EXCLUSIVITE FORBES | Il était une fois… Elon Musk ! Probablement l’un des hommes les plus disruptifs du XXIeme siècle. Personnage hors norme d’une saga quotidienne, avec en point de mire Tesla et l’aventure SpaceX. Mais qui est vraiment Elon Musk ? Un chef d’entreprise multi-casquette ? Quelles sont ses conquêtes et ses échecs ? Elon Musk, deuxième fortune mondiale, à la fois respecté et décrit parfois comme fantasque. Nous vous proposons, en exclusivité, des extraits d’une biographie fouillée, écrite par l’historien des sciences Luc Mary. Bienvenue dans Elon Musk – L’homme qui invente notre futur (Editions de l’Archipel).
Créer une banque en ligne ? Un défi pour Musk autrement plus risqué qu’un simple logiciel aidant les entreprises à se développer sur le Web. Les obstacles sont ici d’une autre nature. Il lui faut à présent convaincre autant les banquiers que les clients. Passer du mode papier au numérique n’était pourtant pas une sinécure, mais désormais il s’agit de publier en ligne des informations financières privées à propos de millions de comptes bancaires.
D’aucuns rechignent à saisir les numéros de leurs cartes de crédit sur un écran, de peur d’être piratés. L’univers des finances est par ailleurs solidement établi, avec ses règles, son mode de fonctionnement, ses traditions ; un monde où notre jeune homme de vingt-huit ans apparaît comme un néophyte, ou encore comme un homme seul qui voudrait affronter toute une armée. Autant vouloir déplacer les montagnes.
Elon entend pourtant mettre le paquet. Pas moins de 12 millions de dollars sont investis pour créer sa première start-up financière. Répondant au nom ambigu de X.com, la nouvelle société d’Elon est inaugurée en novembre 1999, le soir même de Thanksgiving. Pour la monter, Elon n’a pas hésité à potasser des nuits durant tous les ouvrages sur la question bancaire et à s’entourer d’une équipe d’ingénieurs en informatique et de financiers hors pair, tels Christopher Payne, Mike Morris et Scott Anderson.
« Vous avez juste à taper une adresse mail ou un identifiant unique pour pouvoir transférer de l’argent d’un compte à un autre », explique Musk. Reposant sur un concept à la fois nouveau, simple et efficace, la société X.com obtient des licences de banque et de fonds de placement, s’associe avec Barclays et garantit à ses utilisateurs des privilèges nouveaux. À titre d’exemple, les pénalités de dépassement sont annulées et tout client hérite d’une carte de paiement de 20 dollars au seul titre de son inscription. En sorte qu’un particulier peut expédier de l’argent en ligne à n’importe qui, à la seule condition de mentionner le nom et l’adresse du bénéficiaire. Une véritable révolution bancaire qui ne tarde pas à rameuter plus de deux cent mille adhérents vers X.com en l’espace de deux mois. Une fois encore, le succès est au rendez-vous. Mais aussi la concurrence.
Le futur s’écrit sur Internet
Une idée nouvelle arrivant rarement seule, deux autres jeunes créateurs en herbe, Max Levchin et Peter Thiel, fondent à leur tour une société de paiement en ligne, Confinity. Un nouvel obstacle pour Elon Musk ? Non, un duel d’adolescents attardés qui va déboucher sur un nouveau pari, celui de PayPal.
Mars 2000 : de la fusion à la confusion
Des épreuves naissent souvent les grands défis. Pendant plusieurs semaines, les ingénieurs de Confinity et de X.com se livrent un combat sans merci pour trouver de nouveaux clients, au point de se ruiner mutuellement. Avec leur seul produit PayPal, Max Levchin et Peter Thiel dépensent plus de 100 000 dollars par jour en versant des primes à leurs utilisateurs. Au terme de quelques mois de rivalité et de compétition acharnée entre les deux champions du paiement en ligne, Elon Musk décide d’enterrer la hache de guerre en proposant une fusion des deux sociétés. Nous sommes en mars 2000. Mais encore faut-il être sur la même longueur d’onde. À commencer par le type de logiciel utilisé. Quand Lechvin penche pour Linux, Musk ne jure que par Microsoft. Qui plus est, même si Elon décide de garder le produit PayPal de ses adversaires, il entend imposer son matériel et ses méthodes de travail en conservant le même nom pour cette nouvelle société, X.com. Résultat, seulement deux mois après la fusion, c’est le clash. Peter Thiel claque la porte et Lechvin menace à son tour de quitter X.com. Et comme si cela ne suffisait pas, le système informatique implose, incapable de répondre au nombre croissant de clients. À compter de mars 2000, et ce six mois durant, il ne s’écoule pas une semaine sans que le site Web ne tombe en panne. Victime de son succès, X.com n’est pas en mesure de faire face à l’explosion à la fois des transactions, des frais perçus par les banques et des multiples fraudes. D’aucuns accusent Musk, alors directeur administratif, de mal gérer la situation. Décision est alors prise de l’évincer…
L’impensable surprise de Sydney
La mise à l’écart de Musk, un vrai coup de Jarnac ! Alors qu’Elon est en voyage de noces à Sydney avec Justine 1 , au moment des Jeux olympiques d’été, il apprend simultanément son licenciement et son remplacement par son pire adversaire, Peter Thiel, lequel avait claqué la porte de l’entreprise six mois plus tôt. Cette double décision assassine a été prise secrètement par une cohorte de conjurés dans un bar aujourd’hui disparu de Palo Alto. Il n’en faut pas plus pour qu’Elon reprenne le premier avion pour la Californie. A priori, il compte ruer dans les brancards. Dans les faits, il va faire preuve d’un surprenant esprit de conciliation…
De la fausse rupture à la fausse réconciliation?
