Capitol Records qui fut le 1er label de la côte Ouest des États-Unis créé en 1942 appartient désormais à Universal Music Group (numéro 1 Mondial de la musique) depuis le rachat d’EMI en 2011.
Le label a traversé les modes et les époques, des Beatles et de Franck Sinatra à Sam Smith, Katy Perry ou le rappeur Lil Baby (+ gros vendeur aux US en 2020 devant Taylor Swift). La filiale française n’est pas en reste et se positionne aujourd’hui comme le plus gros label généraliste avec un catalogue d’artistes aussi hétérogène qu‘attractif.
Dirigé par Alexandre Kirchhoff, 42 ans, ce fils d’entrepreneur a grandi en banlieue parisienne jusqu’à ses 19 ans. Il part à Los Angeles finir ses études en travaillant au département international d’Interscope Records (Eminem, Dre, Marilyn Manson…) puis fonde 15 ans plus tard le label de rap dur Millenium chez Universal Music France où il développe les carrières de rappeurs devenus icônes des jeunes tels que Gradur, Niska ou Vald. Tout aussi discret dans les medias que dans sa vie de père de famille, ce passionné de gastronomie et de sport d’adrénaline est obsédé par les tubes de musique urbaine qu’il produit ou coproduit avec ses nombreux partenaires.
Après 22 ans de carrière chez Universal, le label Capitol qu’il dirige depuis bientôt 6 ans devient #1 en part de marché sur les plus grosses playlists de streaming rap Spotify ainsi que sur Skyrock (1ere radio Hip Hop d’Europe). Ce jeune dirigeant devient la personnalité la plus influente du rap français début 2022 (via un classement du site BooskaP) entre une Victoire de la Musique la même année avec la chanteuse pop Barbara Pravi (révélation féminine) et ses 5 prix récompensés aux derniers NRJ Music Awards grâce à des succès beaucoup plus populaires : DJ Snake, Dadju, Vitaa&Slimane.
Quel est le principe et comment fonctionne le label CAPITOL ?
Alexandre Kirchhoff : Mon label appartient au groupe Universal Music France dirigé par Olivier Nusse, son Président, avec qui je travaille depuis mes débuts dans l’entreprise. Capitol est un label de musique qui compte parmi ses artistes français, Florent Pagny, Slimane ou DJ Snake mais une grande partie de ses revenus provient des musiques urbaines avec des artistes tel que Booba, Niska, Koba La D ou Dadju…
La consommation passe à travers des ventes de CD, du streaming, de la vente directe aux fans (D2C), des NFTs, du branding et du live. Le label héberge aussi des labels de producteurs de hip hop indépendants. J’ai toujours privilégié les équipes réduites, plus flexibles avec une forte mixité culturelle symbolisée par nos salariés ou partenaires. J’incarne quant à moi la culture du label avec les valeurs de travail, passion et droiture. Chaque artiste, chaque producteur ou manageur doit trouver un interlocuteur chez nous avec les mêmes codes et parlant la « même langue ». Le core-audience de nos artistes sont les jeunes de 13 à 25 ans mais nous nous sommes diversifiés ces derniers mois avec des artistes populaires qui s’adressent à un public plus large et plus adulte.
Comment est née l’idée de cette structure ?
Les métiers liés à l’industrie musicale ont évolué de pair avec la technologie. Aujourd’hui, un amoureux de la musique à la retraite a pu voir l’essor du vinyle, l’arrivée du CD puis la crise du CD, la révolution d’Internet et la piraterie jusqu’à l’apparition des plateformes de streaming où la majorité des revenus se fait désormais grâce à l’abonnement. Il est essentiel que les labels, au cœur du réacteur de ces métiers s’adaptent à la manière de consommer et à la manière de produire. J’ai débuté chez Capitol au début de l’ère du streaming et du nouvel âge d’or du rap français.
J’ai toujours voulu me concentrer sur la musique qui plait aux jeunes et donc de nos jours, sur l’urbain. Je me suis rapproché des plus gros producteurs indépendants avec qui nous avons créé des entités : avec Anne Cibron, manageur de Booba, Oumardino co-fondateur de Def Jam France, Tefa & Sofiane (rappeur, acteur, comédien) puis Julien Kertudo (fondateur du label indépendant Musicast qui avait signé Jul et PNL). Personne ne se croise, les cultures sont différentes et le style musical est unique à chacun. Après avoir construit un catalogue solide un partenariat s’est naturellement créé avec Indifference Prod qui représente pour moi l’excellence de la musique populaire.Nous finissons avec eux le travail sur le projet de Vitaa & Slimane et nous les accompagnons sur les carrières d’artistes tel que Slimane, Amel Bent ou Dadju. Il est essentiel que la structure évolue avec le temps. J’aime la jeunesse et les nouvelles tendances. C’est ainsi que le label se sent au plus proche des audiences de nos artistes.
Alexandre Kirchhoff : Le label a généré près de 10 milliards d’écoutes/streams tout artiste confondu l’année dernière en plus des revenus synchro, partenariats marques, vente de CD ou NFTs
Quels sont vos objectifs à court terme ?
Nous sommes le point de ralliement entre les artistes, les plateformes et les fans. Mon objectif premier est de continuer, grâce à mes équipes et celles d’Universal Music France d’attirer les talents avec lesquels j’ai envie de travailler. Celles et ceux en qui je crois et qui, à l’écoute de leur musique, continuent de me « donner la chair de poule ». Pour se faire, il est de notre devoir de prouver qu’il faudra toujours et en tout temps des femmes et des hommes pour continuer d’accompagner les plus grandes carrières d’artistes.
