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Filière française de l’optique : à quand une réglementation stable et un accompagnement pérenne ?

Relancer notre industrie, fabriquer en France tout ou partie des produits que nous consommons n’est pas seulement un impératif économique, pour l’emploi ou pour maintenir les savoir-faire. C’est aussi un engagement en faveur du climat. Plus on fabrique loin des lieux de consommation, plus l’empreinte carbone est élevée. C’est enfin un impératif d’indépendance en matière de fabrication de montures de lunettes. Aujourd’hui la fabrication de masse se fait en Italie, en Espagne, en Inde ou en Chine.

Lancé il y a 10 ans, le salon du Made In France, vient cette année plus que jamais apporter la preuve que l’ère du marketing bleu blanc rouge a bel et bien passé le relais à celle de l’action, concrète. Les enjeux climatiques et humains l’exigent. Mais, il persiste d’énormes freins.

Nous, dirigeants, illustrons ainsi la vraie possibilité d’une filière optique française, en termes de production et de distribution et dans l’entièreté de la chaîne de valeur. 

Pourtant, le chemin reste rude : les effets d’annonce sur ce sujet ne doivent pas cacher les difficultés auxquelles l’un comme l’autre sommes confrontés, dans un contexte économique et réglementaire plus complexe que jamais.

Certains voudraient nous faire croire à la belle histoire qu’il est possible de relocaliser d’un claquement de doigts, l’ensemble de la filière optique tout en proposant des tarifs abordables. Mais c’est une illusion qui empêche surtout de prendre toute la mesure des problèmes.

 

Après avoir connu son apogée entre les années 1900 et 1980, le bassin lunetier a connu un déclin important. Si la filière relève la tête aujourd’hui, il faut être réaliste, l’industrie lunetière, contrairement à celle des verres, peine aujourd’hui à retrouver de l’essor. Seuls, nous ne pouvons pas porter à bout de bras une industrie trop longtemps expatriée, qui doit faire face aujourd’hui à une pénurie de talents ou à des problèmes d’énergie et de transport qui déstabilisent sans cesse le marché.

Malgré tout, nous choisissons d’y croire, encore et toujours. Pour nos deux sociétés Atol et Novacel le Made in France et l’Origine France Garantie sont bien plus que de simples slogans. C’est un véritable état d’esprit ancré profondément dans notre ADN.  Pour certains secteurs d’activité cela n’aurait rien de « surprenant » ou « d’original », pour celui de l’optique, c’est une gageure.

 

Chez Atol, c’est une histoire longue déjà de presque 20 ans maintenant, puisque l’enseigne était la première à rapatrier en 2006 sur le sol français la production de sa collection Ushuaïa optique, puis nos collections à branches interchangeables et aujourd’hui Oneo ou Lexilens. Pour Novacel, c’est une même philosophie qui préside : fabriquer uniquement en France pour limiter l’empreinte carbone, soutenir l’emploi local, avoir une meilleure traçabilité et respecter les droits de l’organisation internationale du travail.

 

En 2020, nous avons fait le choix de combiner les expertises Atol et Novacel pour proposer des produits en phase avec les attentes des consommateurs. Les verres de prescription Anaxio, fabriqués par Novacel pour Atol, intégrant toutes les options de traitement, équipent aujourd’hui la gamme ONEO d’Atol.

Osons le mot, pour Atol comme Novacel, arriver à concevoir puis commercialiser cette collection vaut exploit. Rester compétitif face aux concurrents asiatiques demande d’investir massivement en R&D et de rester à la pointe de la technologie et cela a un coût.

 

Agnès Pannier-Runacher, alors Secrétaire d’Etat auprès du ministre de l’Economie et des Finances, déclarait en juin 2021 : « Le made in France n’est pas un slogan ! » exhortant les industriels à fabriquer en France. Oui fabriquons et relocalisons. Mais pour que la filière française puisse encore avoir de beaux jours devant elle et devenir pérenne, elle doit pouvoir compter sur des mesures de stabilité et d’accompagnements pour continuer d’exister et faire face aux défis qu’ils soient climatiques, énergétiques ou humains :

– La réforme du 100% santé en est le contre-exemple absolu, favorisant la fabrication à bas coût, en Asie, avec des matériaux non recyclés, non recyclables et à fort bilan carbone.

– De même, le texte du Projet de Loi de la Sécurité sociale (PLFSS 2023) est une aberration totale, encadrant les marges de toute la filière alors que l’Assurance Maladie ne met pas la main à la poche. Même les complémentaires santé qui prennent en charge le remboursement des lunettes sont contre ce texte…

Dans ce contexte, comment accompagner les industriels français pour leur permettre d’investir dans du matériel ou pour former la nouvelle génération qui fera perdurer un savoir-faire ancestral, si le cadre juridique et légal change sans cesse ? Stop à ces incessants changements législatifs, pilotés en complète contradiction avec des objectifs industriels surtout politiques, annoncés à grands renforts médiatiques.

 

Alors que la France a développé une expertise dans l’optique qui lui a permis d’acquérir un leadership mondial et de faire émerger une filière résolument innovante, cette industrie de pointe doit jouer un rôle moteur pour la croissance et être en capacité d’affronter les enjeux économiques et sociétaux du XXIè siècle.

 

Tribune rédigée Eric Plat, PDG d’Atol les Opticiens / Jenkiz Saillet, PDG Novacel

 

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