Dans un communiqué publié durant l’été, le Conseil de l’Union européenne a indiqué être parvenu à un accord provisoire avec le Parlement européen sur la proposition de règlement européen portant sur les crypto-actifs. L’adoption de ce règlement permettra d’instaurer un cadre juridique harmonisé au niveau européen en matière de crypto-actifs.
Actuellement, la plupart des crypto-actifs n’entrent pas dans le champ d’application de la législation européenne sur les services financiers et peu de pays membres de l’Union européenne ont légiféré spécifiquement en ce domaine. L’adoption du règlement sur les marchés de crypto-actifs, dit règlement « MiCA », a vocation à uniformiser la réglementation au niveau européen, tant en matière d’émission que de fourniture de services sur crypto-actifs.
Le règlement MiCA permettra également de mieux protéger les consommateurs et d’éviter les systèmes frauduleux. A cet égard, l’AMF a indiqué être favorable à une entrée en application rapide du règlement MiCA.
Le communiqué du 30 juin 2022 évoque certaines règles qui devraient figurer dans la version définitive du règlement européen sur les crypto-actifs.
Une supervision obligatoire des prestataires de services sur crypto-actifs
Les prestataires de services sur crypto-actifs (PSCA) auront dans toute l’Union européenne l’obligation d’obtenir un agrément aux fins d’exercer leurs activités. Notons que cette obligation pour les PSCA n’est pas surprenante : elle existe depuis longtemps pour les prestataires de services d’investissement qui, en vertu de la règlementation sur les marchés d’instruments financiers (MIF), ont l’obligation d’être agréés pour exercer leurs activités. Un tel agrément est d’ailleurs d’ores et déjà exigé en France concernant certains services portant sur des actifs numériques, dans le cadre du régime juridique des prestataires de services sur actifs numériques (PSAN) introduit en 2019.
Le communiqué insiste également sur le fait que les prestataires de services sur crypto-actifs devront respecter certaines « exigences fortes » en matière de protection des consommateurs. A ce titre, l’Autorité des marchés financiers (AMF) a précisé que ces exigences sont proches du régime français actuel. Une fois agréés, les prestataires pourront bénéficier du passeport européen pour fournir leurs services dans l’ensemble des pays de l’Union Européenne.
Une protection de l’intégrité du marché des crypto-actifs
Le règlement MiCA inclura des règles sur les abus de marché impliquant des crypto-actifs, notamment en matière de manipulation de marché et de délit d’initié. Le communiqué précise que ces règles s’appliqueront sur n’importe quel type de transactions ou services.
A la lecture de la proposition de règlement MiCA, il ne fait aucun doute que les institutions européennes se sont inspirées de la réglementation européenne existante sur les abus de marché (MAR) qui vient sanctionner les opérations d’initiés et les manipulations de marché concernant les instruments financiers (ces derniers n’incluant pas les crypto-actifs).
Notons néanmoins qu’à ce stade, la proposition de règlement MiCA n’est pas identique au règlement MAR concernant les abus de marché. Par exemple, la « tentative » d’opération d’initié sur crypto-actifs n’est actuellement pas sanctionnée dans la proposition de règlement.
L’application d’un régime spécifique pour les émetteurs de « stablecoins »
Le communiqué insiste en outre sur le fait que le règlement MiCA créera un cadre « solide » applicable pour les émetteurs de « stablecoins » afin de protéger les consommateurs. Rappelons que le « stablecoin » est un type de crypto-actifs imaginé pour lutter contre la volatilité des cours des crypto-actifs dépourvus de sous-jacent économique.
Les émetteurs de stablecoins devront constituer une réserve suffisamment liquide, avec un ratio de 1/1 et en partie sous forme de dépôts. De telles règles ne sont pas sans rappeler celles déjà applicables aux établissements de crédit, ces derniers ayant l’obligation de respecter des ratios minimaux de fonds propres et de liquidité. Il est précisé dans le communiqué du 30 juin 2022 que les détenteurs de stablecoins pourront se faire rembourser à tout moment et gratuitement.
La mise en place d’obligations en matière d’informations liées à la finance numérique « durable »
Le communiqué insiste enfin sur l’obligation qu’auront les acteurs du marché des crypto-actifs de déclarer des informations concernant leurs empreinte environnementale et climatique. L’élaboration des projets de normes sur le contenu, les méthodes et la présentation des informations sera confiée à l’ESMA (Autorité européenne des marchés financiers).
La mise en place de ces obligations déclaratives s’inscrit dans le cadre réglementaire que les autorités européennes se sont attelées à dresser au cours de ces dernières années en matière de finance durable, notamment avec l’adoption du règlement Taxinomie.
On peut s’attendre à ce que les autorités de marché compétentes et, notamment l’AMF, exercent de manière accrue leurs pouvoirs de surveillance et d’enquête ainsi que de sanctions. Outre ces aspects règlementaires, on peut également s’attendre à ce que les contentieux se multiplient sur des sujets aussi divers que le blanchiment, la fraude fiscale ou encore la corruption, qui nécessiteront sans aucun doute une coopération internationale entre les autorités des différents pays.
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