Les plus grandes stars mondiales continuent de travailler avec des labels et la désintermédiation ne peut pas prendre le lead dans les métiers créatifs. Nous sommes amis, alliés, coachs, partenaires business, conseillers artistiques de nos artistes. Les succès dépendent aussi de la qualité des relations humaines d’un artiste avec son entourage. Pour créer de la valeur et faire des tubes, l’artiste doit travailler sereinement pour pouvoir se concentrer sur ses textes et sa production tout en ayant confiance en son entourage et en son label qui, sous son contrôle, travaillent sur les stratégies marketing et promotionnelles de ses projets. Nous devons faire des tubes, plus de tubes et accompagner les artistes qui le veulent et qui en sont capables sur la route du succès.
Quel est le modèle économique ?
Plus de 90% des revenus de Capitol France provient de la production française. Plus de 50% des revenus provient de l’exploitation de notre catalogue travaillé et signé il y a moins de 8 ans. Notre typologie de signatures génère principalement des revenus issus du streaming payant (par abonnement). Les plus gros tubes que nous avons défendus (Réseaux de Niska, Habitué de Dosseh, Mwaka Moon de Kallash & Damso, DKR de Booba, Ne reviens pas de Gradur) continuent chaque année d’être écoutés des millions de fois.
Ces dernières semaines, Rencontre de Disiz Damso ou Filtré de Timal Gazo tous deux #1 du top se maintiennent en haut des charts. Le label a généré près de 10 milliards d’écoutes/streams tout artiste confondu l’année dernière en plus des revenus synchro, partenariats marques, vente de CD ou NFTs. Cette ligne éditoriale s’inscrit dans l’état actuel du marché de la musique en France où le rap et les musiques urbaines représentent 61% du top200 streaming. Les plateformes de streaming restent prescriptrices des découvertes musicales pour 94% des 16/24 ans (sources rapport annuel SNEP)
Quelles Relation avez-vous avec les médias / partenaires new business ?
Nous bénéficions d’accords commerciaux entre la maison mère et les différents acteurs sur le digital : les plateformes tel que Spotify Deezer ou Apple mais aussi les nouveaux entrants comme Twitch ou TiKTok. Je parle directement aux directeurs radios qui jouent un rôle important dans la construction d’un hit d’aujourd’hui. Le succès radio ne va pas forcément de pair avec le succès stream et le canal de rémunération est différent mais ces approches sont complémentaires. Mes actions sont faites en parallèle de celles des attachés de presse et de l’équipe promo. J’agis de la même manière avec les plateformes avec les équipes tranversales chez Universal avec qui nous travaillons main dans la main. Les résultats hebdomadaires prouvent que cette méthode de fonctionnement est la bonne.
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Comment Capitol se positionne sur la nouvel trend et tendances musicales à la mode ?
Je définis la trend comme une manière de consommer. Nous devons en tant que leader être le premier label à accompagner des talents sur le marché français comme nous l’avons fait l’été dernier avec les tubes sur Tik Tok de MHD, Marwa Loud, Bolemvn ou 1pliké actuellement #1 du top 50 France depuis 7 semaines. Nous avions aussi travaillé avec twitch il y a plus d’un an sur l’avant dernier projet de l’artiste Dinos.
Concernant les tendances musicales, il est de la responsabilité des labels de mettre en valeur, grâce aux différents véhicules media, les nouveaux genres musicaux à la mode. Le bon label doit avoir les meilleurs artistes de chaque genre : il doit être le premier à les mettre en relation avec les bons producteurs compositeurs si besoin. Dans un marché ultra concurrentiel à bulle spéculative, nous nous efforçons d’être les meilleurs. La création de valeur et notre économie en dépendent : signer ceux en qui l’ont croit et prouver que nous sommes le partenaire idéal. Être les premiers sur les nouveaux genres en arrivant sur les négociations avant les autres est aussi une des clés.
Quel est l’avenir du rap en France et du streaming en général ?
Au sein d’un même genre, les déclinaisons et les courants voient leur temps de vie varier selon les styles. La musique Hip Hop au sens large va perdurer selon moi encore de nombreuses années. Les jeunes des générations à venir n’arrêteront pas d’ici demain d’écouter du rap ou de la pop urbaine, ce style va évoluer comme ce fut le cas pour le rock ou l’électro : regardez par exemple actuellement l’HyperPop au Japon ou l’influence du 2step & de la Jersey drill en France. Mais chez nous, le rap dur est de moins en moins consommé, sûrement aussi plus dilué car le profil des consommateurs de streams vieillit et s’élargit géographiquement (croissance exponentielle à Lyon par exemple).
Avec une plus grande diversité musicale au sens large, on trouve aussi plus de mélodies, plus de textes et de nouvelles générations d’artistes émergent grâce à Twitter ou au retour de Soundcloud. Le développement en Afrique peut aussi influencer la musique comme ce fut le cas avec l’Afrique du sud ou le Nigeria : j’ai travaillé à mes début les 46 albums de Fela Kuti (co-managé à l’époque par un français) puis j’ai vu grandir le phénomène Afrotrap 40 ans plus tard grâce à mon ami & grand artiste MHD ; l’influence de Wizkid et Burna Boy ces derniers temps en sont un autre exemple. Dans tous les cas, le streaming se porte à merveille, et le taux de pénétration des abonnements streaming confirme une marge de progression plus qu’encourageante pour l’industrie mondiale. Sans oublier la croissance exponentielle des ventes de supports physiques aux super-fans (D2C) et le retour foudroyant du vinyle.
Élu personnalité la plus influente du rap français en 2022 : https://www.booska-p.com/personnalite/alexandre-kirchhoff/
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