Entendant plaider sa cause dans un premier temps, Musk finit en effet par accepter la décision du conseil de surveillance, faisant contre mauvaise fortune bon cœur. La raison l’emporte ici sur l’émotion. Plus vexé d’avoir été mis devant le fait accompli que d’avoir perdu sa place de directeur administratif, Elon a à cœur de savoir si ses conseils sur le fonctionnement de la société seront pris en considération par la nouvelle équipe. «Ce n’était pas tant que je voulais être PDG, commente Elon. C’était plutôt du genre: “Hé, je crois qu’il y a plusieurs choses importantes à faire, et je ne suis pas sûr qu’elles seront faites si je ne suis pas PDG.”
Après leur avoir passé un savon, il se range finalement à l’avis de Lechvin et de Thiel, lesquels lui promettent qu’ils continueront à suivre sa politique commerciale. « Si tu ne peux le combattre, embrasse ton ennemi», dit un proverbe tibétain. Mais autour d’Elon Musk, ses fidèles sont beaucoup plus amers et n’acceptent pas ce coup fourré…
Humilié et bafoué… mais riche
Simulée ou pas, la réconciliation de Musk avec les anciens dirigeants de Confinity se révèle payante. Toujours conseiller avisé de l’entreprise, Elon Musk laisse ainsi son rival Peter Thiel rebaptiser la société X.com du nom de PayPal. Pourquoi ce nouveau nom? Tout simplement parce que l’appellation X.com induisait parfois les gens en erreur, beaucoup la confondant facilement avec celle d’un site pornographique. Nous sommes alors en juin 2001. Dans l’année qui suit, PayPal opère une ascension fulgurante, générant pas moins de 20 millions de dollars de recettes par mois. Quelle curieuse ironie du destin ! Au moment même où Elon subit la pire vexation de son existence, il n’a jamais été aussi riche, aussi comblé. Certains en profitent cependant pour tirer à boulets rouges sur le patron viré de X.com. À commencer par Eric Jackson, l’un des anciens salariés de Confinity, qui l’assassine dans un livre où il présente Musk comme un type imbu de lui-même, n’ayant qu’une connaissance partielle du monde des entreprises, un homme invivable dévoré par un ego démesuré. Un site à ragots minimise carrément le rôle du créateur de Zip2 dans la naissance et la réussite commerciale de PayPal. D’après ses nombreux détracteurs, l’entreprise de la première banque en ligne n’aurait pas survécu si Musk n’avait pas été viré. Face à cette horde de harpies, Musk contre-attaque. Non seulement il qualifie Jackson de «lèche-botte imbécile» pas plus au courant des faits de l’entreprise qu’un simple stagiaire peu compétent, mais il met en avant son rôle déterminant dans la croissance de PayPal et dans le recrutement de ses meilleurs salariés. Quoi qu’il en soit, depuis plus d’un an, Elon Musk nourrit d’autres rêves. Maintenant qu’il dispose de fonds suffisants, l’exilé de Pretoria a de nouveau les yeux tournés vers le cosmos, sa passion de jeunesse. Avant de décrocher les étoiles, il entend surtout explorer la planète rouge, celle qui fait fantasmer les hommes depuis les débuts de l’exploration spatiale. Selon lui, Mars sera à plus ou moins long terme un nouvel eldorado ; mieux encore, une nouvelle Terre abritant d’ici un millénaire une colonie de plusieurs millions d’êtres humains. En ce début de XXIème siècle, l’aventure fantastique d’Elon ne fait que commencer.
L’historien des sciences Luc Mary propose une biographie de l’emblématique Elon Musk – L’homme qui invente notre futur. L’ouvrage paraîtra le 6 mai aux éditions de l’Archipel
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