’est incarner cette alternative répondant aux attentes croissantes de la société en termes de développement durable, de responsabilité sociétale et d’éthique économique. À mon sens, devenir une entreprise à mission est un impératif, qui permet de remettre l’entreprise au service du bien commun, et de dessiner les contours de l’entreprise de demain.
Une opportunité stratégique et économique
Aujourd’hui, définir une mission d’entreprise dépasse le simple cadre de l’éthique, c’est désormais un véritable levier de croissance. D’ailleurs, une récente étude d’IBM France nous informe que 74 % des dirigeants français considèrent que le développement durable améliore les performances commerciales. Un chiffre qui illustre les nouvelles tendances qui gagnent notre société :
• Les consommateurs privilégient de plus en plus les entreprises engagées, exigeant des preuves concrètes d’un impact positif.
• Les jeunes talents recherchent un emploi porteur de sens, motivés par une mission qui dépasse le simple profit.
Un modèle résilient et innovant
Devenir une entreprise à mission, c’est s’ouvrir à l’opportunité d’une transformation profonde. En effet, les organisations qui franchissent le pas évoluent vers des structures plus agiles (qui favorisent notamment une gouvernance partagée), résilientes (face aux changements environnementaux et technologiques), inclusives et innovantes, prêtes à répondre aux enjeux de demain.
Mais attention, la qualification d’entreprise à mission ne s’improvise pas, il faut remplir certains critères et procéder par étapes.
Entreprise à mission : cadre juridique et prérequis
Mais finalement, comment devient-on une entreprise à mission ?
En France, nous avons la chance de pouvoir nous appuyer sur la loi Pacte qui encadre strictement ce modèle, apportant une feuille de route aux entreprises, qui garantit sa crédibilité et son efficacité.
Voici les étapes clés pour devenir une entreprise à mission :
• Définir une raison d’être claire, inspirante et réaliste, qui exprime les objectifs sociaux et environnementaux de l’entreprise.
• Traduire cette raison d’être en objectifs concrets, mesurables et pertinents.
• Inscrire ces éléments dans les statuts de l’entreprise, ce qui les rend juridiquement contraignants.
• Mettre en place un comité de mission, chargé de superviser et d’évaluer la réalisation des objectifs.
Si vous pouvez cocher toutes ces cases, alors bravo, vous méritez la qualification d’entreprise à mission, et vous êtes déjà prêts à relever les défis de demain !
Pour conclure, j’aimerais rappeler que “For Profit” et “For Purpose” ne sont pas antinomiques, mais au contraire synergiques (sans profits, le “for purpose” ne peut exister sur le long terme). Et je fais le pari que ce qu’on appelle la “Triple Bottom Line” (People, Profit, Planet) dans la mesure de la performance d’une organisation va continuer à prendre de plus en plus d’importance cette année et dans le futur.
En effet, qu’il soit question de startups, de PME ou de grandes entreprises, toutes ont un rôle à jouer dans ce mouvement. Alors, entrepreneurs, dirigeants, ne loupez pas cette opportunité : l’économie vertueuse de demain se construit dès aujourd’hui !
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